Dans un monde caractérisé par l’explosion des algorithmes et de l’intelligence artificielle, les moyens pour évaluer et se prémunir des risques n’ont jamais été aussi développés. C’est en particulier le cas dans le secteur de l’assurance et des investissements financiers, au point de poser aujourd’hui des problématiques majeures nous amenant à nous interroger sur leur pertinence. Notre rapport au risque reste au fond très ambigu, aussi bien redouté que recherché. C’est toute cette ambivalence, qui en dit long sur la nature humaine, que le web média L’ADN a voulu interroger à travers son vaste dossier L’Amour du risque, réalisé en partenariat avec le groupe mutualiste Aéma. Le dossier comprend notamment un podcast riche d’enseignements, dans lequel interviennent aussi bien des théoriciens que des praticiens du risque.
Les incroyables progrès des outils numériques ont révolutionné les secteurs de l’assurance comme de la finance, avec l’émergence de nouvelles pratiques. L’explosion des plateformes digitales et la venue de nouveaux acteurs, Insurtech et Fintech, ont largement bousculé les assureurs et les établissements financiers traditionnels. En parallèle, l’évaluation purement humaine des situations a de plus en plus laissé sa place aux robo advisor livrant leurs verdicts au moyen d’algorithmes toujours plus sophistiqués.
Aujourd’hui, d’après le Predictive Analytics Market Research 2021, dernière étude publiée par Data Bridge Market Research, la taille du marché de l’analyse prédictive devrait atteindre les 40,51 milliards de dollars d’ici 2028, en bénéficiant d’un taux de croissance annuel de 23,52 %. Pourtant différents rapports affirment qu’en réalité, ces algorithmes si performants sont en réalité biaisés, appelant à la mise en place de garde-fous. En France, le rapport dirigé par le député Cédric Villani, remontant à mars 2018, a déjà plaidé pour un meilleur audit des algorithmes et davantage de transparence dans l’intelligence artificielle. Au Royaume-Uni, le Chambre des Lords a rendu la même année un rapport allant dans le même sens. Dans son dernier ouvrage Automating Inequality, l’experte en sciences politiques Virginia Eubanks a dénoncé la façon dont les algorithmes reviennent à rejeter les personnes les plus fragiles, ne faisant que répliquer les inégalités sociales en les amplifiant via leur automatisation.
Ces algorithmes ayant été conçus par l’homme, ils sont nécessairement imparfaits par essence. C’est pourquoi il reviendra toujours aux assurés et aux investisseurs de rester vigilants, afin que des décisions touchant à leur santé ou à la gestion de leur patrimoine, relevant de critères essentiellement humains, et notamment de contextes familiaux, ne soient pas exclusivement dictées par des algorithmes, aussi performants soient-ils.
En réalité, cette multiplication des algorithmes pose un débat de fond qui dépasse le cadre des seuls secteurs de l’assurance et de la finance : quel est notre rapport au risque et jusqu’où sommes-nous prêts à assumer celui-ci, en acceptant sa part intrinsèque d’incertitude ?
Si la notion de risque est inhérente au monde de l’assurance et de la finance, elle est en définitive présente plus généralement dans le quotidien de chacun. Plus on essaie de saisir le risque et de l’évaluer, plus on ressent au font que cette notion nous échappera toujours en partie. C’est tout ce mystère que s’efforce de décrypter le dossier L’amour du risque, disponible en ligne sur le web média L’ADN, réalisé en partenariat avec le groupe Aéma. Au sein d’un podcast mené par le journaliste Antoine Couder, des professionnels de l’expérimentation du risque, entrepreneurs mais aussi sportifs et aventuriers, livrent leurs témoignages en compagnie d’intellectuels qui réfléchissent autour de cette notion.
Un podcast riche d’enseignements, mettant en cause un certain nombre d’idées reçues et posant des questions centrales : la notion de rationalité est-elle objective ? Comment réagit notre cerveau face à l’aléa ? Est-il fait pour prendre en permanence des décisions ? Ces discussions ont permis de mettre en lumière l’ambivalence de la nature humaine et de son attitude face aux aléas : nous souhaitons à la fois tordre le réel, prendre en main notre destin en refusant la fatalité, tout en sachant qu’au fond, la possibilité d’un aléa doit être acceptée et qu’un événement fatal surviendra inexorablement.
De quoi éclairer autrement le rôle des métiers de l’assurance et de la finance ? Ceux-ci comportent eux aussi leur part d’ambivalence : les prestations proposées apportent une protection à l’assuré, voire un gain à l’investisseur. Mais pour proposer cette prestation, les organismes d’assurances et les banques ont dû procéder à une évaluation des risques encourus en rapport avec les profils des clients, afin de sécuriser leur modèle. D’un côté, la protection contre le risque est assurée mais de l’autre, tout est calculé pour que ce risque soit le moins élevé possible…
En définitive, nous savons qu’aucun risque ne saurait être intégralement évalué ni anticipé, mais au fond en avons-nous envie ? Laissons le dernier mot à la philosophe Aïda N’Diaye, qui livre dans le podcast cette pensée de Jean-Paul Sartre : « Comment fait-on pour agir et être libre dans un monde aussi incertain ? Il faut faire la différence entre l’imprévisibilité et l’incertitude. Grâce à la liberté, tout n’est pas déterminé. Si tout était certain, nous ne serions pas libres. Mais nous pouvons réduire l’imprévisibilité par l’anticipation, la réflexion préalable, sans pour autant faire disparaître l’incertitude… »
Ce podcast contient les témoignages de :
- Charlie Dalin, navigateur
- Anne Méaux, présidente et fondatrice d’Image 7
- Étienne Koechlin, chercheur en neurosciences cognitives
- Aïda N’Diaye, philosophe et enseignante
- Alain Duclos, guide de haute montagne et spécialiste des avalanches
Podcast animé et écrit par Antoine Couder, accompagné de Laura Encinas et Guillaume Ledit. Production L’ADN Studio
Écouter le podcast sur Spotify ou sur Deezer
Vous pouvez aussi consulter le dossier complet consacré à « L’Amour du Risque » réalisé par L’ADN en collaboration avec le groupe Aéma.