Xavier Quérat Hément – Vice-Président de La Mutuelle Générale – Certifié par l’Institut Français des Administrateurs répond à nos questions. Evoquons ensemble, un des acteurs majeurs de la vie d’une entreprise, sa gouvernance. Pouvez-vous repréciser le rôle de la gouvernance dans les choix stratégiques majeurs d’une entreprise ?
Je suis un acteur passionné de la transformation au travers de projets concrets et structurants. Comme lorsque j’étais le Directeur Qualité du Groupe La Poste, en charge du pilotage de la transformation des 2000 plus gros bureaux de poste dans une logique service. La transformation est un chemin forcément long et progressif, en s’appuyant sur l’innovation, la co-construction, le design de service et… le courage des premiers, qu’il convient de protéger et d’encourager, et qui vont donner ensuite, si tout va bien, l’envie aux autres de se joindre au mouvement.
La transformation doit toucher toutes les fonctions de l’entreprise. Tout le monde est concerné, quel que soit son niveau hiérarchique, si l’on veut que le client final perçoive réellement le changement. L’impulsion du dirigeant, l’engagement du Comex sont fondamentaux pour que toute l’entreprise soit effectivement orientée satisfaction client et engagement des collaborateurs, au quotidien et tout au long de l’année, et ce quel que soit le canal utilisé par le client. Il est possible de lancer des pilotes, d’identifier collectivement les jalons du chemin à parcourir, bâtir des indicateurs de réalisation et de perception, mais le dirigeant, par son implication visible, permet d’ouvrir les portes, de faire en sorte que l’ensemble de la ligne managériale soit sur la durée réellement aligné sur les objectifs.
Il est essentiel également de rendre compte régulièrement de l’avancement du projet au conseil d’administration chargé de s’assurer que les grands projets opérationnels s’inscrivent dans la stratégie et les plannings décidés.
Donner le sens, rendre possible, être en soutien, assurer un suivi vigilant et bienveillant, rendre compte sont les principaux attendus de la gouvernance.
La société se transforme, les différentes instances de la gouvernance des mutuelles sont-elles convaincues de la nécessité de la transformation ?
Les mutuelles s’appuient autant sur leur vie politique que sur les actions des opérationnels. Il s’agit là d’une spécificité essentielle, la gouvernance politique garantit que les valeurs, les fondamentaux, l’histoire, la fidélité aux engagements soient bien respectés. Chacun peut défendre son point de vue au travers de différents lieux d’échange (comité de section, assemblées départementale, régionale, générale, Conseil d’Administration). Il est vrai que cela peut prendre du temps (y compris aux yeux des opérationnels), que cela nécessite un effort pédagogique conséquent, mais cela permet d’avancer sans bouleverser les équilibres patiemment élaborés.
Concernant la transformation, y a-t-il des contraintes qui pourraient « paralyser » ou « peser » sur les prises de décision des instances ?
L’avantage des entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire est le temps long, le regard porté sur des critères sociétaux. Mais il ne faut pas nier la forte pression de la taille critique, des résultats (pour rémunérer les équipes), des ratios financiers (Solvabilité 2), des exigences réglementaires (ACPR). Dans le contexte particulier de la COVID, beaucoup d’équilibres ont été bousculés. Il s’agit donc de poursuivre l’adaptation, probablement en accélérant, en étant vigilant sur les fondamentaux et sans inquiéter les sociétaires historiques, parfois âgés. Les forces syndicales sont également présentes et défendent naturellement leurs convictions, voire leur choix de société. Bref, il faut en effet louer les qualités des Dirigeants effectifs des mutuelles pour savoir naviguer entre toutes ces nécessités par temps fort et emmener l’équipage à bon port !
Une mutuelle fonctionne sur le principe, un homme, une voix qui permet d’avoir des élus qui représentent les adhérents. Pensez-vous que les instances de gouvernance des mutuelles, aujourd’hui, représentent la diversité de leurs adhérents ?
Dans toutes les organisations, la diversité des profils fait la richesse d’une communauté. Le choix des administrateurs, exercice clé pour la gouvernance, est essentiel. Il faut trouver des acteurs qui ont la volonté de s’investir, qui ont du temps ou des compétences nouvelles et qui représentent la diversité des personnes couvertes par les contrats.
Ne faudrait-il pas aller vers plus de mixité, de jeunes générations au sein des instances de gouvernance, voire de développer des modèles participatifs ?
Tout à fait ! L’enjeu est de donner envie aux jeunes générations de s’engager pour porter des modèles qui font sens. Il faut savoir intéresser les générations «YZ», plus zappeuses, plus orientées projet ou grande cause que carrière. L’engagement passe par le sentiment d’être écouté, utile, considéré et associé véritablement à la décision. Cet exercice a été fait au sein de La Mutuelle Générale, par exemple, pour revisiter avec les collaborateurs et les élus notre raison d’être, en cohérence avec les engagements sociétaux historiques.
Au-delà de proposer des garanties complémentaire santé, quel est le rôle d’une mutuelle santé dans la société ? Avez-vous des exemples concrets ?
Ce qui me marque le plus est la main tendue vers l’autre, la solidarité entre les générations, la présence au moment des coups durs pour accompagner et protéger. Il s’agit là du moment de vérité : au-delà des discours de communication, je prouve la réalité de l’engagement. Les mutuelles s’engagent pour les plus fragiles, les aidants, l’accompagnement au bien vieillir, la lutte contre les solitudes, la cohésion de la société. Ce sont ainsi 24 millions d’euros de dépenses à caractère social qui ont été engagés par La Mutuelle Générale en 2020. Les mutuelles jouent un rôle essentiel dans la société.
Une mutuelle ne-doit-elle pas être engageante ? Et attractive pour ses adhérents, ses collaborateurs ?
C’est la base de tout organisme vivant ! L’enjeu est d’être rejoint par un maximum de nouveaux adhérents (collectifs et individuels) afin d’assurer la survie de l’entreprise et la solidarité intergénérationnelle. Mais je retiens surtout l’enjeu de donner envie aux experts et aux jeunes de rejoindre des entreprises atypiques. Et pour cela, il faut être innovant et attractif dans l’équilibre vie professionnelle/vie personnelle proposé, dans la flexibilité choisie (télétravail), avec des outils technologiques particulièrement performants, de la formation continue et un style de management rénové. Dans ce contexte, la marque employeur et la raison d’être jouent un rôle essentiel.
Selon vous, qui incarne la transformation dans le secteur de l’assurance ?
Assurément Pascal Demurger, qui a été le premier dans ce secteur à incarner avec éclat la transformation en marche, Patrick Sagon, qui s’est résolument engagé pour le développement d’une offre de services très innovants, et Stéphane Dedeyan, qui vient de rejoindre la CNP, et je m’en réjouis beaucoup, tant les défis sont importants pour réinventer le modèle de l’assurance en France !
Jean-Luc Gambey – L’assurance en Mouvement / Vovoxx
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