Souveraineté numérique, un enjeu stratégique sous-investi

Une majorité d’actifs européens se déclarent préoccupés par la dépendance aux Big Tech, sans pour autant privilégier les alternatives locales dans leurs choix d’outils numériques

Des inquiétudes croissantes face à la dépendance aux plateformes extra-européennes

En 2025, la souveraineté numérique s’impose comme un sujet central pour les entreprises européennes, en particulier dans les secteurs sensibles comme la finance, les ressources humaines ou le juridique.

Pourtant, l’étude Ipsos Digital menée pour Yousign auprès de 4 000 actifs en France, Italie, Espagne et Allemagne révèle une contradiction notable : si 78 % des décideurs reconnaissent l’importance stratégique des solutions technologiques européennes, seuls 32 % les privilégient réellement dans leurs décisions d’investissement.

En France, 43 % des actifs se déclarent inquiets de la dépendance aux plateformes telles que Google, Microsoft ou Amazon, un chiffre en deçà de celui observé en Espagne (51 %) ou en Italie (54 %), où la question de la souveraineté numérique est encore plus marquée.

L’éthique technologique devient un critère clé de sélection

Face aux pratiques des géants du numérique, les professionnels expriment des attentes plus fortes en matière d’éthique et de transparence. Ainsi, 69 % d’entre eux considèrent l’éthique des prestataires technologiques comme un critère déterminant, une tendance particulièrement prégnante en Espagne. Pour les assureurs, mutuelles et institutions financières, ce virage éthique ouvre la voie à une réflexion plus large sur les choix de partenaires technologiques, en lien avec les valeurs RSE (responsabilité sociétale des entreprises) et la maîtrise du risque lié aux données.

La localisation des données : un impératif encore négligé

Autre paradoxe révélé par l’étude : si 58 % des professionnels estiment que la localisation des serveurs en Europe est importante, seuls 23 % en font un critère prioritaire. Pire, 37 % des répondants ne savent pas où sont stockées leurs données, y compris dans des secteurs hautement sensibles. Cette méconnaissance représente un risque majeur, en particulier dans le secteur de l’assurance où la conformité au RGPD (Règlement général sur la protection des données) et à la directive NIS2 (sécurité des réseaux et systèmes d’information) est essentielle.

Des solutions européennes encore trop peu adoptées

Malgré des atouts indéniables en matière de sécurité et de conformité, les solutions technologiques européennes peinent à s’imposer. En cause, une perception persistante de coûts plus élevés (pour 28 % des répondants) et de fiabilité moindre (20 %). Pourtant, ces offres sont souvent mieux alignées avec les exigences réglementaires actuelles, notamment dans le cadre du Digital Services Act.

La défiance semble donc plus culturelle que technique, bien que 28 % des professionnels n’identifient aujourd’hui aucun frein majeur à leur adoption, preuve d’un changement de regard en cours.

Un virage stratégique à prendre pour les acteurs de l’assurance

Dans un contexte d’externalisation croissante des processus métiers, les acteurs de l’assurance et de la protection sociale sont directement concernés par cette problématique. À l’heure où la digitalisation s’accélère, faire le choix de solutions souveraines pourrait devenir un avantage concurrentiel, notamment auprès des clients soucieux de la protection de leurs données.

L’intégration de fournisseurs européens dans les chaînes de valeur numériques représente un levier concret pour renforcer l’autonomie technologique du secteur, tout en maîtrisant les risques cyber et réglementaires.

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