La Médiation de l’Assurance (LMA) est l’une des médiations sectorielles les plus importantes de France par le volume de saisines traitées. Le Médiateur de l’Assurance, Arnaud Chneiweiss, vient de publier son rapport d’activité 2021.
En 2021, LMA a reçu 19 684 saisines, soit une hausse de 13 % par rapport à 2020.
La progression des saisines est d’un tiers en deux ans. Le pic de la crise sanitaire passé, le volume de saisines n’a donc pas reflué. Cette forte croissance peut s’expliquer par divers facteurs :
- la loi de modernisation de la justice de 2019 oblige à tenter une médiation pour les litiges inférieurs à 5 000 euros avant de saisir les tribunaux ;
- une meilleure connaissance de l’existence de la Médiation, dont l’accès est gratuit pour les assurés ;
- la possibilité existant depuis décembre 2020 de saisir LMA pour les litiges relatifs aux assurances professionnelles.
En 2021, dans ses propositions de solution, La Médiation de l’Assurance est allée dans le sens de l’assuré, en tout ou partie, dans 31 % des cas. Dans 6 % des propositions exprimées, il s’agit de décisions en équité.
En tenant compte des transactions amiables faites par les assureurs lorsqu’ils constatent que la Médiation a été saisie, l’assuré a eu satisfaction, en tout ou partie, dans 47 % des dossiers résolus en 2021, avec un délai de réponse désormais inférieur à 7 mois en moyenne.
La crédibilité de LMA repose sur deux composantes essentielles : l’indépendance, sans laquelle les assurés n’auraient pas de raison de se tourner vers LMA, et la compétence, grâce à laquelle les assureurs et intermédiaires d’assurance acceptent de suivre massivement ses positions (plus de 99 % des positions exprimées en 2021).
1. La Médiation de l’Assurance, force de propositions
Le Médiateur doit être force de propositions. Ainsi, certains constats faits dans le traitement des litiges se sont transformés en sources de réflexion pour le Comité consultatif du secteur financier (CCSF).
– Les assurances affinitaires
Ces assurances continuent de représenter une part disproportionnée des saisines de la Médiation de l’Assurance en assurance dommages : 13 % du total des dossiers en 2021 et nous voyons une nette poussée des saisines au premier semestre 2022. Il s’agit avant tout des litiges liés aux assurances de téléphone portable et aux questions relatives aux annulations de voyage dans le contexte de crise sanitaire.
En matière d’assurance de téléphone portable, il existe encore chez certains acteurs, intermédiaires ou assureurs, des pratiques commerciales trompeuses, et des situations dans lesquelles le consentement à l’assurance n’a pas été recueilli correctement.
Dans le cadre des travaux du CCSF, le constat que le délai de rétraction de quatorze jours prévu par le Code de la consommation était trop court a été examiné et a abouti à la proposition de le porter à trente jours pour ces assurances. Une autre question a porté sur le point de départ de ce délai, notamment si une promotion commerciale offre une période de gratuité de l’assurance. L’Avis du CCSF (5 mai 2022), repris dans la loi « pouvoir d’achat » du 16 août 2022, indique que le délai de renonciation à l’assurance ne doit dans ce cas débuter qu’à compter du paiement de tout ou partie de la première prime d’assurance.
– La complexité des cas de résiliation des contrats
Il existe aujourd’hui seize modalités différentes de résiliation d’un contrat d’assurance, selon que cette résiliation se fasse à l’initiative de l’assuré ou de l’assureur, selon que l’on se trouve dans le cadre d’un contrat individuel ou collectif, selon qu’il s’agisse d’un particulier ou d’un professionnel… Il était grand temps que l’on se penche activement sur la nécessaire harmonisation et simplification des règles, ce que le CCSF a eu le courage de faire.
En mai 2022, un consensus a ainsi été trouvé pour une harmonisation des conditions de résiliation des contrats d’assurance : le CCSF propose que tous les contrats d’assurance individuels ou collectifs à adhésion individuelle, couvrant des assurés personnes physiques en dehors de leurs activités professionnelles, soient résiliables à tout moment après la première année de souscription.
Quelques exceptions demeurent pour les contrats saisonniers (chasse, assurance scolaire…) mais ce sera là une grande avancée vers une simplification des conditions de résiliation d’un contrat d’assurance, qui prendra effet à compter du 1er juillet 2023.
– Les clauses d’exclusion floues
Il n’est pas acceptable que persistent aujourd’hui dans les contrats des clauses déclarées illégales, parfois de longue date, par la Cour de cassation. Depuis sa prise de fonction le Médiateur se bat pour la disparition de ces clauses, comme celle sur « le défaut d’entretien », concept trop vague pour que l’assuré puisse connaître exactement l’étendue de sa garantie.
La Profession doit se fixer pour priorités de i) cesser dès maintenant d’opposer ces clauses aux assurés et ii) de les faire disparaître des contrats.
Le Médiateur a été informé que des groupes de travail professionnels ont été créés sur le sujet et certains acteurs majeurs lui ont fait part de leur volonté d’aller dans le sens recommandé.
2.Points d’attention
– Forte hausse des saisines relatives aux catastrophes naturelles
Nous constatons une progression constante des litiges sur ce sujet. Les événements climatiques, qu’ils soient ou non qualifiés de « catastrophe naturelle » au sens légal, représentent début 2022 10 % des saisines relatives à l’assurance dommages. En 2019, ce n’était que 6 %.
En leur sein, on constate la croissance des litiges liés à la sécheresse, qui représentent désormais 2 % des saisines en assurance dommages, contre moins de 1 % en 2019. La contestation porte en général sur le fait que l’expert envoyé par l’assureur ne parvient pas à conclure que les fissurations de l’habitation peuvent être rattachées de façon « déterminante » à une période déclarée de catastrophe naturelle pour la commune concernée.
La sécheresse de l’été 2022 montre l’actualité grandissante de ce sujet.
– La clarté des termes utilisés
Beaucoup d’incompréhensions viennent du fait que certaines définitions utilisées dans les contrats – certes signés par les deux parties – s’éloignent du sens communément donné à ce qu’est un « accident », une « invalidité » ou une « effraction ». Il existe une dérive chez certains acteurs : des définitions trop restrictives, qui ne correspondent pas au langage courant, conduisent à induire en erreur l’assuré sur la réalité des protections souscrites.
3. La réforme de la procédure de saisine
Le CCSF s’est saisi, au premier semestre 2021, du sujet de la nécessaire simplification de la procédure de saisine de la Médiation, en associant à ses travaux la Direction du Contrôle des pratiques commerciales de l’ACPR et le Secrétariat de la Commission d’évaluation et de contrôle de la médiation de la consommation (CECMC). L’ACPR a ainsi engagé une concertation avec les Professions de l’assurance et de la banque visant à la réécriture de sa recommandation sur le traitement des réclamations dans ces deux secteurs. Cette nouvelle recommandation a été publiée en mai 2022 et engage un changement de philosophie profond. Désormais, dès lors que l’assuré aura manifesté son mécontentement écrit – peu importe si ce mécontentement est adressé directement à l’assureur ou à l’un des intermédiaires le représentant – à l’issue d’une période de deux mois d’échanges avec l’intermédiaire ou l’assureur, il pourra saisir la Médiation de l’Assurance.
Cette réforme, qui entrera en vigueur le 31 décembre 2022, est sans aucun doute très favorable aux consommateurs dont l’accès à la médiation sera facilité. Elle pose dans le même temps un vrai défi aux assureurs et intermédiaires d’assurance, qui devront désormais gérer l’ensemble du processus de réclamation dans le délai réduit de deux mois, nettement inférieur à ce que nous constatons aujourd’hui, et potentiellement à la Médiation de l’Assurance, qui pourrait avoir à traiter une masse de dossiers bien plus importante.
Chiffres clés 2021
Les litiges en assurance de biens et responsabilité continuent de représenter la majorité des saisines (59%).
- En assurance de dommages, les litiges relatifs aux contrats d’assurance Multirisques Habitation (33 %) et Automobile (31 %) ont augmenté en 2021 et représentent ensemble près des deux tiers des saisines. En assurance de personnes, les contrats d’assurance Santé (24 %) sont la source la plus importante de litiges. Les différends portant sur des contrats de prévoyance, garantissant le décès, l’invalidité ou l’incapacité, sont à l’origine de 23 % des saisines en assurance de Personnes.
- En 2021, La Médiation de l’Assurance a formulé 3 977 propositions de solution, soit une augmentation de 10 % par rapport à 2020.
- En tenant compte des transactions amiables effectuées sous l’égide de La Médiation de l’Assurance, son action a permis de proposer une issue favorable au réclamant, en tout ou partie, dans 47 % des cas.
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Selon CP