Les assureurs ont un rôle stratégique au sein de l’économie : acteurs majeurs du financement de l’économie et investisseurs de long terme, ils sont parmi les principaux financeurs des entreprises.
Afin de concrétiser son engagement pour une société plus juste et durable, la mutuelle MGEN s’est associée à Makesense et Serena pour créer son fonds d’investissement à impact, Racine2. Son ambition : financer une vingtaine de start-up à impact sur quatre ans. Assurance for Good a souhaité rencontrer Matthias Savignac, Président MGEN. Entretien.
Pour commencer pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre parcours professionnel ?
Je suis professeur des écoles de formation, adhérent MGEN. Les rencontres avec des militante(s) MGEN m’ont progressivement plongé dans le monde de la mutualité. J’ai d’abord pris quelques responsabilités comme bénévole à la section locale de Grenoble. Après 2 ans d’engagement bénévole, un poste de détaché s’est ouvert et les militants locaux m’ont proposé de candidater à ce poste. Je me suis retrouvé alors militant permanent MGEN, puis, 3 ans après, administrateur MGEN, et enfin, mes responsabilités m’ont amené jusqu’à la Présidence il y a un an et demi.
MGEN a annoncé en 2022 la création de Racine2, un fonds à impact de 80 millions d’euros. Quel a été l’élément déclencheur de ce projet ?
Avec la création d’un fonds à impact comme Racine2, c’est l’occasion pour MGEN de s’assurer qu’une partie de nos investissements irrigue une économie plus juste, plus respectueuse d’un point de vue social et environnemental.
C’est à la fois pour trouver des relais de croissance et pour mettre en phase nos investissements avec nos aspirations, que nous avons eu l’idée de créer ce fonds, en confiant la gestion à makesense et Serena. Cela nous permet d’incarner très concrètement notre raison d’être adoptée il y a un an et demi : « Engagés pour le progrès social et la santé de tous, nous, collectif mutualiste au service de l’intérêt général, prenons soin les uns des autres tout au long de la vie ».
Avec ce fonds d’investissement, MGEN entend donc incarner son engagement pour le progrès social et la santé de tous qui est l’un des piliers de sa raison d’être. Quels sont les principaux axes d’investissement du fonds ?
Il y a 4 axes principaux pour incarner concrètement notre raison d’être :
- Développer l’activité physique et sportive pour rendre attractifs et accessibles, par différents moyens et au plus grand nombre, le sport et les activités de plein air.
- Améliorer les modes de vie au quotidien par le développement de solutions favorisant le bien-être et le vivre-ensemble, à travers l’alimentation, le lien social, la solidarité, les objets connectés….
- Préserver l’environnement et ses liens sur la santé grâce à des solutions permettant d’optimiser la consommation de ressources naturelles, de développer des pratiques vertueuses et d’agir pour un cadre de vie déterminant d’une bonne santé (greentech, santé environnementale, prévention, pollution…).
- Rendre l’éducation accessible à tous : utiliser l’éducation comme facteur de mieux social, en facilitant ou rendant accessible à tous l’accès à l’éducation et la formation, et en renforçant son rôle d’inclusion par les nouvelles technologies ou l’approche collaborative.
Racine2 a été cocréé par MGEN, Makesense et Serena Capital. Pourquoi avoir choisi de vous associer à ces deux structures pour la création de ce fonds ?
Nous souhaitions travailler avec des structures qui partageaient les mêmes valeurs, les mêmes préoccupations que nous. Nous avons très rapidement compris qu’avec makesense et Serena, nous avions la même vision de l’avenir : une société plus juste qui prend mieux soin des personnes et de la planète.
Ce que MGEN apporte, c’est la représentation de plus de 4 millions de personnes protégées, une histoire de 75 ans d’engagements sociaux et sociétaux, une vision ancrée, crédible, historique, du prendre soin des individus. makesense, c’est 10 ans d’investissement, d’expertise sur l’entrepreneuriat à impact et des compétences sur la question de la mesure de l’impact de l’investissement réalisé. Serena nous accompagne sur la mise en œuvre et la capacité d’exécution de l’ensemble de nos équipes. C’est une structure reconnue dans le financement d’entreprises non cotées.
C’est tout naturellement que nous avons trouvé la bonne organisation pour travailler ensemble. Nous avons par ailleurs décidé d’indexer la rémunération du fonds sur l’atteinte des objectifs d’impact. Nous avons défini des indicateurs, et chaque indicateur nous permet de mesurer l’impact de la structure dans laquelle nous investissons : ce sont les impacts concrètement apportés par nos investissements qui déterminent le niveau de rémunération du fonds.
L’objectif de Racine2 est d’investir entre 500k€ et 3 millions€ au capital de start-up à fort impact environnemental et/ou social. Quels sont les projets qui ont été financés à ce jour ?
À ce jour, nous avons investi dans deux entreprises : MAY Santé, une application pour accompagner les 1000 premiers jours de la parentalité, et Helios, une banque éthique engagée pour la protection de la planète.
L’objectif est d’avoir des investissements entre 500k€ et 3 millions€, ce qui permettrait d’avoir une vingtaine de structures financées, et de trouver un juste équilibre entre des niveaux de financements et d’engagements.
Avez-vous rencontré des freins à ce stade ?
Ce ne sont pas des freins mais plutôt des points d’attention : beaucoup de start-up cherchent à lever des fonds pour accompagner leur croissance, or nous ne souhaitons pas être seulement un levier de développement économique. Nous sommes très attentifs à la nature de la réponse que ces structures apportent par rapport au besoin que nous avons identifié : il faut trouver le juste équilibre entre leur besoin de développement économique et leur capacité à apporter des réponses aux questions que nous nous posons. Les externalités négatives doivent vraiment être prises en compte.
Quels effets positifs avez-vous noté suite au lancement de ce fonds ?
Nous en avons fait une communication au grand interne, militants, élus, salariés et adhérents, car nous sommes fiers de cette initiative. Elle vient incarner concrètement ce que l’on porte en termes de culture d’entreprise, de RSE. C’est un moyen d’allier le dire au faire : en investissant dans des structures à impact, cela crée du sens pour l’ensemble de nos parties prenantes.
Et puis, les fondateurs de MAY sont intervenus à la dernière Assemblée Générale MGEN, devant les 500 délégués. Ce sont de jeunes entrepreneurs dynamiques qui sont venus témoigner de la vivacité de leur engagement et de leurs convictions. Ils ont présenté leur application et les services associés, ce qui a été particulièrement appréciée. Chaque délégué a pu bénéficier de quelques mois d’abonnement gratuits à May à utiliser ou partager. Ce cadeau remplaçait cette année les goodies habituellement distribués.
Une prochaine étape en lien avec l’investissement à impact que vous souhaitez partager avec nous ?
Un nouvel investissement de notre fonds a été officialisé le 1er décembre avec Lokki, une start-up qui veut démocratiser la location d’équipements sportifs (loueurs de vélo, de ski, de sports nautiques…).
Lokki promeut un mode de consommation plus responsable en aidant tout type de points de vente à développer une activité de location.
Interview réalisée par Valérie Loizillon