Avec l’essor de la digitalisation, la souscription de contrats d’assurance en ligne devient une pratique courante. Mais cette transition soulève des questions quant au respect du devoir de conseil qui incombe aux courtiers et assureurs.
Contexte : le devoir de conseil et la souscription en ligne
Le devoir de conseil est une obligation centrale pour tout distributeur d’assurance, conformément à l’article L.521-4 du Code des assurances. Ce devoir implique que le distributeur propose un contrat adapté aux besoins exprimés par l’assuré. Cependant, avec la souscription en ligne, le processus de conseil peut être fragilisé si les outils numériques ne permettent pas une collecte complète et précise des informations nécessaires.
Un cas récent, rapporté par la médiation de l’assurance, met en lumière les risques d’un manquement à ce devoir dans le cadre d’une souscription en ligne. Un assuré, ayant réservé un voyage à La Réunion, a souscrit une assurance annulation via un courtier délégataire. Suite à une maladie, il a dû annuler son voyage et a sollicité l’indemnisation prévue par son contrat. L’assureur a refusé, invoquant que le contrat avait été souscrit bien après la réservation, dépassant ainsi le délai imposé par les conditions du contrat.
Analyse : une souscription sans collecte adéquate des besoins
Dans ce cas, le site internet utilisé pour la souscription du contrat ne permettait pas à l’assuré de renseigner la date de réservation du voyage. Or, cet élément est crucial pour déterminer l’éligibilité à la garantie annulation, qui doit être souscrite dans les 48 heures suivant la réservation. En l’absence de ce champ d’information, le courtier n’a pas pu délivrer un conseil adapté, ce qui a conduit l’assuré à souscrire un contrat inadapté à ses besoins.
Le médiateur a jugé que l’assureur, en tant que responsable du courtier délégataire, n’avait pas respecté son devoir de conseil. Ce manquement a privé l’assuré de la possibilité de souscrire un autre contrat comportant une garantie annulation applicable à sa situation. L’assureur a donc été condamné à couvrir 80 % des frais d’annulation.
L’importance des outils numériques dans le respect du devoir de conseil
Ce cas met en exergue un enjeu crucial pour le secteur de l’assurance : les outils de souscription en ligne doivent être conçus pour permettre aux assurés d’exprimer clairement leurs besoins. Sans cette collecte d’informations, il devient impossible pour les courtiers de délivrer un conseil pertinent, ce qui expose les assureurs à des réclamations et à des litiges.
Il est donc essentiel pour les assureurs et les courtiers de collaborer pour que les plateformes numériques permettent une prise en compte exhaustive des éléments essentiels au contrat. Cela inclut la mise à disposition de champs d’informations spécifiques, tels que la date de réservation d’un voyage, ou toute autre donnée cruciale liée aux conditions de souscription.
Solution : une responsabilité partagée entre assureurs et courtiers
Le médiateur de l’assurance a conclu que, dans cette affaire, la responsabilité revenait à l’assureur, qui n’a pas veillé à ce que son site de souscription en ligne collecte les informations nécessaires à la délivrance d’un conseil adéquat. Ce manquement a conduit à la souscription d’un contrat inadapté, vidé de l’une de ses garanties principales.
Les assureurs doivent donc être vigilants quant à la conception et au fonctionnement de leurs outils numériques. Ils doivent s’assurer que les courtiers délégataires disposent des moyens adéquats pour conseiller correctement les assurés, même dans un contexte de souscription en ligne. Le respect du devoir de conseil reste une obligation légale, qu’il s’agisse d’une souscription traditionnelle ou numérique.
Vers une digitalisation responsable de l’assurance
La souscription en ligne représente un défi majeur pour le secteur de l’assurance, qui doit concilier rapidité et efficacité avec la rigueur du devoir de conseil. Les cas comme celui-ci montrent qu’il est possible de digitaliser le processus de souscription tout en garantissant une protection optimale des assurés. Cela passe par une amélioration des plateformes de souscription et une formation accrue des courtiers sur les outils numériques.