Le PER vise une simplification du paysage de l’épargne retraite supplémentaire. Dans ce contexte, le PER permet-il une meilleure compréhension de l’épargne-retraite supplémentaire pour les clients ? Les Français seront-ils plus nombreux à s’engager dans des dispositifs d’épargne-retraite ?
Le PER devrait permettre une meilleure appréciation de l’épargne retraite, à défaut d’une meilleure compréhension. En effet, il constitue une très bonne mesure en ce qu’il permet de cotiser tout au long de sa vie dans une même structure. Un progrès réel, car celle-ci permettra de lier les différents plans d’épargne contractés au cours de carrières de plus en plus erratiques. Toutefois, cette structure comporte différents compartiments, aux législations différentes, qui ne seront pas plus limpides pour les Français du jour au lendemain. S’ils sauront apprécier la possibilité d’unir les différents contrats, l’accompagnement d’un expert pour assimiler ces derniers leur sera probablement et encore nécessaire.
Le PER lève-t-il tous freins à la retraite complémentaire par capitalisation, pour une acceptation par les clients ? Les Français vont-ils, via ce nouveau dispositif, adhérer significativement à la retraite supplémentaire par capitalisation ?
Il est fort à parier que oui, notamment à travers la souscription de PER individuels (ex PERP ou Madelin). La possibilité de sortie en capital (sous certaines conditions) qu’ils induisent devrait accélérer ce type de placement. S’il ne faut pas oublier, et nous l’avons observé au cours des derniers mois, que les Français restent attachés à la répartition, ils restent généralement ouverts à l’idée d’une retraite supplémentaire par capitalisation. Le métissage, conféré par le PER, entre répartition et capitalisation constitue une vraie chance et un bon compromis pour les Français. Ajoutons que la forte médiatisation de la Réforme des retraites ne peut qu’amener ces derniers à se questionner sur leur épargne retraite, et songer à souscrire des dispositifs par capitalisation.
Cette simplification de l’épargne retraite supplémentaire, va-t-elle accélérer la digitalisation de la distribution de produit épargne-retraite ?
Comme je l’ai évoqué, la structure unique du PER sous-tend un effet simplificateur, mais il n’en reste pas moins un produit complexe, requérant pédagogie et avis auprès de réseaux formés sur ce créneau. La digitalisation constituera plus un levier pour l’intermédiation, amenée à utiliser les outils digitaux pour la souscription notamment, que la distribution même.
Ce nouveau dispositif de l’épargne retraite supplémentaire va-t-il bénéficier aux réseaux de proximité ?
Il ne bénéficiera aux réseaux de proximité qu’à la condition qu’ils soient compétents en la matière. Beaucoup d’intermédiaires ont à cet égard commencé à se former sur le sujet et d’autres le feront. S’il est, à mon avis, un thème de formation à privilégier pour 2020, c’est bien celui-là, tant le produit sera intensément saisi.
Les intermédiaires de proximité auront-ils besoin d’accompagnement ?
C’est là tout le cœur du sujet. La commercialisation d’un tel produit est indissociable des compétences qu’il exige pour conférer les bons conseils. De nombreuses formations existent déjà, et des outils devraient être développés par les compagnies.
Ce nouveau paysage de l’offre épargne retraite fera-t-il que les intermédiaires de proximité seront plus nombreux et plus efficaces à commercialiser des dispositifs d’épargne-retraite ?
Un bon nombre de compagnies se sont positionnées sur cette offre, perçue comme une belle opportunité, après la promulgation de la Loi Pacte, en incluant tout de suite leurs intermédiaires dans leur stratégie. Cela prouve qu’elles ont conscience de la valeur ajoutée des intermédiaires dans la mise en place de ces gammes, encore inconnues du grand public, pour les faire connaître et les expliquer.
Le PER va-t-il ouvrir de nouveaux marchés ? Le PER va-t-il permettre le transfert de l’épargne vers de l’épargne retraite ? Le PER va-t-il permettre de sortir les épargnants du fonds en euros pour aller vers les unités de compte ?
Le PER va probablement générer un accroissement de l’épargne retraite, on ne peut en dire autant pour les transferts. Ces types de placements n’ont en effet pas le même objectif. L’argent placé dans l’assurance vie, par exemple, doit, dans l’esprit de la majorité des épargnants, servir avant leur retraite ou être transmis. Le PER devrait plutôt occasionner un nouvel arbitrage entre épargne retraite et épargne vie. À cet égard, les contrats d’épargne retraite, à échéance plus longue, sont plus adaptés à un déploiement vers les unités de compte. Ce qui ne réglera pas pour autant le problème des fonds euros dans l’assurance vie.
Concernant les offres du marché, sur quoi vont-elles se différencier ?
Les biais de différenciation devraient rester les mêmes que pour les offres actuelles : choix des rendements, majoration ou réversion de la rente, frais, garantie ou non de la table de mortalité, etc.
Au final, l’arrivée du PER impactera-t-elle fortement le marché français de l’épargne retraite supplémentaire ? En général ? Pour l’individuel ? Pour les TNS ? Pour le Collectif ?
En ce qui concerne les PER entreprise collectif, peu différents des ex- art 83, ils ne devraient que très peu impacter le marché relatif. En revanche, le marché de l’épargne retraite peut se développer pour l’individuel ou les TNS avec la sortie en capital.
Avez-vous d’autres commentaires ?
Le dernier, et non des moindres, avantage du PER réside dans la meilleure transférabilité qui en découle. Celle-ci devrait permettre au client de plus facilement changer d’assureur au besoin et en cela d’être plus attentif aux types de contrats, nouveaux ou non, qui s’offrent à lui. Tout le monde y gagne, assureurs et consommateurs.
Laurent Boulangeat – Agent général – Président adjoint d’agéa. ITW réalisé avant période de confinement et intégré dans le mag #1 « Dessine-moi l’assurance » effectué par Jean-Luc Gambey – Vovoxx