Entre droit des patients, naissance de la démocratie sanitaire et rôle des complémentaires santé, Gérard Raymond, Président de FRANCE ASSO SANTÉ évoque ses convictions fortes*. Contenu réalisé dans le cadre de l’ouvrage** « Dessine-moi une complémentaire santé », co-production Carte Blanche Partenaires et Vovoxx.
La découverte de ce début du 21e siècle, n’est pas le numérique, mais le droit des patients, la naissance de la démocratie sanitaire, la loi du droit des patients et l’émancipation des patients vis-à-vis du parcours de soins et des professions de santé. Rappelons que les droits des patients, depuis la loi Kouchner de 2002, reposent sur deux textes de loi du début de ce siècle : la loi du 4 mars 2002 dont le titre II s’intitule Démocratie sanitaire, complété depuis par la loi du 22 avril 2005 sur les droits des malades en fin de vie.
Chaque patient a donc des droits et peut exiger d’avoir ses informations de santé et participer à son traitement et l’évolution de sa santé. Il s’agit plus généralement de donner plus de démocratie pour les usagers dans l’élaboration des politiques de santé. Même si depuis quelques années, l’application du droit des patients, monte en puissance, il subsiste encore quelques freins à son application, en particulier à cause de la peur du changement. Les corps constitués de professionnels de santé ont encore quelques réticences et certains encore, en les paraphrasant, n’hésitent pas à dire « ce n’est pas les patients qui doivent nous dire ce que l’on doit faire ».
Il faut constater que la France n’a pas une politique de santé mais plutôt une certaine organisation des soins, conditionnée dans son financement public par une nécessité d’équilibre comptable, avec des financeurs, en particulier l’Assurance Maladie et les complémentaires santé.
Notre capacité au changement est plus que compliqué et, ne nous le cachons pas, il y a une difficulté d’introduire la reconnaissance du patient dans notre système de santé global. Il y a un énorme travail de pédagogie à faire auprès des Français sur les droits du patient. Les Français sont tellement loin du soin, de la santé, peu de personnes d’ailleurs perçoivent la notion de capital santé. Il faut dire « à décharge » que nous n’avons pas réalisé l’éducation à la santé, la valorisation de la prévention et que notre système de santé est un système essentiellement de soins, axé sur le curatif. Il faut véritablement faire de l’éducation à la santé, sortir du « tout curatif » et entrer dans une culture de la prévention, et de l’accompagnement des personnes à risques et des malades. Les Français ne savent pas ce qu’est la démocratie sanitaire. Si nous devons collectivement faire un gros effort pour éduquer sur ce point l’ensemble des citoyens, il faut que les Français comprennent également que le système de santé a aussi besoin d’eux !
J’espère que la crise sanitaire que nous traversons va permettre une évolution des prises de conscience et nous faire comprendre les limites, pour la santé publique, d’une gestion uniquement comptable et restrictive. La crise sanitaire révélatrice des fragilités du système de santé et probablement un accélérateur vers plus de démocratie sanitaire. Cette accélération doit également tendre vers plus de participation directe ou représentative dans les politiques de santé, dans les territoires et la société. Il faut noter que l’indignation de certains qui critiquent, à juste titre, certains pans de notre système de santé, en particulier certaines associations, doit se transformer pour aller vers une co-construction positive et responsable.
J’ai la conviction qu’il faut repenser l’ensemble du système de santé, prendre de la hauteur et du temps pour redéfinir le financement et l’organisation du système de santé. Il faut redessiner le champ des acteurs et des financeurs. Nous devons coordonner l’ensemble car toutes les actions sont très cloisonnées et chacun fait son chemin, de son côté. À tel point que nous pourrions nous demander « Y- a-t-il un pilote dans le système de santé ? ». Sans faire de révolution, il y a matière à progresser sur la gouvernance. Autre point essentiel et structurant, aucune réforme de fond du système de santé, durable et compréhensible par tous, ne se fera si nous ne nous saisissons pas d’une façon proactive de l’outil numérique. Par exemple, ne pas avoir un dossier médical partagé et sécurisé pour tous est une aberration. Il s’agit d’un retard majeur. De mon point de vue, il s’agit là d’une urgence absolue, même d’un préalable à toutes réformes du système de santé, avec l’obligation pour les professionnels de santé d’ouvrir le dossier médical partagé de chaque patient et bien sûr, de le remplir !
Il était indispensable, de mon point de vue de voir le cadre général, pour aborder plus spécifiquement le rôle de la complémentaire dans le parcours de santé ou de soins, objet de votre ouvrage. Nous pourrions réfléchir au fait que les organismes de complémentaire santé, au-delà du rôle historique de financer une partie des soins, s’engagent plus fortement sur l’éducation à la santé et la prévention. Ces organismes sont totalement légitimes, tout comme l’Assurance Maladie, pour porter des actions de cette nature.
*Réalisé lors du 1er semestre 2020
**Co-production Carte Blanche Partenaires / L’assurance en Mouvement – Vovoxx