Vovoxx Média a décidé de faire une saga des campagnes remarquées en 2024. Certaines campagnes ont retenu notre attention pour leur originalité, leur humour, leur efficacité ou encore leur impact émotionnel. D’autres se sont distinguées par leur ton décalé, parfois provocateur, ou par l’usage innovant de canaux de communication.
Nous revenons aujourd’hui sur le dispositif de communication “Hurler les civilités”. Un dispositif décalé, drôle et utile, de la Macif sur les incivilités.
Les incivilités, qu’elles se manifestent dans l’espace public, au travail ou en ligne, sont devenues une problématique sociétale. Qu’il s’agisse de comportements agressifs, d’incivilités verbales ou d’un manque de respect des règles communes, ces actes affectent la qualité de vie et les relations sociales.
Dans ce contexte, pour favoriser un partage de la route apaisée, la Macif lançait un dispositif de communication dédié au sujet “Hurler les civilités” : un concept en 3 vidéos qui joue sur le décalage entre le langage corporel et le langage verbal avec une mise en scène de 3 situations irritantes rencontrées sur la route (ex : une priorité grillée, le bonhomme rouge pas respecté, la queue de poisson, l’absence de clignotant, …) via 3 types de mobilité différentes : en voiture, à vélo et en moto.
La vidéo complète « Incivilités » est disponible sur le chaine You Tube Macif.
Pour compléter le dispositif, le 18 septembre dernier, La love Klaxon a circulé dans Montreuil : un véhicule chargé d’envoyer des messages positifs aux autres usagers de la route. Un véhicule qui se déplace en envoyant des messages d’amour aux usagers : quoi de mieux qu’un peu de douceur pour apaiser les conducteurs ! Ces derniers sont surpris soit par des commentaires soit par des gimmicks sonores drôles : « Bravo pour ton passage au feu vert, bonne journée mon chat ! », “Coeur sur toi !”… La campagne « Incivilités – Love Klaxon » a généré près de 25 millions de lancements vidéo, 6,5 millions de vues qualifiées avec plus de 45 milles interactions.
Il y a quelques jours, nous avons échangé avec Alban Gonord, Directeur de l’Engagement de la Macif, nous avons évoqué le sujet des violences verbales, bien sûr, les résultats de l’étude réalisée en Mai 2024, avec la Fondation Jean-Jaurès « Les violences verbales dans la société française et sur la route » et ses enseignements, mais aussi le rôle clé d’un acteur mutualiste pour renforcer la cohésion sociale.
Alban, Pourquoi cette étude avec la Fondation Jean-Jaurès ?
Alban Gonord : La collaboration avec la Fondation Jean-Jaurès s’inscrit dans une réflexion fondamentale pour la Macif, en tant qu’assureur mutualiste. Nous sommes profondément engagés sur des questions à la fois techniques et politiques autour de la mutualisation. La problématique des violences verbales illustre cette réflexion, car elle pose des questions sur la cohésion des sociétés. Ces violences reflètent à la fois les progrès et les défis de notre époque, dans une société démocratique où les formes de violence évoluent, souvent accélérées par la technologie et la vitesse. En partenariat avec la Fondation Jean-Jaurès, nous avons lancé un observatoire des mutualisations et démutualisations, afin de mieux comprendre ces phénomènes et proposer des solutions lorsque les sociétés se fragmentent, tant techniquement que politiquement. Cela répond à un combat d’humanité, d’assureur et de mutualiste.
Quels sont les principaux enseignements ? (accès à l’intégralité des résultats)
AG : cette enquête montre que les violences verbales sont devenues un phénomène social majeur. Quelques chiffres marquants :
- 71 % des Français identifient les réseaux sociaux comme le premier lieu d’expression des violences verbales, suivis par la rue et la télévision.
- 80 % des individus reconnaissent avoir été auteurs ou spectateurs d’insultes.
- 86 % estiment que ces violences verbales sont plus répandues et intenses qu’auparavant.
Les insultes, souvent sans filtre, apparaissent comme une forme de décharge émotionnelle. Pourtant, elles sont jugées inutiles par 75 % des sondés, car elles ne résolvent pas les problèmes qu’elles expriment. Elles s’accompagnent même d’une augmentation des violences physiques, soulignant leur caractère potentiellement destructeur.
Les réseaux sociaux sont souvent perçus comme un défouloir. Quelle est votre analyse ?
AG : Les réseaux sociaux amplifient les violences verbales par leur rapidité et leur anonymat, ce qui favorise une « décharge émotionnelle ». L’insulte y est omniprésente, souvent liée à un langage très cru et sexuel. Cela traduit une forme de pulsion primaire, mais aussi une incapacité à canaliser ces émotions. Ces violences verbales ne sont pas seulement numériques. Elles se retrouvent également dans les interactions quotidiennes, notamment dans la mobilité : transports en commun, voiture, trottinettes, etc. Elles sont souvent déclenchées par la peur ou l’énervement, des émotions exacerbées par des interactions perçues
Les insultes renforcent-elles les fractures sociétales ?
AG : Les insultes participent à une forme de démutualisation sociale. Elles humilient, renforcent les stéréotypes et peuvent être l’antichambre de violences physiques. Par exemple, un tiers des Français a été témoin de violences physiques directement liées à des insultes. Elles traduisent également une certaine animalité et mettent en lumière les tensions inhérentes à notre société :
- Liberté de mouvement : les insultes surviennent souvent lorsque nos libertés se confrontent à celles des autres (mobilité, espace public).
- Responsabilité perçue : les insultes sont toujours attribuées aux autres, rarement à soi-même. Cela reflète une externalisation des torts.
Face à cette montée des violences, notre rôle en tant qu’assureur mutualiste est d’agir pour prévenir et sensibiliser. Cela passe par :
- Des actions éducatives : interventions dans les écoles, auto-écoles et auprès des jeunes conducteurs.
- Des campagnes de sensibilisation : par exemple, notre campagne « Klaxon d’amour » qui invite à remplacer les insultes par des remerciements (« Merci pour ton passage au feu vert »).
Ces initiatives visent à promouvoir une société plus civilisée et respectueuse, en misant sur la discipline personnelle, la modération et la prévention. L’enjeu de ces réflexions va au-delà des insultes. Cela nous amène à penser les mutualisations de demain, face aux défis du réchauffement climatique, des crises sociales et des fractures territoriales. À ce titre, nous avons récemment lancé :
- Un ouvrage : « Pour de futures mutualisations « , en partenariat avec la Fondation Jean-Jaurès, qui explore les nouvelles formes de mutualisation nécessaires pour répondre aux crises contemporaines.
- Une chaire de recherche avec l’École Normale Supérieure, axée sur « Nouvelles fractures, nouvelles mutualisations« , pour explorer les liens entre climatologie, sociologie et résilience sociale.
En tant qu’assureur mutualiste, nous avons un rôle clé pour renforcer la cohésion sociale et répondre aux défis d’un monde en transformation.
Nous remercions chaleureusement Alban Gonord.
Exemple de la compagne sur les réseaux sociaux :