Les assureurs rappellent que le gouvernement doit remettre au Parlement, au plus tard le 30 septembre 2021, un rapport sur l’évaluation du dispositif prévu à l’article 990 I du Code général des impôts.
Pour rappel, cet article prévoit que chaque bénéficiaire des capitaux transmis dans le cadre de l’assurance vie, peut bénéficier, quel que soit son lien de parenté avec le souscripteur‑assuré, d’un abattement de 152 500 euros, qui se cumule avec l’abattement de droit commun. Au‑delà, les sommes perçues sont imposées à 20 % (sur une tranche de 700 000 euros), puis à 31,25 % pour l’excédent *.
Le retour de la querelle sur la réserve héréditaire
Le futur rapport doit notamment : l’impact économique de ce dispositif, l’évolution de son coût et du nombre de ses bénéficiaires ainsi que les éventuelles perspectives d’évolution permettant d’en renforcer l’efficience.
On notera qu’il s’inscrit lui-même dans le prolongement du groupe de travail sur la réserve héréditaire, mis en place par le Ministère de la justice, dont les conclusions ont été rendues le 16 décembre 2019, et où il est proposé de soumettre l’assurance-vie au droit commun des successions (page 155 du rapport).
Le rapport sur la réserve héréditaire explique que « classiquement, l’assurance-vie était une opération de prévoyance, qui prenait essentiellement la forme d’une assurance-décès. […] Or, depuis une trentaine d’années, les formes de l’assurance-vie se sont diversifiées. A côté de la forme classique, des formes dites modernes sont apparues. Elles sont elles-mêmes variées mais ont en commun d’être des opérations de placement ».
La question se pose donc « de savoir s’il convient d’appliquer à ces produits de placement les règles dérogatoires prévues par le code des assurances pour des opérations de prévoyance ».
Le rapport rappelle que la Cour de cassation a pris position en décidant que les contrats d’assurance-vie sont des contrats aléatoires, même lorsqu’ils réalisent des opérations de pur placement, au motif que « le contrat d’assurance dont les effets dépendent de la durée de la vie humaine comporte un aléa » (Cass. ch. mixte, 23 nov. 2004). Il propose à ce titre de remettre en cause cette jurisprudence au motif qu’elle porte atteinte aux intérêts des héritiers réservataires.
Proposition de loi
Il semblerait désormais que le temps s’accélère. Le 18 février prochain une proposition de loi visant à « réformer la fiscalité des droits de succession et de donation : protéger les classes moyennes et populaires, et mieux redistribuer les richesses », sera examinée en séance publique.
Elle entend supprimer le traitement fiscal différencié des contrats d’assurance‑vie aux fins de l’impôt sur les successions pour les contrats d’assurance‑vie les plus importants en rappelant que, aujourd’hui, un quart des montants transmis par succession le sont via l’assurance‑vie en France. « Depuis 30 ans, cette classe d’actifs constitue le support privilégié des plus hauts patrimoines pour l’investissement de leur excédent d’épargne. L’assurance‑vie représente aujourd’hui environ 45 % du patrimoine financier des ménages, contre moins de 5 % au début des années 1980 », est-il précisé.
Déposée par des parlementaires du groupe Socialiste, cette proposition de loi n’a guère de chance d’être adoptée. Quant à l’assurance vie, ce n’est pas la première fois qu’elle subit ce type d’attaque sur ses avantages fiscaux et successoraux.
Mais attention, tout de même, car le contexte a changé. Face au mur de la dette publique qui s’annonce, le trésor de guerre que constitue l’assurance vie risque d’être très vite convoité. En conclusion, cette fois, c’est du sérieux, pensent les assureurs.
*Contrats souscrits après le 20/11/91 et primes versées après le 13/10/98.
Jean-Charles Naimi