Dans un environnement marqué par des crises multiples et des incertitudes économiques croissantes, le « Baromètre 2024 de l’Épargne en France et en Régions » publié par Altaprofits révèle des insights captivants sur les habitudes d’épargne des Français.
Réalisée par l’Ifop, cette sixième édition du baromètre offre une exploration détaillée des tendances d’épargne, mettant en lumière la résilience et la constance des comportements des épargnants français malgré les aléas conjoncturels.
Stabilité impressionnante des habitudes d’épargne
Malgré un contexte global agité, 85% des Français possèdent au moins un produit d’épargne, un chiffre stable depuis 2020. La diversification est également en hausse, avec 58% des personnes détenant plusieurs formes d’épargne, en augmentation de 5 points depuis 2020.
De manière régulière, 94% des Français placent de l’argent sur leurs produits d’épargne, avec 75% le faisant au moins semi-annuellement, illustrant une fréquence maintenue par rapport à 2023.
Motivations dominantes pour l’épargne
Le principal moteur d’épargne demeure la préparation face aux imprévus, avec 75% des épargnants citant cette raison, contre 45% pour les projets personnels. Cette priorité a gagné en importance depuis la pandémie, solidifiant la place des préoccupations liées aux situations exceptionnelles (36% des citations).
Les plus jeunes, moins de 35 ans, se démarquent par une prépondérance de l’épargne projet (59% contre 45% en moyenne). À l’inverse, les individus de 65 ans et plus affichent une sensibilité accrue aux petits imprévus (65%).
Uniformité et variations régionales
Les habitudes d’épargne restent homogènes à travers toutes les régions de France, confirmant une culture d’épargne stable malgré les diverses crises.
La constance des comportements, indépendamment des différences régionales, réaffirme une approche uniforme et résiliente de la gestion de l’épargne par les Français.
Une prudence prédominante
Une majorité écrasante de 69% des épargnants préfèrent continuer à investir dans des produits sans risque, un chiffre qui reste plus ou moins constant par rapport à 2023 où il était de 68%.
Les livrets d’épargne réglementés dominent toujours, avec 81% des épargnants qui en détiennent, démontrant leur popularité en tant que véhicules d’investissement sûrs.
Réticence face aux produits à risque
L’intérêt pour des investissements plus risqués reste faible. Seuls 17% des épargnants sont attirés par des produits légèrement risqués offrant un rendement potentiellement plus élevé, un pourcentage qui reste stable par rapport aux années précédentes. Par ailleurs, seulement 5% choisissent de placer leur argent dans des véhicules hautement risqués.
Malgré une légère reprise, l’assurance vie voit sa popularité remonter à 29% en 2024, contre 26% en 2023. Le Plan Épargne en Actions (PEA) stagne à 13% pour la troisième année consécutive.
Disparités de genre et régionales
La prudence est plus marquée chez les femmes, avec 75% d’entre elles choisissant des produits sans risque, contre 62% chez les hommes. Les hommes montrent une préférence plus forte pour des placements tels que le PEA (17% contre 9% chez les femmes) ou l’assurance vie (33% contre 25%).
En termes de différences régionales, les épargnants de la Nouvelle-Aquitaine montrent un goût prononcé pour la sécurité, avec 77% optant pour des investissements sans risque, comparativement à 69% au niveau national. À l’inverse, ceux d’Île-de-France se distinguent par leur intérêt pour des options légèrement risquées (21% contre 17% en moyenne nationale).
« Quoi qu’il arrive, quels que soient les évènements à l’échelle nationale ou internationale, les Français continuent à épargner de la même manière et en étant averses au risque. », en conclut Stellane Cohen, présidente d’Altaprofits.
L’investissement responsable peine à décoller
La part des épargnants français s’orientant vers des investissements responsables stagne, avec seulement 9 % des répondants affirmant choisir des produits éthiques, indépendamment de leur rendement.
Ce chiffre n’a pas varié depuis 2022, soulignant une progression lente de l’épargne orientée vers des critères environnementaux et sociaux.
Connaissance des labels et normes responsables
Malgré une légère augmentation de la visibilité des pratiques d’épargne responsable, les labels et normes liés à l’investissement éthique demeurent largement méconnus.
Seuls 26 % des épargnants déclarent reconnaître au moins un des indicateurs proposés, avec une familiarité particulière pour les critères ESG et le label ISR, connus respectivement par 21 % et 20 % des personnes sondées.
Disparités régionales et socioéconomiques
Les disparités régionales sont marquées, avec l’Île-de-France se distinguant par une meilleure connaissance des labels d’investissement responsable à 36 %, comparé à une moyenne nationale de 26 %.
Les régions comme la Normandie et les Hauts-de-France montrent des taux de connaissance significativement plus bas, respectivement 18 % et 19 %. Les épargnants aisés, avec des revenus mensuels dépassant 2 500 € par foyer, sont nettement plus informés sur ces sujets, 38 % d’entre eux connaissant au moins un indicateur d’investissement responsable.
Freins à l’investissement responsable en France : informations et confiance en question
Les investissements durables continuent de représenter une minorité sur le marché français, principalement en raison d’un déficit d’information et d’une méfiance quant à la sécurité de leur rendement et à l’authenticité éthique des projets soutenus.
En 2024, 91 % des épargnants sondés indiquent qu’ils n’investissent pas ou peu dans des produits responsables, citant principalement un manque de connaissance sur le sujet (53 %). D’autres expriment leurs craintes concernant les risques associés à ces placements (28 %) et redoutent le greenwashing, craignant que ces investissements ne soient pas réellement bénéfiques pour l’environnement (25 %).
De plus, 20 % des répondants sont préoccupés par un rendement potentiellement faible, tandis que 18 % manquent de confiance dans les labels d’investissement responsable. Par ailleurs, 19 % des personnes interrogées ne sont tout simplement pas intéressées par ce type d’épargne.
Réactions démographiques et régionales
Les professionnels et les individus de catégorie aisée citent principalement la peur du greenwashing comme principal obstacle. Les aînés, les personnes de 65 ans et plus, indiquent quant à eux un désintérêt marqué pour les investissements responsables.
Au niveau régional, les habitants des Pays de la Loire (61 %) sont particulièrement touchés par un manque d’informations, tandis que ceux du Grand Est (35 %) soulignent davantage la crainte de risques élevés.
En Normandie et Pays de la Loire, la crainte du greenwashing est plus prononcée, avec 29 % des répondants de ces régions qui partagent cette inquiétude, contre une moyenne nationale de 25 %.
Jeunesse et responsabilité écologique : l’avenir de l’investissement vert
Les jeunes générations montrent un engagement distinct pour le financement de la transition écologique via leurs choix d’épargne, plaçant clairement les enjeux environnementaux au cœur de leurs préoccupations financières. Cette tendance est particulièrement marquée chez les moins de 35 ans, où 17 % d’entre eux ont choisi des investissements responsables, quel que soit le rendement, comparé à seulement 6 % des personnes âgées de 35 ans et plus.
Les données montrent que 26 % de tous les répondants sont au moins vaguement conscients des indicateurs d’investissement responsable, avec un pic de 38 % chez les moins de 35 ans et même 54 % chez les étudiants, soulignant l’intérêt croissant des jeunes pour des options d’épargne éthiques et durables.
L’écart entre les genres dans cette catégorie d’âge est également notable, les jeunes hommes étant sensiblement plus informés (53 %) que les jeunes femmes (24 %) concernant les investissements responsables.
Ces observations confirment que les jeunes générations sont non seulement mieux informées mais également plus actives dans la promotion d’une finance durable comme le confirme Stellane Cohen : « Les investissements responsables sont émergents ; les jeunes générations sont les plus sensibles à la finance durable ; elles sont les plus à même à flécher leur épargne vers le financement de la transition écologique. »
Leur implication croissante est donc un signe positif pour l’avenir de l’investissement responsable, promettant une expansion de ces pratiques financières vertes à mesure que cette génération monte en influence.
Vers une épargne plus éthique : réflexions et perspectives
L’étude d’Altaprofits met en lumière un paysage complexe de l’épargne en France, révélant des comportements d’investissement profondément ancrés et des perspectives variables sur l’investissement responsable. Malgré une prédominance de produits d’épargne sans risque, une fenêtre s’ouvre pour les produits d’épargne orientés vers la durabilité, en particulier parmi les jeunes générations qui montrent une propension notable à soutenir les initiatives écologiques à travers leurs choix financiers.
Cependant, la croissance des investissements responsables est entravée par un manque général d’information et une certaine méfiance envers les labels et le potentiel de greenwashing. L’incertitude quant au rendement de ces investissements ajoute une couche supplémentaire de réticence, en particulier chez les épargnants plus âgés et les moins enclins à prendre des risques.
En synthèse, alors que les épargnants français montrent une forte aversion au risque, il existe un potentiel clair pour une transition vers des options d’épargne plus éthiques, soutenue par une meilleure éducation financière et un renforcement de la confiance dans les produits responsables. Pour catalyser cette évolution, une collaboration étroite entre les institutions financières, les régulateurs et les éducateurs sera essentielle, tout comme le sera le soutien des politiques et des initiatives publiques encourageant l’investissement responsable.