L’année 2022 a été une période cruciale pour la protection sociale en Europe, marquée par des changements notables après la crise du Covid-19. La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) présente dans son rapport de 2023 une analyse détaillée des comptes de la protection sociale pour la France et 24 autres pays européens.
Les résultats de ce rapport mettent l’accent sur les tendances, les défis et les implications pour l’avenir de la protection sociale.
Contexte et méthodologie
La DREES a réalisé un examen exhaustif des comptes de la protection sociale moins d’un an après la clôture de l’exercice 2022. Le rapport s’appuie sur des données comparatives fiables et harmonisées, alignées sur les standards du Système européen de statistiques intégrées de la protection sociale (Sespros) d’Eurostat et les comptes nationaux de l’Insee.
Cette approche méthodologique permet une analyse précise et pertinente des tendances et des politiques en matière de protection sociale en Europe. Trois fiches viendront compléter dans un second temps la version de l’ouvrage mise en ligne le 14 décembre. Il s’agit des fiches portant sur les prestations des risques famille et logement pour la France ainsi que l’annexe 3 sur les révisions.
Evolution des dépenses de protection sociale
En 2022, les dépenses de protection sociale en France ont atteint 849 milliards d’euros, soit 32,2 % du PIB. Bien qu’il soit nettement inférieur au maximum atteint en 2020 (35,1 %), ce chiffre place la France en tête des pays européens en termes de part du PIB consacrée à la protection sociale.
En effet, la comparaison avec d’autres pays européens, tels que l’Italie (29,6 %), l’Allemagne (29,2 %) et le Danemark (27,0 %), révèle que pour la 7e année consécutive, la France est le pays d’Europe qui consacre le plus à la protection sociale.
Prestations sociales par habitants
La France se distingue également par le montant moyen des prestations sociales par habitant, qui s’élève à environ 12 550 euros en 2022.
Ce montant est supérieur à la moyenne de l’UE-27 (10 100 euros) et reflète l’engagement continu de la France envers la protection sociale, malgré les défis économiques et sociaux persistants.
Répartition des dépenses
Les principales catégories de dépenses en France et en Europe concernent les retraites et la santé.
En revanche, les dépenses liées aux risques famille, emploi, pauvreté et logement sont relativement moins importantes, ce qui souligne des priorités différentes dans les politiques de protection sociale.
Impact de la crise du Covid-19 et de l’inflation
La crise du Covid-19 a entraîné des mesures sanitaires, économiques et sociales exceptionnelles, dont certaines ont pris fin en 2022. La réduction des dépenses liées au risque santé a été un élément clé de cette transition (+3,2 % en France en 2022, après +10,3 % en 2021).
Parallèlement, l’inflation a posé de nouveaux défis, entraînant des mesures supplémentaires pour soutenir le pouvoir d’achat des ménages, en particulier les plus modestes.
Mesures contre l’inflation
Face à une inflation tirée par les prix de l’énergie et des matières premières, plusieurs pays européens, dont la France, ont déployé des mesures exceptionnelles pour protéger les citoyens les plus vulnérables.
Ces mesures se sont ajoutées aux mécanismes existants d’indexation des prestations sur les prix.
Dynamisme des ressources de la protection sociale
En 2022, les ressources de la protection sociale en France ont augmenté de 5,0 %, un dynamisme soutenu par la forte hausse des cotisations sociales et des impôts. Cette augmentation a permis de contrebalancer les déficits records des années précédentes et de dégager un excédent de 11 milliards d’euros.
Impact sur le solde des administrations publiques
Bien que le solde de la protection sociale soit devenu excédentaire, il est important de noter que ce solde ne reflète qu’une partie de l’effort consenti par les administrations publiques pour préserver la sécurité sanitaire, économique et sociale.
Le déficit des administrations publiques s’est amélioré en 2022 mais reste déficitaire : 127 milliards d’euros, soit 4,8 % du PIB, après un déficit record de 208 milliards d’euros en 2020 et de 162 milliards d’euros en 2021.
Analyse des dépenses de la protection sociale
Les dépenses de protection sociale en France, majoritairement constituées de prestations sociales, ont légèrement augmenté (11 % environ entre 2019 et 2022) pour atteindre 902,3 milliards d’euros. Cette augmentation reflète des tendances variées dans différentes catégories de prestations :
- Prestations vieillesse-survie et famille
Ces prestations ont connu une augmentation en raison des revalorisations et de l’adaptation aux besoins démographiques.
- Risques santé
Les dépenses liées à la santé sont restées dynamiques, influencées par la pandémie de Covid-19 et les initiatives telles que le Ségur de la santé.
- Risques emploi et pauvreté-exclusion sociale
Avec la reprise économique, les prestations liées à ces risques ont connu une diminution notable, reflétant le retour progressif à une situation plus normale sur le marché du travail.
Evolution des emplois de la protection sociale
Les emplois de la protection sociale en France ont augmenté en 2022, bien que de manière modérée (+1.2%). Cette croissance reflète l’augmentation des dépenses en prestations sociales, qui représentent la majorité des emplois dans ce secteur.
Les emplois divers, incluant notamment les frais non financiers (subventions, rémunérations et taxes sur les salaires payés par les régimes), ont connu une hausse modérée (+2.8%), reflétant l’effort continu dans la lutte contre le Covid-19, notamment l’acquisition de stocks de masques.
L’année 2022 a donc marqué un tournant dans le paysage de la protection sociale en Europe. La France, en particulier, a continué à montrer un engagement fort envers la protection sociale malgré des défis économiques et sociaux importants. Les changements observés reflètent la capacité des systèmes de protection sociale à s’adapter et à répondre aux besoins changeants des populations, tout en maintenant un équilibre entre les ressources disponibles et les dépenses engagées.