Le PER vise une simplification du paysage de l’épargne retraite supplémentaire. Dans ce contexte, le PER permet-il une meilleure compréhension de l’épargne-retraite supplémentaire pour les clients ? Les Français seront-ils plus nombreux à s’engager dans des dispositifs d’épargne-retraite ?
Il est probable que les clients comprendront mieux la mécanique générale des « types de plans » et leur fiscalité. Par contre, pour accepter le mode d’investissement par défaut, qui va comprendre une dose de risque, il leur faudra plus de « technique ». Les premiers retours que nous avons du terrain, confirment l’intérêt du public. Nous devrons attendre d’avoir du recul pour tirer des conclusions. Cependant il serait logique que les Français en plus grand nombre, mais aussi, pour des sommes plus importantes, s’orientent vers ces nouvelles solutions. La principale raison est que le système de base soit réformé ou pas, nous savons que la majorité des Français ne s’en satisferont pas et l’offre PER est une offre simplifiée par rapport à la précédente.
Le PER lève-t-il tous freins à la retraite complémentaire par capitalisation, pour une acceptation par les clients ? Les Français vont-ils, via ce nouveau dispositif, adhérer significativement à la retraite supplémentaire par capitalisation ?
Pas tous mais elle en lève beaucoup ou disons qu’elle les amoindrit. Comme je l’ai dit précédemment, je pense que nous aurons plus de Français utilisateurs. Il faut cependant considérer que pour certaines personnes à faible revenu, cela dépendra de la mise en place ou non de solutions, par leur employeur, à la condition qu’ils en aient un. Mais ce n’est pas nouveau.
L’activité commerciale sur l’épargne retraite supplémentaire va-t-elle, selon vous significativement augmenter ?
Cela va dépendre des types de réseaux. Les produits ont été officiellement taillés pour être « conseillés ». Je pense qu’il y aura 2 types de distributeurs dont l’activité va pousser sur ce créneau : les Conseils en Gestion de Patrimoine (y compris les Institutionnels via leurs CGP, quand ils en ont) et à l’autre bout du système, les plateformes digitales qui satisferont les clients qui savent ce qu’ils veulent et/ou se satisferont de l’option de gestion par défaut. Pour les autres formes de distributeurs, il y aura un appel d’air mais ils n’ont pas d’avantage compétitif particulier et leur communication/publicité ne suffira pas à combler le déficit de crédibilité.
Cette simplification de l’épargne retraite supplémentaire, va-t-elle accélérer la digitalisation de la distribution de produit épargne-retraite ?
Probablement mais il n’y a pas de raison d’assister à une « disruption ». Elles sont adaptées à un public ciblé mais pas à ceux qui veulent du conseil or, la phase de sortie est légalement assortie d’une obligation de conseil. Il y aura, parmi les « tech » ceux qui sauront faire et les autres. Aujourd’hui ce que nous voyons c’est que ceux qui savent faire sont souvent des offreurs de BtoC minoritairement et de BtoBtoC principalement, ce qui est logique. Ça devrait un peu doper le volume de prestation directe aux clients mais le modèle techno dominant devrait rester celui de l’outil dans un schéma homme/machine.
Ce nouveau paysage de l’offre épargne retraite supplémentaire est-il aujourd’hui bien compris par les intermédiaires de proximité ? Ce nouveau dispositif de l’épargne retraite supplémentaire va-t-il bénéficier aux réseaux de proximité ?
Dans les deux cas la réponse est oui. L’assimilation et l’analyse ne sont qu’en cours, mais je suis assez surpris du niveau technique et des critiques positives ou négatives que j’ai pu entendre ou constater, très vite après la sortie des premières offres, qui sont déjà de bon niveau. Par ailleurs, dès lors que le mot « conseil » est employé, il y a une dimension proximité indiscutable et c’est le cas.
Les intermédiaires de proximité ont/auront-ils besoin d’accompagnement (formation, nouveaux outils informatiques, outils d’aide à la vente, …) ?
Nous sommes en France, le pays patrimonialement le plus technique du Monde avec la Grande-Bretagne. Donc c’est le cas depuis toujours. Un CGP passe tous les ans des dizaines d’heures en formation et même, n’en finit jamais de se former. Pour ce qui est des outils, nous en avons beaucoup, les choses avancent vite sur ce sujet. La nouveauté c’est peut-être que nos associations ont été associées au projet par le Gouvernement et que nous avons agi comme des accélérateurs d’assimilation.
Ce nouveau paysage de l’offre épargne retraite fera-t-il que les intermédiaires de proximité seront plus nombreux et plus efficaces à commercialiser des dispositifs d’épargne-retraite ?
Pour ce qui est du nombre, je n’en suis pas sûr. Nous sommes déjà nombreux. Je parierai plus sur une augmentation des moyens mis par chacun. Tout dépend donc si nous raisonnons en nombre de cabinets ou d’emplois. Il n’y aura pas plus d’entreprises à la manœuvre, mais peut-être plus d’hommes et de femmes … ou d’outils technos au service de ces entreprises. Concernant l’efficacité, oui bien sûr, elle progressera. Tous les exemples passés comparables le démontrent et ce, même sans grande campagne d’accompagnement, alors que dans le cas présent, elle est massive.
Le PER va-t-il ouvrir de nouveaux marchés ? Le PER va-t-il permettre le transfert de l’épargne vers de l’épargne retraite ? Le PER va-t-il permettre de sortir les épargnants du fonds en euros pour aller vers les unités de compte ?
Il va étendre le marché plus qu’en ouvrir de nouveaux et effectivement, entre autres mais principalement du fait que nous pouvons anticiper un transfert en provenance de l’assurance-vie classique. Pour ce qui est du fonds euro, évidemment on s’attend à sa diminution, mais la demande client reste forte. L’action des compagnies qui en restreignent l’accès va avoir un effet plus important.
Concernant les offres du marché, sur quoi vont elle se différencier ? Le niveau des frais, le rendement, les options proposées, les services de gestion à distance,… ou autres ?
Les éléments différenciants seront simples : la diversité de l’offre, la qualité de la gestion car il va falloir savoir faire de la gestion à horizon, qui n’est pas la spécialité française et le service de la rente. Tous les autres facteurs seront importants à commencer par les frais et les outils d’information, cependant aujourd’hui, tous les acteurs savent s’adapter là-dessus.
Au final, l’arrivée du PER impactera-t-elle fortement le marché français de l’épargne retraite supplémentaire ? En général ? Pour l’individuel ? Pour les TNS ? Pour le Collectif ?
Tous les segments seront impactés. Le segment des TNS était peut-être déjà un peu plus acheteur et la nouveauté pourrait venir d’une poussée sur l’individuel.
Avez-vous d’autres commentaires/convictions ?
Il faut vraiment que les CGP, quel que soit leur modèle, se saisissent de cette opportunité et que les citoyens ne se braquent pas, du fait des débats autour de la protection du système de retraite par répartition, en rejetant cette novation vraiment intéressante. Les deux sont complémentaires.
David Charlet – Président – ANACOFI & FECIF
ITW réalisé avant période de confinement et intégré dans le mag #1 « Dessine-moi l’assurance » réalisé par Jean-Luc Gambey – Vovoxx