Le concept de désir a toujours été central dans la philosophie, la psychologie et même dans le marketing. Il trouve son origine dans le latin desiderare, qui signifie littéralement « être face à l’absence d’étoile ».
Ce mot évoque un manque, une absence que l’on souhaite combler. Dans un contexte moderne, notamment en marketing, le désir est souvent créé et « manipulé » par la société de consommation. Les objets ou services sont souvent chargés de significations symboliques qui déclenchent l’envie, non pour répondre à un besoin, mais pour satisfaire un désir de statut, d’appartenance ou de distinction sociale.
Dans cette perspective, on peut se demander comment un assureur, un secteur souvent perçu comme « austère » et nécessaire, pourrait devenir désirable, et même susciter un véritable désir chez ses clients.
Dès lors qu’on parle de désir, il ne s’agit pas uniquement de répondre à un besoin fondamental, mais d’éveiller une envie irrésistible. Spinoza disait que « le désir est l’essence même de l’homme ». Cette citation est d’autant plus pertinente dans le contexte de l’assurance. L’assurance répond certes à un besoin rationnel de sécurité, mais comment peut-elle se transformer en objet de désir ? C’est là tout l’enjeu : transformer un besoin vital en une envie irrésistible, en un choix conscient et désiré, plutôt que simplement une obligation. Essayons de voir les éventuels leviers, les quelques bases pour une « meilleure désirabilité de l’assurance ».
Transparence et confiance
Pour un assureur, être désirable passe par la transparence et la confiance. Dans un marché où les clients sont informés et méfiants, il est crucial de jouer « cartes sur table ». Les clients ne veulent plus de clauses en petits caractères ou de surprises désagréables ; ils recherchent une relation de confiance où tout est clair et compréhensible. Un assureur qui démontre sa confiance en ses produits et qui est honnête avec ses clients peut devenir bien plus qu’un simple fournisseur de services ; il devient un partenaire de confiance, et donc potentiellement désirable.
Un des défis pour les assureurs est de sortir de l’image traditionnelle, souvent associée à tort ou à raison, à la prudence excessive. Pour être désirable, il est crucial de montrer et démontrer la confiance en soi. Cela passe par une communication externe audacieuse, mais équilibrée, qui évite l’arrogance. Il ne suffit pas uniquement de faire de la communication sur ses engagements en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) ; il faut savoir moduler l’image de la marque de manière à ce qu’elle réponde aux désirs profonds des clients.
Humanité
Le désir est fondamentalement humain. Derrière chaque contrat d’assurance de particuliers, il y a une personne avec des besoins spécifiques et des désirs uniques. Pour un assureur, valoriser l’humain, tant au niveau des clients que des collaborateurs, est essentiel pour devenir désirable. En cultivant une proximité avec ses clients, en reconnaissant leur singularité et en personnalisant les services, l’assureur crée une relation authentique, loin de la froideur des chiffres. Cette humanité perçue renforce la désirabilité de la marque.
Culture d’entreprise
La culture d’entreprise joue un rôle crucial dans la construction de la désirabilité. Une marque d’assurance qui réussit à marier ses valeurs, son héritage et son innovation avec la croissance attire naturellement des clients. La culture d’entreprise doit rayonner, à la fois en interne et en externe, pour susciter l’envie et maintenir l’intérêt des clients. Comme le disait Philip Kotler, « les désirs sont les besoins humains façonnés par la culture ». C’est pourquoi la culture d’entreprise doit être vivante, partagée, prouvée et alignée avec les attentes des clients.
En s’appuyant sur le concept de René Girard et son désir mimétique, on comprend que ce n’est pas parce qu’une chose est bonne que nous la désirons, mais parce qu’elle est désirée qu’elle nous semble bonne. Pour rendre un assureur désirable, il faut donc créer ce sentiment de manque, cette envie « irrésistible » qui pousse les clients à se tourner vers la marque, vers le produit d’assurance.
Il peut y avoir d’autres pistes pour rendre un assureur, une assurance désirable
- Restreindre délibérément la taille du business afin de maintenir un sentiment d’exclusivité et donc de désirabilité
- Garder une distribution contrôlée, permettrait d’éviter une éventuelle banalisation de la marque
- Apporter une expérience authentique aux clients en créant des interactions qui renforcent le sentiment d’unicité et de valeur
- Savoir détendre et renforcer l’intensité de la relation en imaginant des moments forts avec ses clients, ses réseaux
- Manager chaque « occasion », chaque contact avec le client comme une opportunité de renforcer la désirabilité.
Être un assureur ou une assurance désirable n’est pas une simple question de services ou de prix. Il s’agit d’une alchimie complexe entre transparence, humanité, culture d’entreprise, produits et services et communication. En parvenant à susciter le désir, un assureur ne se contente pas de répondre à des besoins, il devient un tiers de confiance désirable. Le défi est grand, mais la récompense pourrait l’être tout autant : une croissance durable fondée sur une fidélité indéfectible.
Contribution de Jean-Luc Gambey – Associé – Directeur des publications Vovoxx Média, dans le 8ème Livre Blanc de La Fabrique d’Assurance intitulé « Pour renforcer le ciment social, améliorer l’accessibilité aux assurances (à télécharger ici)