La visite récente des Présidents des deux chambres en Nouvelle-Calédonie ouvre un nouveau dialogue, nécessaire également avec les assureurs pour maintenir l’assurabilité de l’archipel.
Depuis mai 2024, la Nouvelle-Calédonie est traversée par des émeutes qui ont causé des pertes humaines mais aussi des dégâts matériels d’envergure, suite au vote par le Parlement du projet de loi constitutionnelle visant à procéder à un dégel partiel du corps électoral pour les scrutins provinciaux aux résidents installés depuis au moins dix ans. Ce projet a été voté dans un contexte où les relations entre l’État et les acteurs politiques locaux étaient déjà fragilisées, notamment depuis 2021 avec la tenue du troisième référendum d’auto-détermination du territoire.
La visite de Yaël Braun-Pivet, Présidente de l’Assemblée nationale, et de Gérard Larcher, Président du Sénat, a permis de relancer le dialogue avec les représentants des trois corps électoraux de la Nouvelle-Calédonie. Cela intervient dans un territoire où le fragile équilibre économique a été compromis, et où les coûts liés aux émeutes sont estimés à 2,22 milliards d’euros selon les premières estimations du gouvernement néo-calédonien, en juillet. Tandis que la mobilisation de l’État tente de répondre à une crise de confiance, les défis assurantiels posent la question d’une couverture durable pour des territoires marqués par l’instabilité.
Retrait des garanties : vers une assurance à géométrie variable ?
Les émeutes urbaines de Nouvelle-Calédonie ont laissé des marques visibles dans les rues de Nouméa et d’autres centres urbains, avec des centaines de véhicules et bâtiments incendiés, ainsi que des commerces pillés. L’indemnisation des véhicules personnels endommagés par les émeutes est possible, mais uniquement si les propriétaires ont souscrit des garanties spécifiques, comme la couverture incendie ou dommages tous accidents dans leur contrat d’assurance auto. En revanche, si le véhicule a été incendié sans que la garantie incendie n’ait été souscrite, la victime peut solliciter lacommission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI).
Pour les commerces, la situation est plus complexe : la garantie « émeutes et mouvements populaires » couvre généralement les dommages matériels dans la majorité des contrats, mais la perte d’exploitation des entreprises reste une option facultative. Cependant, la situation inédite des récentes émeutes a conduit plusieurs assureurs à reconsidérer leurs engagements.
Le poids financier des sinistres : vers une impasse pour l’assurabilité ?
Si les principaux acteurs présents sur le territoire sont Allianz et l’assureur australien QBE, seul ce dernier a communiqué ses premières estimations en juin, élevées à 300 millions d’euros (bien que son résultat opérationnel se soit amélioré de 26 à 108 millions de dollars, au-delà de son chiffre d’affaires, en légère baisse), selon la dernière présentation trimestrielle. Mais l’impact est tel pour Allianz que l’entreprise envisage de se retourner contre l’État, avec d’autres assureurs, pour partager cette charge, au titre de négligence. Les deux assureurs ont annoncé une révision de leurs contrats en Nouvelle-Calédonie, ce qui est également le cas pour d’autres acteurs.
Lorsque le déplacement des dirigeants français en Nouvelle-Calédonie témoigne d’une volonté de renforcer le dialogue politique, la situation reste néanmoins instable. En effet, les élections provinciales doivent encore se tenir début 2025, et un ultime référendum devra ensuite se dérouler. C’est dans ce contexte que Bercy mène des discussions avec les assureurs pour organiser l’assurabilité de la Nouvelle-Calédonie, avec la perspective d’un éventuel fonds de garantie.