Dans un contexte de « Grande Démission » et de « Guerre des Talents », la gestion et la valorisation de la marque Employeur représentent un atout crucial pour les entreprises, y compris dans le secteur de l’Assurance.
Cependant ce concept RH reste controversé, essentiellement parce qu’il s’est retrouvé souvent réduit à un gadget marketing, ne reflétant pas la réalité des valeurs et du fonctionnement de l’entreprise. Sans surprise, la cohérence et l’authenticité de la marque Employeur sont indispensables afin d’attirer et de savoir conserver les talents. Or pour ce faire, la communication interne constitue un levier absolument indispensable.
La marque Employeur, pierre angulaire de la Guerre des Talents
Nous le savons, la pandémie a bouleversé non seulement l’organisation du travail et les méthodes de management dans les entreprises, mais le sens accordé au travail lui-même. Dans le cadre de cette « Guerre des Talents », les actifs sont en position de force pour mieux imposer leurs exigences : le salaire bien sûr mais aussi l’ensemble des conditions de travail , la possibilité de télétravailler, une meilleure souplesse horaire en vue d’un meilleur équilibre avec la vie privée…
Par ailleurs, la quête de sens au travail prend de plus en plus de place : comme l’a exprimé la Consultante RH et Team Lead Grand Montréal Amélie Chatut, « les gens veulent de plus en plus donner un sens à leur travail. Ils veulent savoir pour qui ils travaillent et vers quoi ils s’en vont aux côtés de cette organisation. » Ainsi les actifs ont pris davantage conscience à la fois de leurs aspirations profondes et de leur pouvoir de négociation, ce mouvement général étant qualifié d’« empowerment » des candidats et des collaborateurs.
Face à cette situation, les employeurs n’ont d’autre choix que de s’adapter en proposant à la fois à leur personnel et aux candidats la meilleure expérience collaborateur possible. Mais au-delà du salaire et des conditions matérielles, il s’agit de rendre celui-ci fier de travailler pour la marque. Sa motivation étant décuplée, l’entreprise obtiendra en retour de meilleures performances.
Sauf qu’évidemment, entre les promesses affichées et la réalité, il peut exister un gap que les collaborateurs auront vite fait de détecter, sachant que l’idée de quitter son entreprise en faveur d’un concurrent est désormais tout sauf taboue. Interrogé sur le plateau d’Assurance TV , le CEO et cofondateur de Testamento Virgile Delporte confiait qu’« aujourd’hui pour une marque, les clients sont très versatiles, très compliqués à conserver. Or nous assistons au même phénomène pour les salariés. »
Une marque Employeur peu en adéquation avec la réalité interne des entreprises
Au fond comme le mentionne Gabrielle Comtois, spécialiste en acquisition de talent au sein du cabinet de conseil en ressources humaines Go RH : « il faut avant tout une bonne adéquation entre les valeurs exprimées par l’entreprise et ce qui se passe réellement à l’interne. » En effet dans un monde ultra connecté et interconnecté, le bouche-à-oreille fonctionne toujours autant, tout en étant largement décuplé par les commentaires sur les réseaux sociaux : si des collaborateurs satisfaits constituent de fait autant d’ambassadeurs de la marque, a contrario un ancien collaborateur, ayant quitté l’entreprise et insatisfait de son expérience, sera susceptible de véhiculer une mauvaise réputation et réfréner ainsi les ardeurs des prochains candidats.
Il faut en effet savoir qu’en 2022, 92 % des candidats consultent les avis donnés sur une entreprise sur Internet avant de postuler, sachant que 64 % d’entre eux ont déclaré que les avis publiés avaient influencé leur décision de postuler ou non.
En définitive, les grands discours ne suffisent pas, la marque Employeur ne saurait être une simple vitrine puisque quelques clics pourraient suffire à démasquer toute hypocrisie. La sincérité de la marque Employeur nécessite donc une politique de communication interne forte, en adéquation avec les valeurs affichées en externe. Or d’après l’étude Randstad: Employer Brand research (2020), « seulement 19% des collaborateurs perçoivent un alignement fort entre ce que l’entreprise dit d’elle-même et leur expérience une fois recrutés. » Autant dire que le travail reste à faire…
Revenir à l’essence du concept
Ce constat impose de réinterroger le rapport entre l’employeur et le collaborateur car en effet, de trop nombreuses entreprises souhaitant valoriser leur marque Employeur, afin d’attirer les recrues, ont fait un contresens sur le concept. Comme l’écrit Tiphaine Galliez, Directrice Consulting chez Great Place to Work France, dans Cadre & Dirigeant Magazine, « Trop longtemps la marque Employeur a été présentée comme un outil à disposition pour rayonner et attirer de nouveaux talents. Il est désormais temps que les entreprises comprennent : la marque Employeur n’est pas une marque Recruteur. Elle doit cesser de se limiter à une communication destinée au potentiel candidat et devenir le reflet de l’expérience de l’ensemble des collaborateurs. »
Ainsi afin de garantir l’authenticité de l’expérience et faire en sorte que la marque Employeur soit véritablement incarnée, concrètement traduite en interne, Tiphaine Galliez en appelle à une stratégie globale centrée sur trois objectifs :
« – la fidélisation des collaborateurs en garantissant une expérience authentique et de qualité, basée sur la confiance vis-à-vis du management et de l’entreprise de façon plus générale
– la mobilisation des ambassadeurs stratégiques de l’entreprise : ses collaborateurs actuels, mais également ceux qui l’ont quittée.
–la mise en avant de la culture de l’entreprise, ses valeurs et ses pratiques, pour attirer les talents au-delà des prérequis pour un poste énoncés dans une annonce »
La communication interne n’est pas une option
Afin de faire de ses collaborateurs des ambassadeurs de la marque, une politique pro-active de communication interne est éminemment nécessaire. Celle-ci ne manquera pas de dégager divers bénéficies pour l’employeur et l’employé, dans une optique gagnant-gagnant :
- Maintien et renforcement du lien entre l’employeur et les employés, ainsi qu’entre les salariés eux-mêmes
- Renforcement de l’accompagnement des salariés en leur fournissant davantage de conseils et d’informations sur l’entreprise, leur donnant ainsi de meilleures clés de compréhension dans la cadre de cette fameuse « quête de sens au travail. »
- Favorisation de l’implication des salariés comme porte-voix de l’entreprise, que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans la vraie vie
En conséquence, une bonne politique de communication interne constituera de fait un puissant vecteur de performance pour les collaborateurs, et par là-même pour l’entreprise. Selon la start-up américaine Vocoli citée par Le Figaro Recruteur, « une mauvaise communication interne pourrait coûter jusqu’à 26 000 dollars par an et par employé », soit un véritable gouffre financier naturellement causé par le manque de productivité des salariés.
3 pistes d’amélioration de la communication interne ?
- Faire un état des lieux. Par exemple, le cabinet Go RH propose un questionnaire destiné aux employeurs afin d’évaluer sa marque Employeur. Quant aux salariés, des enquêtes internes via des questionnaires de satisfaction anonymes constituent une première étape essentielle.
- Valoriser les initiatives personnelles ou professionnelles des salariés, en animant une véritable « vie au sein de l’entreprise », que ce soit par le biais de newsletters ou d’un journal interne. S’il est important de tenir informé le personnel de la bonne santé de son entreprise, il l’est aussi d’évoquer ceux qui la composent.
- Favoriser une communication horizontale entre les collaborateurs entre eux. Si l’envoi de messages, emails ou journaux destinés à la communication interne est nécessaire, cela reste de la communication verticale : l’information part de la direction et redescend vers les collaborateurs. L’idée est donc de donner au personnel la possibilité de communiquer entre eux directement, par exemple par l’intermédiaire d’un réseau social professionnel dédié ou via des outils disponibles dans l’intranet.
En fin de compte, Le Figaro Recruteur conclue logiquement que « loin d’être un gadget, la communication interne est un enjeu business. » Une communication interne réussie ne pourra que conforter le rayonnement de la marque Employeur à l’extérieur de l’entreprise.
A partir de là, cette dernière disposera de solides atouts pour faire face à la « Guerre des Talents » : comme l’indique Go RH, « une organisation avec une marque employeur forte n’a pas besoin de chercher bien loin des candidats, car les gens veulent y travailler. Quand l’occasion et le poste idéaux se présentent, les personnes intéressées n’hésitent pas à postuler. »
Jean-Luc Gambey, propose en termes de communication interne et externe « Il faut repenser de nouveaux véhicules de communication permettant de rendre visible l’authenticité constatée d’une marque, pour les collaborateurs et les candidats.«