L’intégration des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans les pratiques d’investissement gagne du terrain, promouvant non seulement la durabilité mais également des rendements financiers potentiels.
L’étude réalisée par Eiffel sur les investissements privés met en lumière comment des mesures ESG bien définies peuvent être des catalyseurs de valeur financière, en particulier dans le secteur des PME et ETI européennes.
Méthodologie et résultats de l’étude Eiffel
Les entreprises analysées dans cette étude couvrent un large éventail de secteurs, de l’industrie à la santé en passant par l’agroalimentaire, et affichent un chiffre d’affaires médian de 200 millions d’euros avec un effectif médian de 900 employés. Cette diversité permet une analyse approfondie de l’impact des pratiques ESG à travers différents contextes industriels et géographiques.
Eiffel a mis en œuvre des KPIs ESG spécifiques pour chaque financement, en accord avec les directions des entreprises financées. Ces indicateurs de performance, variés et personnalisés, vont de la réduction de l’empreinte carbone à l’augmentation de la diversité dans les postes de management. Le suivi rigoureux et l’ajustement des taux d’intérêt des prêts en fonction de l’atteinte des objectifs ESG montrent une influence directe et mesurable sur la performance financière.
Objectifs de l’étude
L’étude menée par Eiffel s’est concentrée sur l’évaluation de l’impact des indicateurs de performance environnementale, sociale et de gouvernance sur les indicateurs financiers des entreprises. Un sondage ciblant les directeurs financiers et RSE a été employé pour mesurer cet impact à travers un spectre diversifié de KPIs financiers, touchant tout, depuis l’accès aux marchés jusqu’à la résilience organisationnelle.
Les dimensions de performance financière évaluées étaient variées, incluant l’accès à de nouvelles opportunités de marché, l’amélioration de la productivité des employés, la réduction des coûts opérationnels, et bien d’autres.
L’approche adoptée visait à déterminer si l’intégration des pratiques ESG pouvait conduire à des améliorations tangibles dans ces domaines.
Impact général des KPIs ESG
L’analyse de 1 319 points de données a révélé un impact nettement positif des KPIs ESG sur les performances financières. Une majorité écrasante (83%) des initiatives ESG évaluées a mené à des améliorations positives, confirmant la thèse que des pratiques commerciales éthiques et durables peuvent enrichir la rentabilité et la robustesse des entreprises.
Les résultats démontrent que, indépendamment de la catégorie ESG (environnementale, sociale ou de gouvernance), les améliorations apportées ont bénéficié de manière assez uniforme à tous les KPIs financiers étudiés.
Par exemple, 28% des indicateurs financiers ont bénéficié d’impacts positifs suivant la mise en œuvre de mesures environnementales.
L’essor et la rentabilité des investissements ESG
En 2023, le domaine de l’investissement responsable a atteint des sommets, avec près de 3 000 milliards de dollars investis globalement dans des fonds labellisés comme durables. L’Europe se taille la part du lion avec plus de 80% de ces capitaux, d’après les données de Morningstar. Cette montée en puissance souligne une prise de conscience des enjeux ESG par les investisseurs et les entreprises.
Confrontés à une demande croissante pour des investissements respectueux de l’environnement et de la société, les acteurs financiers et entreprises se questionnent sur la corrélation entre les pratiques ESG et la performance financière. L’enquête d’Eiffel explore cette dynamique, en particulier au sein des PME et ETI majoritairement françaises, où l’impact des pratiques ESG sur la rentabilité commence à être empiriquement mesuré.
Focus sur les objectifs environnementaux et leur impact financier
L’analyse s’est concentrée sur quatre grandes familles d’objectifs environnementaux qui entraînent une répercussion directe sur la stratégie des entreprises :
- Économie circulaire : Encourager le réemploi et la réduction des déchets.
- Gestion de l’eau et des déchets : Optimiser les ressources et réduire l’impact écologique.
- Gestion de l’énergie : Améliorer l’efficacité énergétique.
- Réduction de l’empreinte carbone : Diminuer les émissions de gaz à effet de serre.
Impacts sur les performances financière
Les objectifs environnementaux ont montré un impact majoritairement positif sur la performance financière des entreprises sondées. Notamment, la facilité de recrutement et de rétention des talents a été améliorée pour 55% des initiatives environnementales mises en place.
Une des entreprises sondées témoigne : « La mise en place du suivi du « Taux de Valorisation » a permis à notre Groupe d’avoir un impact direct positif sur le P&L : la valorisation matière margeant mieux que la valorisation énergétique. »
L’économie circulaire influencée
L’économie circulaire se distingue comme ayant le plus d’impact, influençant positivement la valorisation de l’entreprise, l’accès à de nouveaux marchés, la fidélisation des clients, et améliorant également le recrutement et la rétention des talents.
« L’indicateur ESG sur la certification QSE de 100% des sites a permis d’inciter le Groupe à être certifié QSE même si cela n’était pas une exigence client du moment. Il s’avère que cette nouvelle certification a certainement contribué à la conquête de nouveaux marchés en Allemagne » précise cette autre entreprise sondée.
Gestion de l’énergie et réduction de l’empreinte carbone
Ces domaines contribuent à la résilience des entreprises face aux chocs exogènes. Toutefois, ils nécessitent souvent des investissements initiaux élevés qui peuvent augmenter les coûts de CAPEX.
« Les KPI et progrès associés sur notre consommation d’eau nous ont permis de ne pas être concerné par les arrêtés sécheresse alors que sans ces progrès nous aurions été identifiés comme entreprise consommatrice », précise cette entreprise basée dans l’Oise.
Innovation produit et processus
La mise en œuvre des objectifs environnementaux a également entraîné une transformation des lignes de produits et des processus de fabrication. Cette adaptation s’est traduite par une meilleure efficacité opérationnelle et a offert de nouvelles opportunités de marché grâce à des produits plus durables comme en témoigne cette entreprise sondée :
« Le projet de mutation de notre processus de montage des produits dans les boîtes, des pièces thermoformées en plastique au processus de pâte humide et maintenant de pâte sèche, change définitivement la donne au niveau commercial. »
Focus sur les objectifs sociaux et leur impact économique
L’étude a identifié six grandes familles d’objectifs sociaux qui jouent un rôle crucial dans le développement responsable des entreprises :
- Amélioration de la parité : Favoriser l’équité entre les genres.
- Création d’emplois et bonnes conditions de travail : Améliorer les conditions et la qualité de vie au travail.
- Emploi plus inclusif : Ouvrir le marché du travail à des profils diversifiés.
- Formation : Renforcer les compétences des employés.
- Performance sociétale de l’entreprise : Intégrer les préoccupations sociales dans la stratégie d’entreprise.
- Réduction des accidents du travail : Améliorer la sécurité au travail.
Les impacts financiers observés et leurs répercussions
L’intégration des objectifs sociaux dans les stratégies d’entreprise montre une influence majoritairement positive sur les performances financières, avec au moins 20% des indicateurs financiers impactés positivement par ces initiatives.
- Formation et performance sociétale : Ces deux domaines affichent les impacts financiers les plus significatifs, contribuant de manière substantielle à la valorisation de l’entreprise et à l’accroissement de la productivité.
« Ces KPI entrent dans les calculs de classements des Grandes écoles et nous ont permis de gagner quelques places cette année. » précise l’une des entités sondées.
- Facilité de recrutement et rétention des talents : Les politiques sociales améliorent sensiblement ces aspects, favorisant ainsi une augmentation du chiffre d’affaires et une meilleure fidélisation des clients.
« Notre population globale en CDI a un turnover moyen de 52% là où nos collaborateurs en situation de handicap ont un turnover de 35% en moyenne. »
Coûts et bénéfices
Bien que certaines mesures comme l’augmentation de la formation des employés et la réduction des accidents du travail puissent initialiser une hausse des coûts OPEX, l’étude souligne que la majorité des objectifs sociaux peut être atteinte sans engendrer de coûts supplémentaires significatifs.
L’engagement envers des pratiques sociales responsables permet aux entreprises de se démarquer sur le marché, facilitant l’accès à de nouveaux segments de marché ainsi qu’à des financements et subventions ciblés.
Comme le précise cette entreprise : « Conformément à la réglementation, certains pays du secteur du Groupe accordent un pourcentage supplémentaire dans la notation des appels d’offres de l’administration publique aux entreprises ayant un meilleur taux d’emploi des personnes handicapées. »
Focus sur les objectifs de gouvernance et leur impact sur les performances financières
La gouvernance d’entreprise est un pilier essentiel pour le développement durable des sociétés. Les objectifs de gouvernance évalués dans cette étude incluent :
- Actionnariat salarié : Promotion de l’implication des employés dans le capital de l’entreprise.
- Amélioration de la cybersécurité : Renforcement des mesures de sécurité pour protéger les données de l’entreprise et de ses clients.
- Indépendance de la gouvernance : Mise en œuvre de structures et de processus garantissant l’objectivité et l’efficacité de la direction.
- Mise en place d’une politique ESG : Intégration des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance dans la stratégie d’entreprise.
Des performances financières stimulées selon les objectifs de gouvernance
Les trois des quatre objectifs de gouvernance étudiés montrent un impact positif sur environ un tiers des indicateurs financiers. Mais l’étude met également en lumière l’impact différencié des objectifs de gouvernance sur les performances financières des entreprises :
- Actionnariat salarié : Cette initiative stimule la productivité des employés et favorise le recrutement ainsi que la rétention des talents. L’une des entreprises sondées en témoigne :
« La mise en place d’une structure d’actionnariat salarié a permis d’augmenter la fidélisation des salariés et la facilité de recrutement. Le meilleur sentiment d’appartenance à une entreprise et au projet a permis de réduire le turnover et conserver des compétences pour une performance optimisée. »
- Amélioration de la cybersécurité et politique ESG : Ces mesures améliorent l’accès à de nouveaux marchés et renforcent la fidélisation des clients grâce à une meilleure perception de l’entreprise.
- Indépendance de la gouvernance : Contrairement aux autres, cette thématique ne présente pas d’impact positif manifeste sur les performances financières selon les données recueillies.
La synergie ESG au service de la performance
Cette étude confirme l’efficacité des objectifs d’amélioration ESG, ou Covenants d’Impact®, dans l’amélioration concrète de la performance financière et de la résilience des entreprises. Les résultats obtenus mettent en lumière le potentiel des initiatives ESG pour favoriser un développement économique durable.
Pour cela, les objectifs ESG doivent être :
- Sur-mesure : Adaptés spécifiquement à l’activité, au secteur et aux défis propres à chaque entreprise.
- Co-construits : Élaborés en collaboration étroite avec la direction pour maximiser l’engagement et l’adhésion interne.
- Ambitieux et réalistes : Fixés de manière à être challengés mais atteignables, avec un suivi et des ajustements réguliers.
Durabilité des effets positifs et appel à l’action pour les investisseurs
Il est crucial de maintenir un effort soutenu sur le long terme pour assurer la matérialisation des bénéfices des initiatives ESG sur l’activité économique des entreprises. Mais, dans un contexte marqué par le risque d’« ESG-washing », il devient essentiel pour les investisseurs de demander des preuves tangibles de l’impact des mesures ESG :
- Exiger des preuves : Les gestionnaires d’investissements doivent prouver que leur stratégie produit une synergie positive entre les performances financière et extra-financière.
- Promouvoir la transparence : Soutenir des pratiques d’investissement qui non seulement respectent les critères ESG, mais qui sont également transparentes et vérifiables.
En soutenant ces pratiques, nous pouvons encourager l’émergence d’une économie plus responsable et résiliente, orientée vers la durabilité et la performance globale. Cela marque un pas décisif vers la concrétisation d’un futur où les principes ESG sont pleinement intégrés et valorisés dans les décisions d’investissement globales.