Accidentologie industrielle : enjeux pour l’assurance

L’inventaire 2023 du Bureau d’analyse des risques et pollutions industriels (Barpi) révèle une stabilité apparente dans le nombre d’accidents industriels, mais souligne une augmentation des incidents.

Des secteurs spécifiques, comme celui des déchets et des batteries au lithium, nécessitent une vigilance accrue. Le rapport met également en lumière une dégradation de la qualité du retour d’expérience post-accident, un point crucial pour les assureurs dans la gestion des risques.

Une stabilité relative dans les accidents industriels

Le Barpi a publié son inventaire annuel des incidents et accidents industriels pour 2023, basé sur les données collectées dans la base Aria. Avec près de 1 900 nouveaux événements répertoriés, la base Aria continue de jouer un rôle central dans le suivi des risques industriels.

En 2023, 85 % des événements ont été observés dans des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), confirmant la prédominance de ce secteur dans l’accidentologie industrielle.

Le nombre d’accidents enregistrés dans les ICPE reste relativement stable, avec une légère augmentation de 3 % par rapport à 2022, totalisant 404 accidents. Parmi ceux-ci, deux ont été classés comme majeurs, 82 comme accidents Seveso, et 320 comme accidents en ICPE hors Seveso.

Secteurs à risque : déchets, agroalimentaire et chimie en première ligne

Les secteurs les plus touchés par les accidents industriels restent inchangés en 2023. Les déchets et eaux usées représentent 15 % des accidents, suivis de l’agroalimentaire (14 %) et de la chimie-pharmacie (11 %). Ces secteurs sont particulièrement exposés en raison de la nature des substances manipulées et des processus industriels impliqués.

Les rejets de matières dangereuses continuent de dominer le paysage des risques industriels, représentant 73 % des accidents, suivis par les incendies (45 %). Les conséquences économiques restent les plus fréquentes, touchant 75 % des accidents, tandis que les impacts environnementaux, sociaux et humains sont également significatifs.

Augmentation des incidents : un indicateur à surveiller

Contrairement à la stabilité des accidents, le nombre d’incidents industriels a connu une hausse continue au cours de la dernière décennie. En 2023, 840 incidents ont été recensés, marquant une augmentation de 5 % par rapport à l’année précédente. Cette tendance peut être attribuée à une amélioration de la collecte des données et à une meilleure remontée des informations.

Le secteur de la chimie fine a connu une augmentation notable des incidents en 2023, avec 16 événements répertoriés. Cette hausse souligne l’importance d’une surveillance renforcée et d’une gestion proactive des risques dans ce secteur.

Retour d’expérience : une qualité en déclin

L’une des préoccupations majeures soulevées par l’inventaire 2023 concerne la dégradation de la qualité des rapports post-accidents. Le taux de connaissance des perturbations avérées a diminué, passant de 76 % en 2022 à 70 % en 2023, tandis que le taux de connaissance des causes profondes est passé de 39 % à 30 %. Cette tendance est particulièrement préoccupante dans le secteur de la chimie, où la recherche des causes profondes n’est effectuée que dans 47 % des cas.

Risques émergents : batteries au lithium et phénomènes NaTech sous surveillance

Les incidents liés aux batteries au lithium ont presque doublé entre 2022 et 2023, les incendies représentant la principale menace. Cette tendance est inquiétante pour les systèmes de stockage d’énergie stationnaire et les entrepôts de batteries, ainsi que pour le secteur des déchets, où des erreurs d’orientation des piles au lithium peuvent provoquer des accidents graves.

Les phénomènes NaTech, qui désignent les interactions entre les catastrophes naturelles et les risques technologiques, ont également retenu l’attention en 2023. Les tempêtes qui ont traversé le territoire métropolitain ont causé des inondations et des pannes de courant, perturbant les opérations industrielles et mettant en lumière la vulnérabilité des infrastructures face aux événements climatiques.

Vers une amélioration des processus de déclaration avec la télédéclaration prévue pour 2026

Dans une initiative visant à améliorer la gestion des risques, la télédéclaration des incidents et accidents est en cours de développement, avec une mise en œuvre prévue pour le 1er janvier 2026. Cette procédure devrait simplifier la déclaration des événements et la transmission des rapports, offrant ainsi aux assureurs une meilleure visibilité sur les risques industriels.

L’inventaire 2023 du Barpi révèle une stabilité apparente des accidents industriels, mais souligne des tendances préoccupantes, notamment l’augmentation des incidents et la baisse de la qualité du retour d’expérience.

Pour les assureurs, ces évolutions nécessitent une vigilance accrue et une adaptation continue des stratégies de gestion des risques. La télédéclaration prévue pour 2026 pourrait représenter une avancée significative dans l’amélioration de la qualité des données disponibles.

Source: Face au Risque, 2024

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