Christine Mathé-Cathala répond à nos quelques questions.
La transformation de l’entreprise est probablement assez protéiforme. Il peut s’agir de la transformation de sa gouvernance ou de son organisation, de son rôle sociétal et environnemental, de la dimension produit et servicielle, des systèmes d’information et de l’intégration de nouvelles technologies, de la distribution et la relation clients, de la mutation / hybridation des compétences, du modèle économique, … Dans notre secteur « se transformer », selon vous, est-ce seulement changer, évoluer, s’adapter, ou devenir autre chose, devenir autre ?
Une entreprise est finalement assez proche d’un organisme vivant : un début, une fin, et dépendante d’un écosystème qui évolue en permanence :
- Cadre règlementaire, technologique…
- Autres acteurs du marché
- Une clientèle qui évolue, et dont les besoins, préoccupations, usages et attentes évoluent également
- Ecosystème interne : collaborateurs, syndicats…
L’entreprise doit donc nécessairement se transformer avec son temps, sur l’ensemble des dimensions que vous évoquez, a minima réagir et s’adapter, au mieux anticiper. Bien sûr les transformations peuvent être plus ou moins profondes, plus ou moins radicales, mais une entreprise hérite également d’une histoire. Pour garder la métaphore de l’organisme vivant, l’entreprise ne peut donc pas totalement devenir autre : elle a une identité qui lui est propre, du fait de cet héritage : l’histoire de sa marque, de ses dirigeants, de ses collaborateurs, de ses clients, etc.
La spécificité du secteur de l’assurance est peut-être son rapport au temps, qui jusqu’il y a quelques années permettait aux entreprises de ce secteur de se permettre une certaine inertie dans les changements opérés… Aujourd’hui ce n’est plus vrai, du fait de la formidable accélération sur les changements d’acteurs, notamment l’émergence des assurtechs et fintechs. Par ailleurs l’évolution des attentes clients, des standards de la relation client (tous secteurs confondus) nous oblige à être beaucoup plus réactifs et agiles.
La crise que nous traversons nous le rappelle d’ailleurs : les crises marquent des ruptures fortes, face auxquelles les entreprises n’arrivent pas toujours à s’adapter… Ces périodes sont à la fois catastrophiques pour les entreprises et leurs employés (nombreuses défaillances), mais sont également propices aux innovations majeures (rupture).
Pour vous la transformation d’une entreprise est-elle un processus fini et planifiable, ou un mouvement perpétuel ?
Si l’entreprise doit évoluer en permanence, pour continuer d’exister dans un écosystème qui lui-même évolue, sa transformation ne peut pas être un processus fini.
Cette transformation sur le temps long, correspond bien sûr à la superposition et / ou à la succession de changements planifiés sur le court ou moyen terme, dans lesquels l’entreprise investit à la mesure des enjeux, et en cohérence avec la vision stratégique de long terme posée par les dirigeants de l’entreprise.
Ainsi la transformation d’une entreprise, pour être réussie, nécessite d’avoir posé une ambition stratégique claire et partagée en son sein, et de poser des moyens à la mesure de cette ambition.
J’insiste sur la nécessité de vision partagée : si tous les acteurs de l’entreprise se sentent à la fois engagés au sein de l’entreprise, et ont une vision claire des priorités stratégiques vers lesquelles tendre, ils contribueront collectivement à construire le chemin. Un autre prérequis pour cela est qu’ils puissent disposer de marges d’actions, cela fait partie des moyens nécessaires (autonomie / responsabilité).
Vous faites partie des 50 transformers du secteur de l’assurance. Les professionnels ont probablement signifié votre capacité à porter des convictions, donner de nouvelles directions, à initier / piloter des transformations, à incarner le mouvement… D’un point de vue professionnel, quels sont les ingrédients indispensables à la transformation d’une entreprise du secteur de l’assurance ?
C’est d’abord une histoire d’hommes et de femmes…
Les dirigeants bien sûr, qui doivent incarner l’entreprise et son avenir, ce qui nécessite pour double compétence la capacité de projection stratégique, et le leadership pour embarquer leurs équipes. Je suis convaincue qu’une Direction doit « éclairer », plus qu’elle n’« éblouit » !
Un esprit curieux et alerte de veille et d’écoute de l’écosystème : vers le secteur assurance bien sûr mais bien au-delà également, les initiatives des autres acteurs, les réflexions des experts de différents domaines, sociologues, philosophes, et bien sûr ce que nous remontent nos collaborateurs et nos sociétaires eux-mêmes. La voix du sociétaire est omniprésente au sein de notre entreprise et une source majeure d’amélioration continue.
Les compétences et l’engagement des collaborateurs, couplée à la bonne compréhension des défis à relever, est également une condition essentielle de réussite. Entendre « battre le cœur » de nos sociétaires et des salariés est vital pour la MAIF.
Le dernier ingrédient est certainement l’agilité, que ce soit dans les modes de fonctionnement, mais aussi voire surtout dans l’état d’esprit des collaborateurs. D’autant plus dans un monde où il est de plus en plus difficile d’avoir une vision à plus de 6 mois, cf. ce que nous vivons avec la Covid.
Pour conclure ?
Fort de ces constats, la raison d’être que s’est donnée la MAIF, en tant qu’entreprise à Mission, prend tout son sens : « Convaincus que seule une attention sincère portée à l’autre et au monde permet de garantir un réel mieux commun, nous la plaçons au cœur de chacun de nos engagements et de chacune de nos actions ». Elle permet d’aligner les intérêts de tous : entreprise, salariés, clients, et société. Elle est vecteur d’engagement, et donc un terreau fertile pour une transformation d’entreprise réussie.
Réalisé le 15/04/2021 – Jean-Luc Gambey – Vovoxx
Christine Mathé-Cathala est dans la communauté des 50 “Transformers” de l’Assurance.