Secteur de l’immobilier : inspirations pour l’Assurance ?

Les modèles de transformation de notre secteur, ainsi que ceux d’autres secteurs, peuvent potentiellement inspirer le fonctionnement et les modèles économiques du secteur de l’assurance.

Nous avons souhaité nous entretenir avec Samuel Caux, Directeur général de eXp France. Samuel évoque le modèle économique de sa société, il mise sur le « charisme, les compétences, et la capacité à établir des relations solides avec les clients » de ses conseillers indépendants et sur la capacité de la technologie à apporter tous les services utiles et indispensables pour permettre, la croissance de son entreprise, une rémunération très attractive pour ses conseillers et une expérience immersive personnalisée pour ses clients.

Samuel Caux : Notre groupe est totalement indépendant, mais plutôt qu’utiliser ce terme, nous préférons dire que nous sommes intégrés. En effet, nous opérons en tant qu’agence intégrée. Avec une présence dans 24 pays et 880 collaborateurs, notre modèle repose sur une plateforme de services pour des conseillers immobiliers indépendants qui ont la possibilité de devenir actionnaires. En fait, beaucoup de nos conseillers deviennent presque automatiquement actionnaires de notre société, grâce à notre holding de tête, cotée à la bourse de New York. Dès leur première vente ou s’ils cooptent ou parrainent un autre conseiller, ils reçoivent des actions ou des options d’actions de la société. Ils ont leur propre responsabilité civile et agissent en tant qu’entrepreneurs, ce qui renforce leur engagement et leur autonomie dans leur activité.

Comparé au modèle classique de nos concurrents, ce qui nous distingue le plus est que notre modèle s’appuie sur une agence intégrée. eXp France est une filiale d’une société américaine, eXp Realty, née en 2009, venue révolutionner le marché immobilier en apportant un modèle économique novateur. Notre modèle favorise une meilleure répartition des revenus, en assurant une distribution équitable entre l’agence et les conseillers immobiliers. Nous avons également modifié le modèle traditionnel en digitalisant le conseil immobilier, éliminant ainsi le besoin d’un lieu de travail physique.

Ce modèle a été adopté par certains de nos confrères en France, et a même conduit à leur expansion. Nous poussons cette approche encore plus loin en dématérialisant et en digitalisant tous les aspects de l’entreprise, du staff à la direction en passant par la formation. Nous éliminons la nécessité d’un siège social ou d’un centre de formation physique. Cette transformation vise à optimiser notre modèle tout en améliorant la rémunération de nos conseillers.

Ce modèle économique permet d’économiser considérablement sur divers aspects tels que les locaux, les frais généraux,… .

Un exemple concret ?

SC : Notre modèle de métaverse RH (ressources humaines), notre île virtuelle accueille nos 24 880 conseillers et 2 000 employés. Ce modèle coûte beaucoup moins cher que l’entretien de locaux physiques. J’avais dû louer 500 mètres carrés à La Défense, avec notre île virtuelle pour la France, nous conservons une excellente qualité de service tout en évitant les charges de structure immobilière.

Actuellement, « malgré » un chiffre d’affaires de 4,8 milliards de dollars l’année dernière, nous n’avons aucun mètre carré de bureau physique, aucune dépense liée à une structure immobilière, et même aucun baby-foot…, ce qui illustre bien le concept.

Le modèle économique que nous avons adopté repose sur le partage des revenus avec nos conseillers. Il permet de redistribuer davantage de richesse parmi nos conseillers. Nous leur demandons également de contribuer à la croissance de l’entreprise. Notre existence en France remonte à début 2021et nos clients sont aussi bien les particuliers que les entreprises.

Un tel concept, venu des Etats-Unis, trouve-t-il sa place en France ?

SC : Absolument, votre question est très pertinente. Les différences entre l’univers nord-américain et l’Europe, la « vieille Europe », sont indéniables. Bien que le modèle américain puisse sembler universel et applicable partout dans le monde, il est important de reconnaître les nuances culturelles, organisationnelles et mentales propres à chaque région.

Personnellement, j’ai abordé cette question dès le début de ma relation avec EXP, il était essentiel pour moi de mettre en avant l’aspect français dans le modèle. L’exception française se manifeste quotidiennement, notamment par notre modèle de métaverse. Nos échanges hebdomadaires avec les 23 autres pays nous montrent clairement cette singularité, que ce soit en termes de langue anglaise, de réglementations administratives, culturelles, ou même concernant la manière de pratiquer l’immobilier.

Cependant, il existe de nombreux domaines dans lesquels nous pouvons partager, apprendre et grandir ensemble. Cela concerne l’organisation de l’entreprise, les aspects business, le marketing, les réseaux sociaux, l’automatisation, l’intelligence artificielle, ainsi que les outils de productivité. Tout cela est essentiel pour aider les conseillers immobiliers à être plus productifs et compétitifs.

Le client final choisit souvent un individu plutôt qu’une marque. La plupart de nos conseillers étaient opérationnels sous une autre enseigne auparavant. Nous croyons sincèrement que le conseiller est plus important que la marque elle-même. Nous nous concentrons sur nos conseillers, leurs noms sont mis en avant et nous leur apportons tout le soutien nécessaire pour offrir le meilleur service aux clients finaux. Notre approche consiste à soutenir nos conseillers dans leur rôle de production et de développement, en leur fournissant tous les outils, de la formation à l’assistance administrative. Notre objectif est de permettre à chaque conseiller d’apporter le meilleur service possible à leurs clients.

Malgré l’évolution technologique et l’arrivée d’outils comme le métaverse, il est crucial de rappeler que les fondamentaux du métier de l’immobilier demeurent intacts. La rédaction soignée des annonces, sans fautes d’orthographe ni de syntaxe, demeure une exigence essentielle pour offrir un service de qualité aux clients. Ces outils, y compris le métaverse, viennent en appui des professionnels de l’immobilier pour optimiser leur business model.

Dans votre secteur, la relation commerciale est avant tout humaine

SC : Je partage votre conviction, l’immobilier est un métier humain et de terrain. Les outils et les métaverses sont des atouts précieux, car ils facilitent les ventes et améliorent l’expérience clients. Ils permettent des présentations digitales plus interactives, des échanges en temps réel avec les clients et des visites virtuelles plus immersives. Ces avantages profitent aussi bien aux conseillers qu’aux clients finaux.

Comment vos concurrents vous perçoivent-ils ?

SC : Nous sommes vus comme un acteur capable de s’adapter aux contraintes actuelles et d’évoluer avec agilité. Nous ne sommes pas des « extraterrestres », mais des professionnels qui recherchent en permanence à améliorer la qualité de service, à optimiser les processus grâce à la technologie, tout en conservant une approche centrée sur l’humain. Il semble que notre perception dans le secteur soit largement positive et respectueuse. Notre modèle économique solide, notre capacité financière et notre positionnement en tant que plus grande agence intégrée au monde avec 88 000 conseillers en immobilier renforcent cette perception.

Nos résultats financiers positifs, notre trésorerie saine et notre absence d’endettement sont autant d’atouts qui témoignent de notre stabilité et de notre potentiel. Notre marque solide et notre modèle d’affaires attractif sont également perçus comme des avantages notables. Nous offrons aux conseillers immobiliers indépendants la meilleure opportunité en termes de rapport qualité-prix, avec une rémunération compétitive, des outils performants et une forte capacité à générer des leads et des transactions. C’est un ensemble d’éléments qui contribuent à renforcer notre réputation positive dans le secteur.

Vous pouvez préciser le modèle de rémunération de vos conseillers ?

SC : Il est très attractif et compétitif. En moyenne, un conseiller peut bénéficier d’une rémunération allant jusqu’à 75 % de commission sur une transaction. De plus, nous avons un système de redistribution qui permet aux conseillers de bénéficier jusqu’à 95 % de la commission générée sur sept niveaux de profondeur grâce au recrutement de nouveaux conseillers. Ce système de marketing relationnel crée également des revenus passifs pour nos conseillers, contribuant ainsi à la redistribution de notre marge nette. Bien que notre marge nette soit relativement basse, notre modèle repose sur de gros volumes d’activité, ce qui nous permet de maintenir une rémunération particulièrement attractive pour nos conseillers.

C’est la fin des agences physiques ?

SC : Les agences physiques, qu’elles soient immobilières ou d’assurance, font face à des défis importants dans un monde de plus en plus digitalisé. Si la présence physique des agences peut jouer un rôle dans la notoriété de la marque et la relation clients, les clients sont de plus en plus enclins à rechercher et à comparer les offres en ligne, où ils peuvent obtenir des informations et des devis rapidement.

La digitalisation offre des opportunités pour améliorer l’efficacité opérationnelle, réduire les coûts liés aux locaux physiques et offrir une expérience clients plus fluide et personnalisée. Cela dit, la transition vers un modèle plus digital peut rencontrer des résistances, surtout si le secteur a traditionnellement fonctionné de manière physique.

L’argument de la présence physique pour offrir une certaine forme de rassurance aux clients est en effet souvent mise en avant. Cependant, cette rassurance vient avec des coûts significatifs, notamment en termes d’infrastructures, de personnel et de maintien des agences. Dans un monde de plus en plus digitalisé, les consommateurs recherchent de plus en plus la commodité, la rapidité et la facilité dans leurs interactions avec les entreprises. Les avancées technologiques ont permis de développer des plateformes en ligne sophistiquées qui offrent des services rapides, accessibles à tout moment et de manière personnalisée. De ce fait, de nombreux clients préfèrent interagir avec les entreprises en ligne plutôt que de se déplacer physiquement en agence.

Cela dit, le besoin de rassurance et de contact humain ne disparaît pas complètement. Certaines situations complexes ou spécifiques pourraient nécessiter une interaction en personne, surtout lorsqu’il s’agit de décisions importantes comme le choix d’une couverture d’assurance adaptée. Cependant, de nombreuses entreprises cherchent à offrir un équilibre entre les interactions en ligne et les interactions physiques, en proposant des services hybrides où les clients peuvent choisir la manière dont ils souhaitent interagir.

Dans l’assurance comme dans d’autres secteurs, il s’agit d’identifier les besoins et les préférences changeants des clients et d’adapter les modèles de prestation de services en conséquence. La clé réside dans la capacité à fournir une expérience clients transparente et cohérente, quel que soit le canal d’interaction choisi par le client.

Mais pour vous, le plus important, c’est le conseiller !

SC : L’importance de la personne et de l’individu qui porte l’offre et les valeurs de l’entreprise devient de plus en plus prédominante. Les clients recherchent une expérience personnalisée, des conseils adaptés à leurs besoins spécifiques et une relation de confiance avec les professionnels qu’ils choisissent.

Le charisme, les compétences, et la capacité à établir des relations solides avec les clients sont des éléments essentiels pour réussir dans ces domaines. Les clients veulent interagir avec des personnes réelles qui comprennent leurs besoins et sont en mesure de fournir des solutions personnalisées. Si un individu démontre de la compétence, de la confiance et une excellente qualité de service, les clients peuvent être plus enclins à suivre cette personne, peu importe l’enseigne qu’elle représente et le nombre d’agences ou pas.

Le maillage territorial, la présence locale et la personnalité forte d’un professionnel contribuent à établir des liens avec la clientèle. Cependant ces liens sont de plus en plus indépendants de l’enseigne et plus centrés sur la personne. C’est pourquoi la gestion des relations et la fidélisation des clients reposent souvent davantage sur la compétence et le charisme des individus plutôt que sur le nom de l’entreprise.

En fin de compte, que ce soit dans l’immobilier, l’assurance ou d’autres secteurs, la transformation digitale et la personnalisation de l’expérience clients sont des éléments clés pour répondre aux besoins changeants des consommateurs et pour construire des relations durables avec eux ?

SC : En France, eXp est dans la première phase de consolidation et de croissance de son modèle, qui a débuté il y a environ deux ans. Nous avons réussi à rassembler près de quatre cents conseillers, ce qui représente une réussite significative. Notre objectif est de continuer à mailler le territoire français de manière plus approfondie. Nous avons enregistré une croissance de 125 % l’année dernière. Notre objectif est d’atteindre une masse critique de conseillers pour mieux servir nos clients et offrir un maillage territorial solide.

Extrait du magazine #6 Dessine-moi L’Assurance. le consulter ou le télécharger dans son intégralité, cliquez-ci dessous.

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