Pascal Michard – Président Aéma Groupe répond à nos questions.
Vous avez évoqué, en début d’année 2021, lors de l’annonce de la création d’Aéma Groupe, nouvel acteur mutualiste, que « le futur de l’assurance c’est la prévenance ». Pouvez-vous détailler ? La prévenance est-elle proche du concept du Care ?
Nous devons replacer la prévenance dans notre ADN mutualiste. La raison de l’ensemble de nos actions est la solidarité, consubstantielle du modèle mutualiste qui nous anime, en tout temps. La solidarité est une valeur et un engagement, la prévenance étant elle une preuve concrète de la solidarité. La solidarité nous dit pourquoi agir, la prévenance nous dit comment. Il s’agit d’une éthique de l’action qui se décline, tant par la prévention, l’accompagnement, la bienveillance, l’accessibilité, la proximité physique et territoriale que par les modalités de la relation avec nos sociétaires. La prévenance a ceci de particulier, par rapport à l’assurance qui répare, qu’elle se positionne en amont de la réparation pour essayer d’éviter le sinistre et ainsi mieux accompagner les parcours de vie. Cela ouvre vers une conception contemporaine de notre métier d’acteur de la protection qui est une dynamique de rassurance, de sécurité, de confiance pour nos sociétaires, et traduit concrètement l’attention portée à l’autre, une recherche d’anticipation et un spectre large de la relation assureur/assuré du XXIème siècle
La prévenance permet-elle de créer une nouvelle relation économique mais vertueuse avec vos sociétaires et adhérents et ainsi d’entretenir une relation prévenante et durable afin d’anticiper et soutenir leurs moments de fragilité ?
La prévenance est individuelle mais a un impact social vertueux et global. En effet quand nous additionnons les actions individuelles, nous répondons concrètement à des objectifs sociétaux. Evidemment, cela transforme le modèle de l’assureur autour de cette pratique qui a vocation à faire évoluer notre modèle économique. Nous ne sommes plus un « réparateur » nous sommes un « accompagnateur » des parcours de vie. Si cela permet d’augmenter les fréquences de contacts avec nos sociétaires et adhérents, nous augmentons aussi les opportunités de conseils et d’équipement, sachant que la performance économique est indissociable de la performance sociale. Nous nous devons de répondre à la fois aux défis économiques et sociétaux.
Comment concrètement cela peut-il se traduire ?
Je vous propose quelques exemples récents et concrets tout d’abord lié à la crise sanitaire : Les dispositifs de solidarité mis en place par Aéma Groupe pendant cette crise représentent plusieurs dizaines de millions d’euros répartis entre différents fonds de secours et associations pour venir en aide aux plus fragilisés.
Par ailleurs, depuis fin septembre 2020, nous proposons gratuitement à tous les sociétaires Macif et sans condition particulière, le service Macif Solidarité Coups Durs, un soutien personnalisé pour permettre de surmonter une épreuve familiale, faire face à des difficultés financières, aux coups durs liés à la santé ou accompagner un proche en perte d’autonomie. Macif a également renforcé son engagement aux côtés des aidants en donnant accès à des garanties d’aides aux aidants, intégrées dans son contrat Garantie Accident, à 4,2 millions de sociétaires Macif et leurs conjoints, sans surcoût, pour les aider à faire face et à trouver des solutions pour faciliter leur quotidien. Désormais, si nos sociétaires se retrouvent en situation d’aidants, ils pourront bénéficier, d’une aide aux démarches administratives, d’un bilan de leur situation et de leur habitat, d’un relais en cas d’urgence, d’une aide au répit et d’un accompagnement psychologique. Dernier exemple, Myfairjob, proposé par Aésio, est un service innovant d’accompagnement de nos adhérents à la recherche d’un emploi. Cette plateforme internet permet la création de son CV par compétences, avec la possibilité de l’adresser à plusieurs centaines de recruteurs simultanément, en fonction du secteur d’activité et de la zone géographique de recherche.
Il faut accompagner au quotidien, dans toutes les étapes de la vie avec des services complémentaires de notre métier historique et en dépassant, parfois, la relation contractuelle liée à la prestation d’assurance. Dans l’avenir, il viendra se greffer d’autres services et des prestations sans rapport avec les sinistres, avec néanmoins une cohérence avec notre vocation qui consiste à prévenir, sécuriser, protéger. Nos services ainsi proposés doivent répondre au souci de protection, de sécurisation des parcours de vie ou d’accompagnement dans des situations de difficulté pour nos sociétaires. La prévenance, aujourd’hui sur le plan « individuel » peut se décliner sur le plan collectif, entreprises ou structures de l’ESS, mais aussi, par extension, vers la société par l’exercice de notre responsabilité sociale et environnementale au service de l’utilité sociale.
Allez-vous désormais plus communiquer sur vos actions, rendre la prévenance plus visible, plus compréhensible ?
Oui, il reste à la décliner, à l’exprimer auprès des sociétaires et adhérents. Nous allons expliquer notre volonté et notre façon d’agir. La prévenance est la clé de lecture de l’ensemble de nos actions, elle va nous permettre d’apporter les preuves de nos engagements.
Aujourd’hui, avec plus de 8 millions de sociétaires, adhérents et clients, Aéma Groupe né du rapprochement entre la Macif et Aésio Mutuelle, s’appuie sur un réseau de 800 agences et de 14 000 salariés. Avec un chiffre d’affaires de plus de 8 milliards d’euros, le Groupe se place parmi les leaders en assurance automobile, en prévoyance accident et devrait devenir le deuxième groupe mutualiste en santé individuelle et collective.
Plus que des chiffres, c’est un gage de la puissance de notre force collective et de notre sécurité financière. C’est aussi la démonstration de la confiance que nous accordent les assurés, dans leur entière pluralité. Nos offres s’affranchissent des barrières traditionnelles afin proposer des solutions innovantes. Les synergies sont aussi commerciales avec des réseaux qui distribuent le même bouquet d’offres. La complémentarité est également enrichissante pour les équipes d’Aésio et de Macif. Chacune apprendra de l’autre pour rendre ce nouveau Groupe performant, légitime, afin d’attirer et de fidéliser les talents. Forts de notre ancrage territorial et de l’étendue de nos expertises, et des nombreuses actions déployées par nos délégués sur le territoire, nous serons mieux armés pour défendre nos positions sur un marché ultra-concurrentiel et promouvoir notre modèle mutualiste.
La prévenance ne se décrète pas, elle se vit au quotidien pour vos adhérents et vos collaborateurs ? N’est-ce pas une nécessité, pour notre secteur, de déployer des modèles novateurs, au-delà du rôle « historique » de l’assurance, à haute valeur humaine dégagée ?
L’enjeu est de ne plus cantonner notre rôle à de l’indemnisation ou de la réparation. Notre savoir-faire historique est le risque, il s’agit d’une expertise fine qui est aussi un élément de légitimité, permettant d’essayer d’éviter ou d’atténuer un événement indésirable pour nos sociétaires. Les nouvelles technologies, les outils de prédiction nous donnent aujourd’hui des moyens que nous n’avions pas auparavant.
Nous avons la capacité désormais à pouvoir faire. Ce n’est plus une intention ni une attitude. Aujourd’hui nous avons les moyens de réaliser cette ambition. Le numérique donne davantage de corps, de réalité à la prévenance. Nous avons l’opportunité de mieux connaitre nos sociétaires avec l’exploitation de la donnée qui permet d’aller au-devant des besoins exprimés ou détectés, avec une éthique de l’utilisation de la donnée et, bien sûr, la garantie de la sécurité et de la préservation des données personnelles. La prévenance doit s’adresser à toutes nos parties prenantes et en particulier à nos collaborateurs, car elle est aussi un élément de cohésion interne.
Pour conclure, vous déclariez qu’il faut « protéger les personnes dans un monde de plus en plus complexe et imaginer ensemble un futur plus juste et plus solidaire ». Un acteur du secteur de l’Assurance, seul, a-t-il les moyens de remplir ce rôle ?
Nous ne sommes pas experts en tout, dans tous les domaines. Nous compléterons nos savoir-faire pour matérialiser cette pratique de la prévenance. Il faudra probablement ainsi s’allier, s’ouvrir pour grandir et répondre aux besoins de chacun, mais aussi dans le cadre de l’utilité sociale. Nous devons constituer un écosystème avec des savoir-faire particuliers, des expertises complémentaires aux nôtres. La prévenance implique un écosystème humaniste autour de la protection de la personne. Le modèle mutualiste a vocation à protéger les personnes et à avoir une utilité sociale. La prévenance sert cet engagement.
Jean-Luc Gambey – L’assurance en Mouvement / Vovoxx
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