Guerre des talents, une réalité pour l’assurance ? est le thème de l’entretien avec Gabriel Marolleau People Experience Manager Assurly
D’un point de vue général, les mutations des entreprises, exacerbées par la crise sanitaire, doivent-elles inciter l’entreprise à repenser sa stratégie en matière d’attractivité ? (en interne et en externe)
Oui, les éléments valorisés aujourd’hui ne sont pas les mêmes qu’il y a 3 ans… L’évolution des mentalités a été très rapide. Il faut donc reprendre la proposition de valeur de l’entreprise pour ses salariés.
Se poser la question de savoir si ce que l’entreprise considère être un avantage en est vraiment un… Est-il perçu comme tel par les salariés ? Si la réponse n’apparaît pas comme une évidence, il faut revoir cet aspect. Proposer une cohérence tout au long du parcours de vie du salarié entre les valeurs et ce que la nouvelle donne du marché du travail demande est crucial.
L’exemple du télétravail qui est sûrement le plus parlant doit s’accompagner de rituels, de règles. Chez Assurly, pendant les confinements, nous avions par exemple mis en place des “cafés visio” pour garder le lien. Toutes les matinées du jeudi, l’équipe se retrouvait à 9h, pour discuter de sujets qui n’étaient pas reliés au travail. Depuis, nos rituels d’équipe se passent le plus souvent en présentiel avec (entre autres) des apéros hebdomadaires et des tournois de ping-pong.
Dans le secteur de l’assurance, craignez-vous une pénurie des compétences clés ?
Oui et non. Si l’assurance continue d’utiliser un modèle organisationnel qui ne prend pas en compte la digitalisation des postes, des relations clients et des formations de collaborateurs, la pénurie se fera particulièrement sentir.
Au contraire, si on inverse complètement le paradigme en s’équipant pour adjoindre, dès le départ, des compétences clés aux collaborateurs, nouveaux comme anciens, alors il sera possible de mitiger la pénurie ressentie.
Nous sommes notamment en train de mettre en place un plan de formation chez Assurly. Ce bilan se base sur une approche dynamique des évaluations de compétences. Le salarié s’auto-évalue d’abord, puis nous réalisons un bilan pour identifier les écarts possibles, et décidons ensemble de la pertinence d’une formation externe et/ou interne. Si la pratique n’est pas nouvelle, c’est le côté dynamique de l’approche qui doit primer pour faire face aux besoins changeants du marché.
L’attractivité perçue d’une entreprise est-elle un facteur clé de son succès ? (pour le recrutement)
Absolument. Comme sur tous les marchés, un petit nombre d’acteurs ou de branches d’activité va concentrer l’attractivité des profils. A partir de là, les entreprises qui considèrent que c’est un sujet secondaire perdront énormément de temps et auront du mal à recoller avec les meilleurs dans ce domaine.
Avoir une entreprise attractive, ou tout au moins bien perçue par des candidats potentiels, devient stratégique. Notamment avec les périodes d’incertitudes entourant l’augmentation des risques dans toutes les catégories assurantielles. L’agilité de demain suppose de construire dès maintenant son image pour attirer rapidement les talents.
Les entreprises doivent-elles réinventer la relation employeurs / collaborateurs ?
Oui, ne serait-ce que pour s’adapter à une structure de travail qui évolue en permanence. Avec le télétravail, la confiance prend le pas sur le contrôle. Cela sous-entend aussi d’avoir des collaborateurs qui ont les compétences nécessaires pour performer à distance, loin du manager.
La montée du statut de freelance est également à prendre en compte. Nous verrons peut-être des actuaires, ou encore des juristes devenir freelance. Enfin, un renversement de pouvoir sur un marché de candidat avec une nouvelle génération qui prend clairement position, recherche un sens, des valeurs, une conception managériale plus exigeante, entraîne forcément un besoin de se repositionner par rapport aux candidats potentiels. Il ne faut pas s’y tromper, les recruteurs sont tout autant recrutés par les candidats !
Au-delà de la rémunération, comment selon vous, attirer/garder les talents d’une entreprise ?
Si la confiance, l’expertise et l’évolution étaient vécues de manière parfaite par les collaborateurs, il n’y aurait pas de turnover. Même si l’idéal précité ne peut être atteint, il est indispensable de s’en approcher car cela réduit drastiquement les risques de voir des collaborateurs quitter le navire.
En somme, il faut réfléchir, toujours en gardant en tête le souci de cohérence. Il faut savoir comment adapter les valeurs de l’entreprise à chacun de ces trois piliers. C’est en s’efforçant de répondre à ces trois besoins que nous attirons les personnalités qui feront d’Assurly un acteur incontournable et encore plus innovant de l’assurance. Une fois chez nous, c’est également en proposant des projets intéressants sur lesquels intervenir que nous gardons et fidélisons les profils qui correspondent le mieux à notre ADN.
En général, pour les entreprises du secteur de l’assurance, la “guerre des talents” est-elle aujourd’hui en France, une réalité ?
Oui et à plusieurs titres.
Le premier, c’est le marché de candidats dans lequel nous nous trouvons. Ce sont les candidats qui ont le plus souvent la main puisque tout le monde recrute et partout. Ils ont le choix et feront tout pour trouver l’entreprise parfaite qui correspond à leurs besoins. Ensuite, il y a une fuite des compétences vers d’autres secteurs. C’est une réalité, l’assurance n’est pas toujours le produit le plus attrayant.
Certains talents qui pensent avoir fait le tour du secteur n’auront aucun mal à le délaisser pour un autre plus attractif.
Enfin, l’inadéquation entre les formations initiales et les besoins du secteur, qui connaît de gros changements, fait que nous assistons à une guerre des talents. Notamment ceux qui sont formés, et déjà passés par d’autres assureurs…
Il faut changer nos filtres et nos pratiques pour intégrer ceux qui sont en sortie d’études. D’un autre côté, il faut être innovant pour réussir à garder ceux qui réfléchissent à partir vers d’autres horizons. C’est une guerre dans laquelle chaque assureur a une responsabilité pour augmenter l’attractivité du secteur dans son ensemble si nous voulons pérenniser un pool de candidats.
Pour conclure ?
L’assurance est plus que jamais un acteur d’avenir. Compte tenu des incertitudes croissantes qui pèsent sur le contexte économique et social, elle a donc un vrai rôle à jouer dans ce nouveau monde qui se dessine. Et pour continuer d’assumer pleinement son rôle, il faudra des talents et des pratiques dynamiques, hors des vieux schémas de pensée.
L’assurance du 21ème siècle n’aura pas la même structure : IT, marketing, IA, machine learning sont autant de champs exploratoires qui vont changer l’image de l’assureur en costume ! C’est donc en réussissant à faire sa mue interne, avec une proposition de valeurs pour les salariés comme elle a su le faire pour ses clients, que l’assurance arrivera à délivrer la valeur promise à la société au sens large.
La responsabilité sociale et écologique commence en interne. Le temps des discours est globalement révolu, place désormais à l’action et à l’expérimentation. C’est ce qu’attendent les clients, mais c’est aussi ce qu’attendent les candidats !
Dossier : Guerre des talents, réalité pour le secteur de la l’assurance ? enquête, itw, libre blanc, AssuranceTV, podcast… si intérêt, nous consulter.