Anne-France Gauthier, Directeur commercial de VIE PLUS, répond aux questions de Dessine-moi la gestion de patrimoine*. Anne-France Gauthier, quels sont pour les CGP les défis de la relation client de demain dans le contexte que nous traversons ?
Les principaux enjeux seront de répondre aux exigences des clients qui sont en train d’évoluer sous l’impulsion d’une nouvelle génération. Très exigeante, celle-ci navigue dans le monde de l’immédiateté recherchant des gains de temps et d’efficacité en matière d’intelligibilité et de fiabilité du conseil donné et de rapidité de prise en charge de ses demandes. À l’inverse de leurs ainés, ces nouveaux clients ne s’inscrivent pas forcément dans une relation de long terme et sont beaucoup moins dans l’empathie. Leur fidélité est beaucoup plus ténue et ils sont prêts, à chaque déception, à changer de prestataires. Ils consultent leurs applications en permanence pour leur travail et leur vie privée et sont attachés avant tout à la disponibilité de leur interlocuteur. Pour le CGP, cela implique d’être un fin psychologue pour savoir gérer cette demande d’immédiateté et surtout d’être capable d’apporter à son client une vision globale des conséquences de chacune de ses décisions individuelles. L’objectif n’est pas d’apporter une réponse technique en permanence mais, en revanche, d’avoir un niveau de connaissance quasi-parfait de son client.
Le défi du CGP sera d’être au rendez-vous de cette promesse de suivi, ce qui suppose que chaque conseiller ne gère pas un nombre de clients démesuré. À court terme, l’enjeu pour les cabinets sera de maintenir leurs obligations de résultat envers leurs clients dans un contexte compliqué de distanciation physique qui pourrait perdurer. Si les moyens techniques permettent de pratiquer le conseil en étant éloigné, le problème de la prospection demeure car il est difficile de créer un lien de confiance sans être en présentiel et sans la communication non verbale.
Les attentes des conseillers changent-elles aussi ?
Il y a un effet miroir dans la mesure où les CGP attendent de nous ce que leurs clients attendent de leur part, c’est-à-dire de la réactivité, de la précision et de la fiabilité. Les professionnels sont demandeurs d’échanges verbaux, d’explications et de modèles souples pour tenir compte de situations spécifiques. Leur mode de fonctionnement doit être connu de nos équipes, parce que chacun d’entre eux est unique. Il s’agit d’une relation humaine, commerciale et technique classique. Au-delà, notre priorité doit être de leur faire gagner un maximum de temps sur les tâches sans valeur ajoutée pour leur permettre de se consacrer à la prospection et au suivi de leurs clients. En d’autres termes, nous devons alléger leurs contraintes. Prenons un exemple : l’année dernière nous avons mis en place Vie Plus Campus qui a recueilli un énorme succès. Ce dispositif leur a permis pendant 2 jours de satisfaire à leur obligation réglementaire des 15 heures de formation. Environ 600 d’entre eux en ont bénéficié.
Autre exemple, depuis la rentrée nous avons instauré une plateforme d’ingénierie patrimoniale ouverte pour la clientèle des particuliers et une autre pour les personnes morales. Une fois par semaine, un peu à la manière de Doctolib, les CGP pourront prendre un rendez-vous pour une consultation en visioconférence avec nos experts afin d’échanger sur les dossiers. Ce type d’accompagnement est en phase avec les attentes des cabinets et crée de la confiance, comme l’attendent nos partenaires.
La digitalisation est-elle vraiment sur les rails et peut-elle changer les contours du métier ou renforcer sa présence sur le marché ?
La digitalisation et plus globalement tous les outils de travail à distance appartiennent à la catégorie des solutions qui simplifient le métier des indépendants.
Il faut partir du principe que la partie opérationnelle de la souscription d’un contrat a une faible valeur ajoutée à la différence de toute l’ingénierie patrimoniale et les services que les CGP ont pu mettre en œuvre pour conclure ce même contrat. La digitalisation a pour effet de libérer du temps en avant-vente et en après-vente.
Elle doit amener à matérialiser la souscription le plus rapidement et le plus simplement possible.
Vie Plus et plus globalement le groupe Arkéa ont toujours été en avance sur le digital. Nous sommes bien identifiés sur le terrain de la Fintech et cette notoriété nous aide bien pour le déploiement de nos solutions. Avant la crise, au moins la moitié de notre activité était digitalisée, ce qui nous a permis d’être réactifs dès le début
du confinement. D’emblée, nous avons lancé des webinaires « pas à pas » pour aider les « réfractaires » au digital à s’approprier les outils. Les plus réticents de nos partenaires ont pris le virage tout comme les clients, y compris les personnes dites « âgées ». Ces dernières ont évolué sur la décennie. Elles sont très connectées pour rester en contact avec leurs familles. Nous n’avons pas ressenti de problématiques générationnelles spécifiques par rapport à la digitalisation. Pour l’avenir, les CGP qui ont su se différencier des autres réseaux par leur capacité à réagir très vite dans la maîtrise des outils à distance de souscription et de suivi ont marqué des points et sont en pole position pour gagner des parts de marché.
Y a-t-il un marketing « CGP » à revoir, selon vous ?
Les CGP évoluent dans des structures hétérogènes. Ils ont parfois de la pudeur à assumer la partie « libérale et conseil » C’est dommage car aujourd’hui les clients admettraient totalement leurs rémunérations aux honoraires. Le côté hybride de la rémunération, notamment celle sur encours, brouille par moment l’image globale
du métier. Je pense que la rétribution sous forme d’honoraires s’inscrit dans le sillage de la réglementation du métier, avec MIF, DDA ou PRIPP’s. D’une manière générale, la transparence va valoriser la profession.
Notre rôle est de nous adapter à chacun des modèles et d’être au rendez-vous dès que les évolutions se présentent. Juger de telle ou telle bonne pratique ne m’appartient pas, ce n’est pas mon rôle.
Etes-vous optimiste malgré ce contexte difficile ?
Nous le restons. La crise sanitaire nous a permis à tous de faire preuve d’une ouverture d’esprit incroyable et il ne faut pas que celle-ci se referme. L’adaptabilité de l’être humain est toujours incroyable. Il y a à peine un an, si nous avions évoqué le risque de confinement de toute une économie, on nous aurait rétorqué que cette probabilité était quasi-nulle. Depuis nous avons fait face à une situation à laquelle personne ne s’attendait et que ma génération n’a jamais vécue. Donc nous savons que tout peut arriver. Pourtant, nous nous sommes adaptés. En 48 heures, nous sommes passés en télétravail et avons modifié nos processus de gestion pour continuer à avancer. Tout cela s’est effectué de façon assez fluide parce que nous étions déjà très engagés dans le digital. Voilà pourquoi, le maître mot est de s’adapter en permanence. N’oublions pas que nos valeurs chez Vie Plus sont : « agile, visionnaire et engagé ».
*Publication de l’ITW réalisé pour l’ouvrage « Dessine-moi la gestion de patrimoine », produit par Vovoxx, Plateforme collaborative de production et de diffusion de contenus : Assurance, Banque, Epargne, Prévoyance.