Au cœur de la transformation du secteur de l’assurance, l’Humain. Ces femmes et ces hommes qui permettent au secteur de l’assurance d’être aux côtés des assurés et de faire face, ensemble, aux nouveaux défis de notre société.
Vovoxx Média a la farouche volonté de parler, au plus grand nombre, de l’attractivité du secteur de l’assurance, de ses métiers, du capital humain et de ses nombreux talents. Nous avons donc créé, cette série de Podcast « H », qui donne la parole à des professionnels.
Pour ce troisième épisode, nous avons échangé avec Alexis Michau, qui accompagne des assureurs dans le recrutement de cadres dirigeants et de talents.
Selon vous, pourquoi le talent en entreprise est un enjeu stratégique dans le secteur de l’Assurance ?
Alexis Michau : La bonne question serait : « est-ce que, finalement, une entreprise sans talent peut continuer à grandir ? ». On voit que le monde de l’entreprise, aujourd’hui, se transforme, va-vite, pour accompagner de nouveaux enjeux, qu’ils soient business, sociétaux, normatifs…
On parle beaucoup également du nouveau rapport qu’ont les collaborateurs au monde du travail, qui change profondément, et les assureurs doivent continuer à se transformer pour répondre à ces sujets. Et puis, d’un autre côté, le secteur assurantiel connaît des changements profonds. On voit qu’il y’a quand même une certaine explosion des risques climatiques, des risques géopolitiques, des risques cyber également, puis il y a l’inflation, les nouvelles attentes des clients et des sociétaires, la digitalisation, bien évidemment. Et puis, demain, l’arrivée de l’IA générative. Ce sont vraiment des enjeux qui sont importants d’adresser et finalement, les défis ne manquent pas. L’assurance se transforme vite et elle a besoin de continuer à oser, à faire bouger les lignes et à faire évoluer aussi les mentalités.
Et puis, à travers cette question des talents, il y a aussi la question de la relève, qui est primordiale. Qui seront les cadres dirigeants, demain, des assureurs ? Et alors, il y a également le sujet de féminisation des instances dirigeantes, qui est aujourd’hui porté par les plus hautes instances, et c’est un sujet central. C’est là que la notion de talent prend tout son sens, en tant que chasseur de tête au quotidien. La quête de talent, que ce soit en interne ou en externe, c’est un axe stratégique des assureurs qui est porté par la direction des ressources humaines. Mais c’est vraiment l’ensemble de l’Entreprise et de ses acteurs qui doivent se mobiliser pour attirer, pour développer et pour fidéliser ses talents.
Et le sujet du talent en entreprise, c’est un enjeu primordial pour la performance et la pérennité des activités.
Avec vos mots, comment définiriez-vous le talent ?
Alexis Michau : Pour moi, le talent, c’est la capacité d’une personne à faire la différence, à avoir cette envie et ce petit supplément d’âme qui va permettre d’être audacieux et d’avoir un impact collectif. J’insiste vraiment sur ce terme : collectif. Et le talent, ce n’est pas un don, c’est du travail et du développement. Le talent, c’est un cheminement, c’est une construction. Je dirais que la chance d’avoir du talent ne suffit pas. Il faut avoir le talent de développer sa chance.
Et finalement, ce sont des femmes, des hommes capables d’être des leaders, des pionniers, qui vont insuffler, qui vont embarquer et avoir un impact concret. Et les talents s’accompagnent. Le talent se cultive, par des programmes, par du suivi personnalisé et par des parcours talents. Mais pour que le talent s’exprime, il faut que les conditions soient réunies. Il faut une rencontre entre, d’un côté, les enjeux et les besoins des assureurs d’une entreprise et, de l’autre, il faut que le collaborateur ou le candidat ait la volonté d’être un talent et de s’impliquer dans les enjeux de l’entreprise. On connaît tous dans notre environnement, des personnes qui ont des très bons potentiels, mais qui, finalement, n’iront jamais vers cette voie-là pour diverses raisons.
Le travail de l’entreprise c’est d’identifier et d’amener ces potentiels à se développer, à devenir des talents. Et, quand on parle de talent, pour moi, on ne parle pas que de compétences, on parle bien de qualité humaine : le relationnel, le leadership, l’intelligence émotionnelle, la résilience, l’assertivité… Pour ma part, j’accorde aussi beaucoup d’importance dans les recrutements externes à la capacité à apporter l’audace et la force du renouveau dans l’organisation qui va être intégrée.
Et tout ça passe par divers programmes. Nous connaissons les Graduate programme pour les jeunes, le développement du leadership au féminin chez Covéa avec le programme « Cov’Elles », plus récemment chez Matmut, avec le programme « Pluriel ». Mais, je trouve que l’on ne parle pas assez des talents seniors.
Le talent n’a pas d’âge. Il faudrait innover pour créer des dispositifs de graduate programme pour les seniors. Je sais, qu’Axa a mis en place ce qu’ils appellent le « reverse mentoring », qui permet finalement à quelqu’un de senior d’être mentoré par un junior. Ça existe également dans d’autres secteurs d’activité comme chez Air France ou Danone, et c’est très intéressant. C’est un outil très puissant dans le lien intergénérationnel. Aujourd’hui, c’est un sujet en entreprise et c’est là que les directions des ressources humaines prennent aussi toute leur dimension stratégique pour aligner les besoins de l’entreprise et les énergies, pour attirer, pour développer, pour fidéliser les talents.
Est-ce que vous pensez qu’il y’a une pénurie de talents dans le secteur de l’Assurance ?
Alexis Michau : Je le confirme, c’est indéniable. Il y’a une pénurie de talents dans l’assurance et on est face à une guerre des talents. L’assurance fait face à une pénurie de talents et plus globalement même de candidats. Mais ce phénomène touche tous les secteurs d’activité et même des secteurs plutôt protégés, plutôt attractifs, comme le luxe. LVMH a des problèmes d’attractivité et de rétention des talents.
L’assurance recrute à-peu-près 17 000 personnes chaque année et dans une étude qui est parue récemment, plus de 75 % des dirigeants reconnaissent avoir des difficultés de recrutement. Pour expliquer cette pénurie de talent, on a, d’un côté, le quasi plein-emploi en France et en Europe, et dans l’assurance je pense qu’on peut même parler de plein-emploi. On a, de l’autre côté, un phénomène de grands départs à la retraite des boomers, avec des vagues successives assez importantes de savoir, de compétences et de talents qui partent en retraite. Et puis, il y a également une perte d’engagement d’un certain nombre de nouvelles générations. Il faut aussi repenser l’approche, car le capital humain, est la première richesse des entreprises. Il faut vraiment l’intégrer à la stratégie comme pilier prioritaire et investir massivement sur les hommes avec un grand H.
Pour ce qui est des métiers les plus en tension, je dirais que les fonctions clés restent très pénuriques, notamment la fonction actuarielle. Mais je dirais que ça a presque toujours été le cas. Qui n’a jamais entendu un recruteur ou un manager dire que recruter des actuaires, c’est la galère ? Il y a également les « nouveaux métiers » comme le digital ou la data. Il y a toujours besoin de renforcer ces compétences chez les assureurs. Et puis, très prochainement, l’arrivée de l’IA générative. On sait que ça intéresse fortement de nombreux secteurs, dont l’assurance qui, aujourd’hui, réfléchit à comment intégrer cette nouvelle technologie. On a également les métiers du relationnel : comment repenser l’expérience client, l’expérience sociétaire, qui est, aujourd’hui, un enjeu business du secteur. Globalement, la pénurie est présente à tous les niveaux et à tous les échelons en entreprise.
Vous parliez d’attractivité et c’est vrai que le secteur de l’assurance n’est pas le secteur le plus attractif. Est-ce que vous pensez que ça peut être une cause de cette pénurie de talent ?
Alexis Michau : Oui et non. Déjà, il y a effectivement un phénomène global de déséquilibre entre l’offre et la demande, et cela touche tout le monde. En revanche, c’est vrai que l’assurance n’est pas le secteur qui, naturellement, a la plus forte attractivité. On ne connaît pas d’enfants qui nous disent un jour : « je rêve d’être assureur ». Quand on interroge les personnes, les talents et les collaborateurs déjà présents dans le secteur, la très grande majorité vont répondre qu’ils sont arrivés dans le secteur un peu par hasard.
C’est vrai qu’il n’y a pas forcément une vocation très naturelle à aller dans l’assurance et pourtant, une fois que les personnes y sont, elles y restent. Je pense, finalement, qu’il y a un manque naturel de connaissance du secteur assurantiel et de tout ce qui le compose. Ce n’est pas un secteur qui manque d’attractivité, c’est plutôt un secteur méconnu. Il y a un défi d’image c’est certain. Le secteur assurantiel est d’ailleurs souvent perçu comme étant assez vieillissant.
De plus, il y a un marché des candidats, des demandes, des attentes, des talents qui ont évolué : un poste ou une carrière ne suffit plus. Les employeurs sont attendus sur leurs promesses, sur leurs engagements sur les sujets de qualité de vie au travail, le bien-être au travail, la quête de sens. C’est un vrai sujet, notamment chez les plus jeunes générations. Et finalement, quand on regarde dans le détail, il y a une cohérence forte entre ce que propose les assureurs et les aspirations des talents et des collaborateurs. C’est un secteur dynamique, avec des transformations et des enjeux stimulants. C’est un secteur qui offre aussi beaucoup de perspectives d’évolution pour les talents et qui propose des conditions de travail et des politiques salariales qui sont bonnes. Puis il est plutôt précurseur dans ces avancées sociales, comme sur l’égalité professionnelle, le handicap ou encore l’assertion.
Ce sont des éléments à faire-valoir. C’est un secteur qui a du sens. L’assurance, c’est finalement protéger, aider les autres et aider ceux qui aident. Il y a aussi cette notion d’aidant et de proche aidant, qui est très importante dans l’assurance.
Il faut, moderniser l’image du secteur et le faire savoir auprès du marché et des talents. Et cela passe par la communication. C’est aussi le rôle stratégique d’un DRH, de trouver des solutions adaptées à ces enjeux d’attractivité, de développement et de fidélisation des talents. La promesse employeur, les parcours talents, la communication sur les engagements RSE sont autant d’éléments qui permettent de se différencier et d’attirer ces talents.
Dernièrement, la MAIF à envoyer un message assez fort envers ses collaborateurs et envers le marché des candidats, avec la signature d’un nouvel accord d’entreprise intéressant en matière de diversité, d’équité, d’inclusion. Ce sont des dispositifs qui font écho chez les talents. On peut également citer les engagements en faveur de la transition écologique, qui est un engagement fort des assureurs. Globalement, c’est toute la filière qui doit s’organiser pour promouvoir les 1000 et une chance de rejoindre le secteur.
On parle de plus en plus de talents verts et de compétences vertes, est-ce que vous pensez que leur intégration est l’avenir du secteur de l’Assurance ?
Alexis Michau : C’est une question complexe. Je fais plutôt le rapprochement avec la durabilité des entreprises, c’est-à-dire : comment, en tant qu’assureur, je dois adapter ma gouvernance et mon fonctionnement pour être capable d’unir la performance d’entreprise, la performance économique, avec notre responsabilité sociétale. Finalement, on voit aussi que le cadre réglementaire évolue avec, par exemple, dernièrement, la mise en œuvre de la directive, au niveau européen, sur le reporting extra financier. Mais surtout, c’est quelque chose qui est souhaité par les talents. Et, c’est une chance pour les assureurs de se démarquer par rapport à d’autres secteurs qui sont moins engagés, moins précurseurs en matière de RSE.
Pour conclure, est-ce que vous avez des recommandations à suggérer aux professionnels du secteur pour améliorer leur recherche de nouveaux talents ?
Alexis Michau : De manière générale, je pense qu’il y a une question d’état d’esprit aujourd’hui : ces sujets du talent en entreprise, de la diversité, de l’inclusion, de la guerre des talents… Il faut les aborder de manière optimiste et positive. C’est finalement très stimulant comme challenge de travailler sur ces sujets d’attractivité et de capital humain. Je dirais aussi qu’il faut oser et affirmer nos valeurs, avec authenticité. C’est important d’avoir des programmes ambitieux qui traduisent les engagements de chaque assureur pour le faire vivre et le faire connaître. C’est d’ailleurs tout l’enjeu de la marque employeur et de la communication RH. Ensuite, c’est très important d’acculturer les recruteurs métiers aux nouvelles pratiques et nouvelles attentes. En premier lieu, un candidat va regarder avec qui il va travailler. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut transiger sur l’exigence ou la sélection. Mais il y a ce jeu d’échange qui est un peu différent. Puis, finalement, le fait d’acculturer ces managers, ça permet de faire émerger des initiatives qui germent un peu partout. J’ai vu des managers vraiment s’amuser dans le recrutement, se prendre au jeu à être attractif pour les candidats, pour faire la différence. Puis, ce sont des solutions simples.
J’entends parfois : « mais pourquoi un talent de chez Apple ou de chez L’Oréal viendrait dans l’assurance ? ». Et pourtant, je peux vous citer des centaines d’exemples de personnes qui viennent justement de ces entreprises, qui sont passées par des directions régionales ou des métiers du relationnel et qui ont apporté beaucoup de valeurs ajoutées, et ont trouvé les moyens de s’épanouir dans un nouveau secteur. Il ne faut pas avoir cette crainte.
Puis, ensuite, il a aussi besoin de data pour piloter ces politiques de recrutement, ces politiques de rémunération et, plus globalement, pour adresser les enjeux. Par exemple, chez Covéa, il y a un engagement très fort sur la féminisation de ces instances dirigeantes. Ils nous demandent, en tant que cabinet, d’être capable, sur les différentes branches, les différents métiers, de faire remonter de la data sur l’égalité hommes-femmes, pour pouvoir piloter et ajuster leur politique. Cette notion de partenariat est très importante. Et finalement, l’assurance elle a plein d’atout et surtout, l’assurance a du talent.
La saga de podcast H est réalisée, par Vovoxx Média, dans le cadre du dispositif des Talents de l’Assurance