Le fléau de l’absentéisme dans le secteur privé semble enfin marquer une pause. Selon le dernier baromètre de l’absentéisme réalisé par WTW, l’année 2023 a vu une baisse significative des absences des salariés, une première depuis 2016 (hors année 2020, perturbée par la crise sanitaire).
Cette étude met en lumière une amélioration globale de l’absentéisme, tant en termes de fréquence des arrêts que de leur durée. Tout en soulignant certaines disparités selon les secteurs et les catégories professionnelles.
Un recul historique de l’absentéisme
En 2023, le taux d’absentéisme dans le secteur privé s’établit à 4,8 %, contre 5,4 % en 2022, soit une diminution de plus de 10 %. Cette inflexion est principalement due à une réduction du nombre de salariés s’étant arrêtés au moins une fois dans l’année. En effet, seulement 34 % des travailleurs français ont été en arrêt de travail en 2023, contre 43 % l’année précédente.
Cette baisse de 21 % traduit un véritable changement dans la dynamique de l’absentéisme, qui semblait jusqu’alors inéluctablement croître. De plus, le nombre de salariés ayant cumulé deux arrêts de travail, ou plus, est également en diminution, passant de 28,5 % à 22 %.
La maladie reste le principal motif des absences, représentant 94 % des arrêts. Les accidents du travail, les accidents de trajet et les maladies professionnelles, bien que constituant seulement 6 % des arrêts, contribuent néanmoins pour 16 % de l’absentéisme total, en raison de la durée moyenne beaucoup plus longue de ces interruptions. Les secteurs du transport, de la construction, ainsi que de la santé et de la restauration, restent particulièrement exposés à ces risques.
Une répartition inégale selon les populations
Si la baisse de l’absentéisme concerne l’ensemble des catégories de salariés, certaines populations en bénéficient davantage que d’autres. Ainsi, le taux d’absentéisme des hommes enregistre une chute notable, passant de 4,8 % en 2022 à 4,2 % en 2023. En revanche, celui des femmes, bien qu’en diminution, reste plus élevé, avec un taux de 5,8 %, contre 6,3 % l’année précédente. Cette disparité peut s’expliquer par la surreprésentation des femmes dans des secteurs où l’absentéisme est plus important, comme la santé ou l’hôtellerie-restauration.
Chez les jeunes salariés, notamment ceux âgés de 20 à 30 ans, la diminution de l’absentéisme est la plus marquée, passant de 3,6 % à 3 %. Cependant, ce groupe reste particulièrement sujet aux arrêts de courte durée, avec une fréquence d’absences plus élevée que celle de leurs collègues plus âgés. Les ouvriers, quant à eux, continuent de cumuler à la fois une forte prévalence des arrêts (42,1 % en 2023) et une durée moyenne par arrêt particulièrement élevée, à 28,2 jours. Cette situation reflète la pénibilité de leur travail, souvent associée à des arrêts plus longs et plus fréquents.
Des secteurs et des régions inégalement touchés
Certaines industries continuent de se distinguer par des taux d’absentéisme supérieurs à la moyenne. Ainsi, le trio de tête composé des secteurs de la santé humaine et de l’action sociale (7,56 %), de l’hébergement et de la restauration (7,39 %), et du transport et de l’entreposage (6,18 %), demeure inchangé. Ces domaines, souvent exigeants en termes de conditions de travail, demeurent particulièrement vulnérables aux absences prolongées.
D’un point de vue géographique, le Grand-Est reste la région la plus touchée par l’absentéisme, avec un taux de 6,36 %, bien qu’en légère baisse par rapport à 2022. Les Hauts-de-France et la Bourgogne-Franche-Comté complètent le podium des régions où les salariés sont les plus souvent absents. Ce constat régional, qui se confirme d’année en année, semble être lié aux spécificités économiques et sociales de ces territoires.
Une légère baisse du coût de l’absentéisme
Après plusieurs années de hausse continue, le coût direct de l’absentéisme par salarié a légèrement diminué en 2023. Estimé à 1 535 euros par salarié, il a baissé de 6 % par rapport à 2022. Cette réduction, bien que modeste, est un signal encourageant pour les entreprises, dont les charges liées aux absences étaient devenues particulièrement lourdes ces dernières années.
Toutefois, de nouveaux défis se profilent à l’horizon, avec la prise en compte des congés payés accumulés pendant les arrêts de travail, qui pourrait à terme alourdir à nouveau la facture pour les employeurs.
Vers une gestion proactive de l’absentéisme en entreprise
« Pour la première fois depuis 2016, le taux d’absentéisme diminue par rapport à l’année précédente. Il faut néanmoins rester vigilant, car l’année 2022 avait été marquée par la vague Omicron et nous notons une très légère hausse de l’absentéisme début 2024 » constate Noémie Marciano, Directrice de l’activité Health & Benefits de WTW en France.
« Outre le fait que les employeurs intègrent désormais le bien-être dans leur stratégie RH, ils commencent à mesurer le risque d’absentéisme, à identifier les populations les plus susceptibles d’être touchées, et à en comprendre les causes potentielles. Communiquer, former les managers, déployer des actions de prévention, proposer du soutien psychologique et du conseil en gestion budgétaire sont également des initiatives à favoriser pour poursuivre l’inflexion de l’absentéisme ».
Une dynamique positive, mais des efforts à poursuivre
Après des années de hausse continue, l’absentéisme dans le secteur privé connaît enfin une baisse notable en 2023. Cette amélioration, bien que prometteuse, ne doit pas masquer les défis persistants, notamment dans certains secteurs d’activité et régions particulièrement touchés.
La prise de conscience par les employeurs de l’importance du bien-être au travail et l’intégration de politiques de prévention marquent un tournant dans la gestion de l’absentéisme. Toutefois, pour maintenir cette dynamique, il sera crucial de renforcer ces initiatives et de rester vigilant face aux évolutions futures.