Olivier Rozenfeld, Président de Fidroit répond aux questions de Dessine-moi la gestion de patrimoine*. Quelles sont les grandes évolutions auxquelles le métier de CGP va devoir faire face dans les années à venir ?
Les conseillers en gestion de patrimoine vont devoir transformer l’essai ! Après avoir montré son utilité et s’être professionnalisé, ce métier va devoir s’enraciner sur des bases solides alors que ses acteurs sont atomisés. Il est important de gagner en puissance, en représentativité et reconnaissance vis à vis d’autres professions connexes et du grand public. Rationaliser leur activité pour consacrer plus de temps à leurs clients sera décisif. Plusieurs ingrédients deviendront alors incontournables : inter-professionnalité, segmentation des clientèles, digitalisation des process et évolution du modèle pour faire reconnaître leur qualité de conseil. Ils obtiendront ces résultats en atteignant une certaine taille critique, en développant leurs compétences et en étant les promoteurs du passage de l’économie transactionnelle à l’économie servicielle puis à l’économie de l’expérience clients. Dans un moment de tassement des marges où pèse également le risque de transférabilité des contrats, les professionnels devront faire des choix cruciaux. Les groupements actuels ne leur semblent pas naturels…La pyramide des âges fausse l’interprétation faite par certains d’un mouvement de concentration… La règlementation fragilise de multiples stocks accumulés sans contrainte… La conformité est inégalement appliquée par les compagnies. De nouveaux contrats, mandats, protocoles, modèles collaboratifs sont impératifs, Fidroit y travaille.
Y-aura-t-il des changements dans les demandes des clients ?
De la confiance, du conseil, de l’indépendance, de la personnalisation, une expérience clients simplifiée. En matière de placements, si la préservation du capital devient l’enjeu essentiel, les CGP devront poursuivre leurs capacités d’innovation et justifier leur avantage comparatif et le maintien de leur niveau de rémunération. La demande se développe aussi autour des « micro bobos ». Le client veut qu’on réponde à un besoin,
à un moment de vie, couplé pour les jeunes à une absence d’engagement. L’approche patrimoniale globale n’a d’utilité que pour les dossiers plus lourds. Les clients attendent plus de pédagogie. Ils veulent comprendre, là où d’autres professions se sont évertuées à faire de la matière un ensemble abscond pour conserver du leadership.
Comment les CGP partenaires de Fidroit ont-ils vécu cette période inédite du printemps 2020 ?
« À quelque chose, malheur est bon ». Les professionnels ont consacré du temps à leurs clients et dans une relation sans finalité commerciale tournée sur le conseil, la stratégie, la réorganisation, ce qui a été apprécié.
Et il faut avouer que les collaborateurs se sont davantage responsabilisés. Les journées sont devenues élastiques, parfois plus adaptées à une clientèle dont les horaires sont à géométrie variable. La digitalisation qui s’est formidablement accélérée a permis aux professionnels des gains de temps pour se concentrer davantage sur leurs clients. Clients qui se sont parfois étonnamment bien accommodés d’une relation devenue « phygitale ». La techno est devenue essentielle pour petits et gros cabinets. Elle permet fluidité, traçabilité, sécurité, instantanéité et la rationalisation du temps à passer en fonction de l’importance des sujets à traiter. Si des problèmes de générations peuvent exister, ils ne sont que transitoires. On peut regretter le manque d’uniformité chez les compagnies qui devraient simplifier davantage le rôle des CGP.
Comment consolider demain l’indépendance du CGP et faire connaître les atouts du métier, sa différenciation par rapport aux autres circuits de distribution ?
L’indépendance des CGP passe immanquablement par leur reconnaissance, leur crédibilité et une image différenciée des circuits bancaires traditionnels. Autant la mutualisation technique a du sens, autant les groupements à dimension commerciale pourraient en certaines circonstances être un handicap.
Les CGP doivent impérativement renforcer leur indépendance et se désensibiliser à tout ce qui peut entrainer un biais dans leur approche. Ils doivent se rapprocher du modèle libéral tout en conservant évidemment leur fibre commerciale. Mais attention, il ne viendrait pas à l’idée d’un client de payer des honoraires à un pharmacien. C’est à un juste équilibre entre l’artisanat et l’entreprenariat que j’invite les CGP. Il faut partir de la technique pour aller vers le commerce et non pas l’inverse.
Quelles sont les demandes de vos membres pour la période qui s’ouvre ?
Les professionnels souhaitent qu’on les accompagne dans leur mutation voyant dans la marque et le positionnement unique de Fidroit un atout puissant. L’impulsion est forte chez les professionnels qui prennent conscience des limites de leur réalité actuelle, mais aussi avec la nouvelle génération. Notre écosystème complet ne pose pas l’économie de son modèle sur la vente de produits, au contraire des solutions actuelles. Nous avons comme base stratégique, au vu de nos compétences, d’utiliser la technique comme développeur de business. Nos outils permettront d’industrialiser cette approche. Nous permettrons aux professionnels de passer de l’enrichissement technique à l’action pour une meilleure identification et leur développement commercial. Notre projet permettra de communiquer sur une base commune avec une montée en gamme de ses acteurs. Les professionnels vont pouvoir prendre leur destin en main, et c’est un vrai changement.
*Publication de l’ITW réalisé pour l’ouvrage « Dessine-moi la gestion de patrimoine », produit par Vovoxx, Plateforme collaborative de production et de diffusion de contenus : Assurance, Banque, Epargne, Prévoyance.