Le phénomène que les Américains appellent « big quit » ou « great resignation » semble se propager en France. Cette éventualité, ajoutée à celle du manque d’attractivité du secteur de l’Assurance ne vont-elles pas, boostées par les crises successive, générer une pénurie de talents, voire une guerre des talents pour notre secteur ? Guerre des talents, une réalité pour l’assurance est le thème de l’entretien avec Anthony Jouannau, Directeur Général de +Simple.
D’un point de vue général, les mutations des entreprises, exacerbées par la crise sanitaire, doivent-elles inciter l’entreprise à repenser sa stratégie en matière d’attractivité ? (en interne et en externe)
+Simple fédère aujourd’hui une équipe de 120 personnes dans 3 pays et 10 implantations géographiques. Nous avons réalisé 7 acquisitions en 2 ans. La question de la culture et de l’organisation de l’entreprise sont donc au cœur de nos sujets d’attention. Un premier constat est que la géographie pèse lourd dans l’attractivité. Le fait par exemple de proposer des postes à Marseille nous a permis d’attirer une équipe dont près de 20% des personnes viennent de la région parisienne.
Une organisation très horizontale, et donc très responsabilisante, semble également être un facteur fondamental et paradoxalement discriminant. En effet, nombreux sont celles et ceux qui ne supportent pas la responsabilisation. En bref, la mutation s’opère sous nos yeux et nous testons des choses en permanence avec plus ou moins de succès.
Dans le secteur de l’assurance, craignez-vous une pénurie des compétences clés ?
Jusqu’à présent le métier en tension dans l’assurance était essentiellement celui de souscriptrice, car cela reste une compétence rare. Mais dans notre pratique très centrée sur la technologie, les compétences technologiques (développeurs, data scientists, etc …) font l’objet d’une guerre sans pitié. Ceci est d’autant plus vrai que dans l’univers de la technologie l’assurance n’est pas perçue comme une industrie en pointe… Un handicap lorsqu’il s’agit de convaincre des talents. L’innovation et l’utilisation de technologies de dernières générations sont donc des éléments essentiels pour pouvoir constituer une équipe technologique de premier plan.
L’attractivité perçue d’une entreprise est-elle un facteur clé de son succès ? (pour le recrutement)
Cela va sans dire que la réputation (certains parleront de la marque employeur) est un levier central de la politique de recrutement. Mais de la même manière que les clients actuels recherchent « l’hyperpersonnalisation » des offres, l’entreprise doit pouvoir créer une culture qui puisse permettre à certains types de personnes de s’épanouir. Cela veut dire qu’il faut des partis pris forts et discriminants qui vont attirer certains et repousser d’autres. Chez +Simple, nous aimons exercer des responsabilités et être reconnus pour notre travail. Cela n’est pas compatible avec des profils très politiques et corporate ou avec des personnes ne souhaitant pas s’investir dans leur vie professionnelle.
Les entreprises doivent-elles réinventer la relation employeurs / collaborateurs ?
Il est certain que nous assistons à un changement profond dans l’évolution humaine. Après l’hégémonie des grandes organisations qui concentraient les actifs, le pouvoir dans tous les domaines de la société (entreprise, politique, religion, …etc) nous voyons émerger un monde qui met en avant les petites organisations, « à taille humaine », agiles, fonctionnant en écosystème. C’est donc cela qu’il faut arriver à créer en renonçant à la course à « la taille », ce qui conduit immanquablement à un divorce entre le collaborateur et l’entreprise.
Au delà de la rémunération, comment selon vous, attirer/garder les talents d’une entreprise ?
Le fait de rester une « petite organisation agile » est fondamental pour nous. Ce qui veut dire que nous devons utiliser au maximum la technologie afin que les humains continuent à faire de l’humain et que la machine se charge des tâches à faible valeur ajoutée. Cette agilité et cette taille humaine permettent à des talents qui souhaitent s’épanouir dans leur vie professionnelle de le faire.
En général, pour les entreprises du secteur de l’assurance, la “guerre des talents” est-elle aujourd’hui en France, une réalité ?
C’est clairement le cas pour les profils technologiques et ceux des souscripteurs. Le défi pour +Simple est que chaque collaborateur puisse intégrer les 3 dimensions de notre métier : la « technique » de l’assurance d’abord, la technologie qui doit être intimement comprise, et utilisée dans tous les aspects de notre travail au quotidien, et enfin l’UX (user expérience) qui est intimement lié à l’expérience que va vivre le client final. Nous verrons si ce mélange de compétences si particulier que nous nous efforçons de donner à chaque collaborateur fera école et rendra nos collaborateurs attractifs.
Pour conclure ?
Le taux d’attrition subi dans l’équipe est aujourd’hui très bas ce qui nous laisse penser que nous bénéficions encore de l’effet « scale up ». Mais nous resterons en revanche très attentifs à nous interroger sur nos pratiques et la culture que nous créons chez +Simple.
Dossier : Guerre des talents, réalité pour le secteur de la l’assurance ? enquête, itw, libre blanc, AssuranceTV, podcast… si intérêt, nous consulter.