Au cœur de ce phénomène se trouvent les plateformes numériques et l’écosystème technologique qu’elles emportent. La puissance des évolutions en cours rend nécessaire d’analyser les atouts et les faiblesses de notre système juridique pour être à la fois en capacité d’anticiper les évolutions du droit et des politiques publiques et d’y apporter les réponses d’ensemble, conçues au niveau européen et national.
Le texte ci-dessous est la synthèse rédigée par le Conseil d’État de son étude « Puissance publique et plateformes numériques : accompagner l’ubérisation – Étude annuelle 2017« , publiée en septembre 2017 à la Documentation française
I- Quelque chose est en train de se passer…
1.1. La plateforme : figure de proue de l’« ubérisation »
Si les informations statistiques disponibles peinent à cerner et à mesurer exactement les contours de l’économie des plateformes, son immense potentiel est pleinement perceptible. En témoignent, en France comme ailleurs dans tous les secteurs de l’économie les modèles économiques des plus importantes sociétés mondiales (les GAFA, mais aussi les NATU et BATX) ainsi que le large développement du marché de l’emploi « à la demande » proposé sur des plateformes en ligne.
L’émergence du capitalisme des plateformes
Quatre caractéristiques concourent à faire des plateformes des écosystèmes particulièrement performants pour le développement des relations, et donc pour celui des échanges économiques, dont l’« ubérisation » est aujourd’hui un vecteur privilégié :
- 1. La mise en système d’une multitude d’individus qui permet une démultiplication, sans coût supplémentaire, des échanges entre producteurs et consommateurs.
- 2. Un modèle économique quasi-exclusivement fondé sur l’individualisation la plus grande possible du service à destination de l’utilisateur.
- 3. Une relation de confiance entre leurs utilisateurs qui favorise la multiplication des échanges.
- 4. Un coût des transactions réalisées sur les plateformes qui tend irrémédiablement vers zéro.
Un changement de paradigme économique et social
La rupture introduite par les plateformes numériques de mise en relation se manifeste, concrètement, par un processus de désintermédiation, c’est-à-dire leur substitution aux intermédiaires de l’économie traditionnelle dont elles finissent par capter une part des profits.
Plusieurs caractéristiques principales se dégagent de la nouvelle économie de l’« ubérisation » : elle privilégie pour se développer les secteurs règlementés par la puissance publique, en mettant en lumière les vides et les incohérences juridiques ou leur inadéquation avec les évolutions technologiques ; elle accroît la concurrence économique dans les secteurs règlementés comme entre « la multitude » et les opérateurs en place.
Une typologie à visée juridique des différentes plateformes peut être esquissée. Elle combine trois critères différents :
- 1. Le caractère économique ou non de l’écosystème que constitue la plateforme.
- 2. L’objet des échanges économiques, c’est-à-dire s’ils conduisent à une création de valeur nette ou non.
- 3. L’organisation des échanges économiques sur la plateforme.
Cinq types de plateformes peuvent ainsi être identifiés : les plateformes de création de biens communs ; les plateformes de partage de frais ; les plateformes d’économie contributive ; les plateformes de courtage ; les plateformes-activité.
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