La terrible épreuve sanitaire, humaine et économique liée à la pandémie Covid-19 a eu des conséquences immédiates, majeures sur nous, nos familles, nos amis, nos relations et sur tous les pans de notre société. L’onde de choc touche également toutes les entreprises, de tous secteurs d’activités.
Cette crise n’est évidemment pas ordinaire et est caractérisée par des bouleversements radicaux et probablement structurants. Si le sociologue Denis Peschanski* « prend le pari que se construit dès aujourd’hui une mémoire collective de cet événement extra-ordinaire. », Michel Dupuis**, philosophe signale que « L’épidémie a en commun avec la question du climat qu’elle nous rappelle que nous sommes tous dans le même bain et que nous ne nous en sortirons qu’ensemble. Le désir de survie éveille ainsi une forme élémentaire de conscience citoyenne. L’épidémie remet la nature au centre du jeu. Elle nous rappelle que, nous ‘esprits arrogants’, pouvons aussi mourir ‘bêtement’, de la nature. » Si certaines conséquences de la pandémie seront probablement temporaires, d’autres seront irréversibles. La nouvelle normalité ne sera pas un retour à la « normale ».
Si nous sommes très loin de connaître toutes les conséquences de la Covid sur la santé (nécessité de disposer de méta-analyse sur les séquelles, impact des déprogrammations de traitements/interventions d’autres pathologies jugées « moins urgentes »,… ), nous sommes loin de pourvoir projeter les impacts sociétaux et économiques durables.
D’un point de vue professionnel, ce nouveau monde d’incertitudes n’obère pas la nécessité absolue de se poser la question fondamentale de la ré-invention de certains secteurs d’activité.
Les assureurs ont déjà connu des catastrophes naturelles et des flambées épidémiques virales, mais la nature et l’ampleur mondiales de la crise COVID-19 et ses conséquences rendent le contexte particulièrement spécifiques pour les assureurs. Ainsi qu’en sera-t-il du secteur de l’assurance ? Les acteurs de ce secteur ressortiront-ils plus forts ? Devront-ils prendre des mesures faisant table rase du passé ? Cette terrible épreuve sanitaire et ses conséquences devront-elles obliger les entreprises à entrer dans un esprit de ré-invention et accélérer leur transformation ? Est-ce que cet évènement exceptionnel ne remettra pas en cause les modèles en place, ou simplement devons-nous considérer que la survenance de cet évènement nécessite quelques adaptations ?
Cette terrible situation sanitaire mondiale aura probablement, si nous pouvons le dire ainsi…, quelques « vertus » : réapprendre des gestes de précaution sanitaire basiques mais oubliés, prendre conscience de l’absence ou de la fragilité de notre politique nationale de santé, souhaiter travailler avec des entreprises plus « humaines », avoir des comportements individuels plus vertueux, privilégier des actions plus collectives et sociétales,… mais aussi tout simplement devoir, se nourrir, se loger, se déplacer, travailler et consommer différemment,… .
Si les temps de crise, quelle qu’en soit la nature : guerre, épidémie, crise économique,… font toujours naître des aspirations à l’émergence d’un monde meilleur, différent, cette pandémie et l’ensemble de ces conséquences, ne seront-t-ils pas finalement le socle d’une disruption tant annoncée ? Alors que bien avant l’apparition de la COVID-19, la disruption était une menace tangible pour la plupart des secteurs d’activité, que nombre d’experts prédisaient, sur notre secteur, une disruption générée quasi exclusivement par l’apport des nouvelles technologies, les start-ups et la transformation de certains modèles économiques, ne devons-nous pas aujourd’hui considérer que la COVID-19 nous prépare à l’assurance du monde d’après, à une obligation de transformation réparatrice et créatrice ?
Nous aurons l’occasion d’échanger, très prochainement de ce sujet. N’hésitez pas aussi à nous contacter, si intérêt sur ce sujet.
Jean-Luc Gambey
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*Directeur de recherche au CNRS, historien au centre européen de sociologie et de science politique, (Université Paris 1, CNRS, EHESS) et membre du Conseil scientifique de l’Observatoire B2V des Mémoires
**Professeur à l’Institut supérieur de philosophie de l’UCLouvain. Spécialiste en éthique biomédicale, il est membre du Comité consultatif de bioéthique de Belgique