Assurance : nouveaux métiers face au changement climatique

Alors que les catastrophes naturelles se multiplient sous l’effet du changement climatique, le secteur de l’assurance se réinvente pour faire face aux défis de ce nouvel environnement de « poly-crises ».

Les assureurs ne peuvent plus se contenter d’analyser les données du passé pour prévoir l’avenir. Ils doivent désormais développer de nouvelles compétences et s’entourer de spécialistes de disciplines variées pour appréhender les risques climatiques croissants de manière prospective. Une évolution qui exige un investissement constant dans le capital humain et la recherche scientifique.

L’essor de nouvelles expertises pour anticiper les risques

Traditionnellement, les assureurs s’appuient sur des actuaires, dont le rôle est de modéliser les risques futurs à partir des données passées, grâce aux mathématiques et aux statistiques. « L’approche de l’assureur classique, c’est de faire des statistiques, de regarder ce qui s’est produit dans le passé, sur ces sinistres que nous avons indemnisés, et de reproduire ça dans le futur« , explique Simon Blaquière, directeur de la réassurance, des risques naturels et des projets techniques au sein de Generali.

Mais face à la complexité croissante des événements climatiques et à leur corrélation, de nouveaux métiers viennent enrichir les équipes : météorologistes, sociologues, hydrologues, et même experts en sciences politiques. Cette diversité de compétences permet aux assureurs de mieux comprendre et prévenir les impacts climatiques.

L’assureur italien Generali a ainsi lancé en France le Generali Climate Lab en 2015. Ce laboratoire d’expertise climatique compte aujourd’hui une équipe pluridisciplinaire d’une dizaine de personnes, mêlant actuaires et data scientists à des spécialistes des sciences climatiques comme des hydrologues, des hydrauliciens, ou encore des cartographes. En travaillant ensemble, ces experts permettent à Generali de renforcer son analyse des risques climatiques et d’élaborer des stratégies d’adaptation et de prévention innovantes. « L’objectif, c’est de mieux maîtriser, de mieux comprendre, de mieux analyser, de mieux prévenir les enjeux climatiques« , précise Simon Blaquière, qui dirige également ce laboratoire.

De la tarification des risques à la recherche collaborative

La collaboration entre experts est cruciale pour tarifer les risques liés aux catastrophes naturelles, un défi que les réassureurs comme Munich Re relèvent en permanence. Avec une équipe de trente experts spécialisés par type de catastrophe (tempêtes, séismes, éruptions volcaniques, etc.), Munich Re évalue les probabilités d’occurrence de ces événements et détermine leur coût potentiel. « Notre travail est de quantifier ces risques pour que les actuaires puissent intégrer ces informations dans les modèles de risque, et que le client final reçoive un prix juste dans son contrat », explique Tobias Grimm, expert en climat chez Munich Re.

Pour réussir cette modélisation complexe, les assureurs et réassureurs renforcent également leurs liens avec la recherche académique. Le Fonds Axa pour la recherche, par exemple, permet de financer des projets universitaires visant à comprendre l’évolution des risques naturels et à intégrer les dernières avancées dans ses propres pratiques. De son côté, Munich Re collabore étroitement avec des universités et chercheurs, intégrant les découvertes académiques dans ses modèles de risque. Generali accueille également plusieurs thésards au sein de son Climate Lab, dont les recherches portent notamment sur les effets de la sécheresse, les tempêtes et la grêle.

Vers une vision prospective de l’assurance

La multiplication des crises climatiques impose une approche plus collaborative et interdisciplinaire dans la gestion des risques. Comme l’indique Frédéric de Courtois, directeur général adjoint d’Axa, « non seulement ces nouvelles compétences sont importantes et pour nous c’est important de pouvoir les recruter, mais la collaboration entre ces différentes compétences est (un élément) clé. » Dans ce contexte, si l’actuaire reste central, il devient crucial de réunir ces experts pour appréhender la complexité des risques climatiques et adapter les politiques de couverture en conséquence.

En fin de compte, l’assurance climatique se profile comme un domaine en évolution rapide, où la science, la modélisation des données et l’innovation humaine sont des piliers essentiels. Les compagnies d’assurance investissent ainsi dans des compétences variées et collaborent avec la recherche pour anticiper les risques de demain. Ces nouvelles expertises permettent de construire des réponses adaptées et résilientes, face aux défis inédits que pose le changement climatique.

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