Si la transformation d’une entreprise ou d’un secteur est possible grâce au collectif, la transformation reste souvent incarnée ou impulsée par une personne (dirigeant, manager, startupper, expert, … ). Magali Noé répond à nos quelques questions.
La transformation de l’entreprise est probablement assez protéïforme. Il peut s’agir de la transformation de sa gouvernance ou de son organisation, de son rôle sociétal et environnemental, de la dimension produit et servicielle, des systèmes d’information et de l’intégration des nouvelles technologies, de la distribution et la relation clients, de la mutation/hybridation des compétences, du modèle économique,… . Dans notre secteur « se transformer », selon vous est-ce seulement changer, évoluer, s’adapter, ou devenir autre chose, devenir autre ? Pourquoi ?
M.N : Le risque majeur pour les assureurs est de se transformer en simple porteur de risques, la relation clientèle leur échappant totalement. Les assureurs doivent absolument accélérer, innover, développer des services, améliorer voire réinventer complètement le parcours des clients !
Pour cela, 2 voies se présentent aux assureurs: Digitalisation & Innovation.
- La digitalisation, c’est optimiser les processus existants, repenser son SI, dématérialiser, simplifier. Les assureurs digitalisent pour collaborer plus efficacement, améliorer le service client, sécuriser les contrats, réduire les coûts…
- L’innovation, c’est inventer un autre modèle, transformer les activités, trouver des nouveaux leviers de croissance qui visent un impact sur le modèle d’affaires. Les projets d’innovation viennent pour la plupart bousculer voire totalement modifier les modes de coopération internes et externes. Ces deux approches sont séparées par leurs degrés d’audace à faire autrement.
Se transformer, c’est mener ces 2 défis en parallèle sans oublier d’organiser des points de rencontre entre les deux approches pour que l’une bénéficie à l’autre.
Pour vous la transformation d’une entreprise est-elle un processus fini et planifiable, ou un mouvement perpétuel ? Pourquoi ?
M.N : Avoir « raison » avec un projet bénéfique pour toutes les parties prenantes ne suffit pas ! Travailler autrement dans une organisation, avec des procédures très standardisées et averse aux risques, amène des difficultés voire des blocages. Initier des changements qui touchent profondément les façons de faire génère des résistances qui peuvent aller jusqu’à des « refus d’obstacle ». L’intégration d’une démarche de Change dès le début du projet pour créer du lien entre les acteurs du projet et préparer les équipes impactées permet de créer les conditions de la réussite. Les étapes d’une démarche de Change sont toutes à respecter (ici modèle ADKAR) : sensibilisation (Awareness) : lier le projet à la stratégie de l’entreprise Désir/Décision (Desire): présenter l’impact du changement sur l’équipe et sur l’individualité Connaissance (Knowledge) : former et acquérir des connaissances Capacité (Ability) : intégrer les nouveaux comportements avec efficacité Renforcement (Reinforcement) : célébrer les premiers succès pour faciliter l’ancrage des changements.
Et l’enjeu va bien au-delà de la réussite de l’implémentation de la solution, une démarche de Change permet aussi de remettre de la vie dans les entreprises, donner du sens et une raison d’être collective, comprise et motivante (et nous en avons vraiment besoin avec la crise que nous traversons).
La transformation d’une entreprise est un mouvement perpétuel.
Vous faites partie des 50 transformers* du secteur de l’assurance. Les professionnels ont probablement signifié votre capacité à porter des convictions, donner de nouvelles directions, à initier/piloter des transformations, à incarner le mouvement … . D’un point de vue professionnel, quels sont les ingrédients indispensables à la transformation d’une entreprise du secteur de l’assurance ? Pourquoi ?
M.N : Dans le contexte d’aujourd’hui et encore plus qu’hier, le secteur de l’assurance a un potentiel de « dingue » ! Les assureurs ont leur place et une utilité incroyable dans ce monde où l’incertitude va être de plus en plus dominante. Être celle ou celui qui impulse et pilote la transformation est très motivant et engageant. Ce rôle s’exerce avec un œil curieux, responsable et ambitieux : curieux de l’évolution de la société et des risques et opportunités qui l’entourent, curieux de comprendre les autres métiers, curieux des nouvelles technologies, capable d’être orienté solutions et de se détacher (oui un peu !) de la réglementation, des process, la peur des contrôles et des « on a toujours fait comme ça », et avec un leardership inspirant pour embarquer autour d’une vision ambitieuse.
Mais cette personne ne réussira pas seule car la transformation est une affaire collective avec des enjeux de posture, de réseau, de plasticité et de communication (plus authentique, plus transparente, plus pro-active, plus inclusive, plus pédagogique). Bref, se transformer est un mouvement collectif qui demande courage et enthousiasme.
Pour conclure ?
M.N : Nous ne pouvons plus ignorer le changement climatique et toutes les conséquences sociales et économiques qu’il va entrainer: emploi, santé, liberté individuelle, souveraineté, management, business, consommation, environnement, biodiversité… Les assureurs ont un rôle clé à jouer. Et là où certains cèdent aux sirènes du « retour comme avant » avec un fonctionnement très autoritaire et descendant, je suis favorable à une autre voie, systémique et collaborative. Les assureurs peuvent être des acteurs positifs de la réinvention en s’intéressant au monde dans sa globalité : finance, humains et environnement.
Réalisé le 07/04/2021 – Jean-Luc Gambey – Vovoxx
Magali Noé est dans la communauté des 50 “Transformers” de l’Assurance.
L’assurance en mouvement et le HubTday 2021 ont lancé cette consultation auprès de secteur de l’assurance pour identifier les Transformers*, ces professionnels qui transforment ou incarnent la transformation du secteur de l’assurance.