Débutée en 2008 avec la loi Chatel, poursuivie en 2014 avec la loi Hamon puis en 2022 avec la loi Lemoine, la résiliation des contrats d’assurance fait l’objet de réglementations successives depuis une quinzaine d’années.
Alors que ces différentes lois ont permis d’en réguler les conditions, les modalités font, pour la première fois, l’objet d’un décret. Ailancy a donc décidé d’analyser ce décret et de partager sa perception de la résiliation en 3 clics.
Retour sur les modifications des conditions de la résiliation en Assurance
La résiliation d’un contrat d’assurance peut désormais avoir lieu à échéance ou hors échéance et peut être à l’initiative de l’assuré, sous certaines conditions, ou à l’initiative de l’assureur en cas de non-paiement des cotisations ou après un sinistre, si cela est spécifié dans le contrat d’assurance.
La résiliation à échéance d’un contrat d’assurance
Dans la grande majorité des cas, les contrats d’assurance sont conclus pour une durée d’un an à tacite reconduction et peuvent être résiliés à l’échéance principale. Cette dernière, correspondant généralement à la date anniversaire de la prise d’effet du contrat, peut être différente de la date de signature.
Dans le cadre d’une demande de résiliation à échéance du contrat d’assurance, un préavis est à respecter. Ce préavis porté à deux mois, peut être contractuellement réduit mais il ne peut dans aucun cas être augmenté.
Depuis la loi Chatel en 2008, les assureurs ont pour obligation de rappeler à leurs assurés la date limite à laquelle il est possible de résilier leur contrat. A compter de la date d’envoi de cet avis, l’assuré dispose alors d’un délai de 20 jours pour demander la non-reconduction de son contrat.
La résiliation infra-annuelle d’un contrat d’assurance
Depuis la mise en place de la loi Hamon, il est possible de résilier son assurance à tout moment après le premier anniversaire de la date de souscription du contrat, sans motif ni frais de résiliation. Mais cette nouvelle mesure concerne uniquement les contrats d’assurance :
- Multirisques habitation ;
- Automobile ;
- Affinitaire (proposés en complément de la vente d’un bien ou d’un service) ;
- Complémentaire santé (depuis la loi du 4 juillet 2019).
Les modalités de cette résiliation hors date d’échéance dépendent du type de contrat :
- Pour les assurances obligatoires (automobile ou habitation pour les locataires), l’assuré n’a pas de démarche à effectuer : c’est au nouvel assureur de procéder à la résiliation de l’ancien contrat et de veiller à une continuité de la couverture ;
- Pour les autres assurances non obligatoires la résiliation est à la charge de l’assuré.
Dans les deux cas, la résiliation infra-annuelle prend effet un mois après la réception de la demande par l’assureur qui devra rembourser à l’assuré les sommes trop versées.
Depuis le 28 février 2022, il est également possible de résilier son contrat d’assurance emprunteur à tout moment dans la mesure où l’assuré présente un autre contrat avec des garanties équivalentes.
La résiliation d’un contrat d’assurance pour changement de situation
Selon le code des assurances (article L.113-16), l’assuré peut demander la résiliation de son contrat pour changement de situation. Dans ce cas, la résiliation doit intervenir dans les trois mois suivant l’événement déclencheur.
Résiliation en trois clics : le décret de mise en œuvre
Alors que l’ensemble de ces réglementations a facilité les conditions de résiliation des contrats d’assurance, les assurés doivent dans la plupart des cas réaliser une demande de résiliation par lettre recommandée en respectant un délai de préavis. C’est dans ce cadre que la Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 apportant les mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat a instauré la résiliation des contrats d’assurance en 3 clics. Et, le 16 mars 2023, le décret n° 2023-182 est venu en préciser les modalités.
Ainsi, depuis le 1er juin 2023, la résiliation en ligne et en trois clics est possible si, au jour de la demande, l’assureur propose la souscription par voie électronique. Elle s’applique à tout « contrat d’assurance couvrant des personnes physiques en dehors de leurs activités professionnelles » et doit être proposée pour l’ensemble des contrats en cours ou à venir.
Il convient de noter que cette nouvelle modalité de résiliation doit être accessible aux personnes physiques mais également aux personnes morales, à condition que le contrat couvre une personne physique en dehors de son entreprise. Par ailleurs seuls les contrats d’assurance-vie sont à exclure du champ d’application du décret.
Par conséquent la résiliation en trois clics doit être mise en œuvre pour les contrats d’assurance IARD, les assurances de personnes couvrant des risques non-vie et les contrats mixtes.
Les modalités de mise en œuvre de la résiliation en 3 clics
Ainsi, tandis que tous les assureurs doivent développer cette fonctionnalité, pour les courtiers, seuls ceux ayant conclu une convention de délégation de gestion avec un assureur devront mettre en œuvre la fonctionnalité de résiliation en 3 clics, dès lors qu’ils proposent à leurs clients un espace de souscription en ligne.
Selon le décret d’application publié le 16 mars 2023, les modalités de mise en œuvre de cette nouvelle fonctionnalité sont les suivantes :
⮚ Au 1er clic
Sur la page web de l’assureur ou du courtier ayant conclu une convention de délégation de gestion, une rubrique doit être directement accessible et lisible, sans connexion préalablement nécessaire à un espace client.
Au sein de cette rubrique, il doit être possible de cliquer sur la fonctionnalité « Résilier votre contrat » ou une formule similaire sans ambiguïté. Cette rubrique doit être permanente, gratuite et facile d’accès.
A la suite de ce 1er clic, un rappel général des conditions de résiliation des contrats doit être réalisé à titre informatif, dans lequel il doit notamment être précisé les délais de préavis ainsi que les conséquences d’une résiliation pour l’assuré.
⮚ Au 2ème clic
Il doit ensuite être demandé à l’assuré de fournir les informations suivantes :
- Nom et prénom, raison sociale ou dénomination sociale ;
- Les moyens de contact permettant à l’assureur de notifier l’assuré de la réception de sa demande de résiliation ;
- La référence du contrat concerné ;
- Le motif de la résiliation ;
- La date de l’évènement donnant lieu à la résiliation, ou à défaut la date de prise d’effet souhaitée de la résiliation.
Après avoir renseigné ces informations, le 2ème clic est demandé à l’assuré afin de valider les éléments fournis et de passer à l’étape suivante.
⮚ Au 3ème clic
Un récapitulatif des informations fournies est alors présenté à l’assuré réalisé et deux options doivent lui être proposées :
- Modifier les données complétées en cas d’erreur ;
- Cliquer sur la mention lisible « confirmer ma demande de résiliation » (ou toute autre formule analogue), ce qui fera office de 3ème clic.
A la suite de ce troisième clic, les informations saisies doivent être transmises à l’assureur ou au gestionnaire qui devra notifier l’assuré de la réception de la demande et procéder au traitement de cette dernière.
Les conséquences de la résiliation en 3 clics pour les professionnels de l’assurance
Dans son communiqué du 1er juin, le ministère de l’économie précise que les professionnels concernés ont jusqu’au 1er septembre 2023 pour se mettre en conformité. Mais, si la mise en place de cette fonctionnalité n’apparaît pas comme une difficulté particulière, ce décret poserait des questions, comme nous avons pu en parler dans cet article.
Ainsi, Ailancy estime que cette nouvelle fonctionnalité « peut entraîner plusieurs conséquences négatives pour les assureurs comme l’augmentation du nombre de résiliation ou encore l’augmentation de la charge liée à la vérification des dossiers et de l’éligibilité des clients à la résiliation. »
Par ailleurs, le cabinet de conseil se pose la question de la gestion du risque de défaut d’assurance. Un assuré pouvant résilier une assurance obligatoire en 3 clics, cela renforcerait la nécessité des contrôles par les assureurs notamment pour garantir que le risque reste couvert. Bien que, l’impact pour les assurances obligatoires peut être limité puisque dans le cadre d’une résiliation pour changement d’assureur, l’ensemble des démarches sont effectuées entre assureurs, qui n’utilisent pas ce nouveau canal de demande.
A l’inverse, Ailancy voit dans ce décret une opportunité pour s’interroger sur l’efficacité des processus de gestion des résiliations :
- Le traitement actuel des demandes papier ;
- Les demandes d’autres assureurs dans le cadre de la résiliation des assurances obligatoires ;
- Les évolutions à mettre en place afin d’absorber et traiter ce nouveau format de demandes…
Ainsi, les nouvelles fonctionnalités et les changements induits par ce décret sont l’occasion de réfléchir à de nouvelles pistes d’innovation pour mettre l’assurance en mouvement vers plus d’optimisation.