En 2018, d’après la Caisse Centrale de Réassurance (CCR), le coût des catastrophes naturelles en France pour les assurances s’élevait à 1,8 milliards d’euros, faisant ainsi de 2018, la 4ème année la plus sinistrée depuis 1946. Le constat se veut alarmant pour les années à venir : un rapport du Sénat estime que d’ici 2050, le montant des sinistres liés aux catastrophes naturelles augmenterait de 50%. Pour intégrer ces nouvelles variables au paysage assurantiel, la réforme du régime d’indemnisation “cat’nat’” en cours devrait abonder dans le sens des assureurs et faciliter l’anticipation de la survenance des catastrophes naturelles. De leur côté, les assureurs en pleine digitalisation, s’appuient sur le Big Data pour établir des modèles prédictifs. Au cœur de leurs enjeux : anticiper les risques climatiques pour protéger au mieux leurs assurés avec une tarification personnalisée.
Big data et analyse prédictive, de la donnée à la prévention des catastrophes naturelles
Avec le Big Data, il est désormais possible de brasser des millions de données météorologiques et géologiques en temps réel, ce qui facilite considérablement la modélisation et l’anticipation de catastrophes naturelles. Si ces données sont si précieuses, c’est surtout parce qu’elles sont croisées avec de multiples indicateurs tels que les prévisions météo, le suivi des cours d’eau ou encore le volume des précipitations. Sans pour autant lire l’avenir dans une boule de cristal, la détection de corrélations suffisamment fines permet de dégager des modèles prédictifs de prévisions des sinistres.
Certains assureurs, par la mise en place d’un Data Lake (outil de stockage centralisé contenant un grand nombre de données provenant d’une multitude de sources) et grâce à des outils de simulation de sinistres, parviennent à croiser les données historiques avec des données météorologiques des 3 à 5 prochains jours afin de pouvoir prédire les risques climatiques avec une granularité plus fine qu’auparavant. Le réchauffement climatique et la croissance des catastrophes naturelles rendent indispensable l’actualisation des données telles que nous les connaissons. Pour pallier cette problématique, l’archivage des données d’images satellites participe à l’actualisation de la modélisation des risques en recueillant des données plus récentes sur ces nouvelles zones susceptibles d’être impactées.
Ainsi, la société Predict, filiale de Météo France, Airbus Defense&Space et du groupe BRL, spécialiste dans la prévention des risques climatiques, s’est attelée à cartographier des millions de données topographiques qu’elle a ensuite croisées avec les données climatiques historiques. Ses objectifs ? Surveiller en temps réel les phénomènes climatiques, identifier les zones qui seront touchées et mettre en place les actions qui s’imposent.
Le rôle des assureurs, entre anticipation et maîtrise des risques climatiques
De plus en plus pointus en la matière, les assureurs sont parfois les premiers à alerter sur l’arrivée imminente d’une catastrophe naturelle tel que cela a été le cas pour les inondations d’octobre 2018 dans les départements de l’Aude et de l’Hérault.
Avec des alertes orange jugées trop fréquentes, des alertes rouges trop tardives et une cartographie qui ne permet pas d’anticiper précisément la survenance d’une catastrophe, la fiabilité des données de Météo France est souvent remise en cause. Pour obtenir une connaissance plus fine des communes qui seront touchées par ces risques, Predict s’associe avec des assureurs comme Groupama, AXA ou encore Generali pour renforcer ses actions. Pour les assureurs, il est question d’évaluer au mieux les risques encourus par chaque assuré, leur probabilité de survenir et leur force afin de proposer une tarification adaptée. L’anticipation des risques climatiques revêt également un objectif de diversification du portefeuille de risques et de mutualisation, rôles principaux de l’assurance qui ne peuvent être respectés qu’à condition d’anticiper la nature des risques encourus et le niveau d’exposition des assurés.
AXA XL, avec son service de modélisation prédictive, permet aux entreprises d’évaluer leur exposition aux risques naturels et ainsi d’adapter leur couverture assurantielle en trois étapes. Premièrement, en se basant sur l’analyse de données et de modèles historiques pour donner une orientation des catastrophes naturelles qui se sont déjà produites. Cette étude permet à AXA XL d’identifier les incidents naturels susceptibles de se produire, leur fréquence, leur intensité et donne une indication sur les zones touchées et les répliques potentielles. S’ensuit une analyse de la solidité des infrastructures assurées et de la fiabilité de la construction des bâtiments, toujours en fonction des incidents naturels susceptibles de se produire. Enfin, une estimation des pertes potentielles est opérée en cas de survenance de la catastrophe.
De son côté, pour anticiper les risques climatiques, Generali utilise un outil qui s’appuie sur l’IA et qui permet de géolocaliser les biens de ses assurés pour visualiser leur exposition aux risques climatiques.
Une cartographie précise des aléas climatiques permet alors à l’assuré d’identifier si son bien se situe dans une zone exposée, d’évaluer son exposition au risque sur l’ensemble de son portefeuille ainsi que la force de l’aléa climatique et la probabilité qu’il a de survenir.
L’assurance paramétrique, vers une révolution de l’indemnisation
Pour le secteur de l’assurance, prévenir les risques climatiques signifie également déployer des actions de prévention auprès des assurés, par des alertes SMS en cas de crise par exemple, et mettre en œuvre des solutions adaptées pour réagir rapidement en toute connaissance de cause. Par ailleurs, prévenir les risques est aussi un gage de maîtrise de gestion de crise, notamment en anticipant l’arrivée d’un flux important de demandes d’indemnisations des assurés. Tout en gardant à l’esprit que l’arrivée des assurances paramétriques bouleversera bientôt les processus actuels, les indemnisations seront bientôt versées automatiquement aux assurés dès la constatation d’une catastrophe naturelle, par drone ou par traitement de données d’imagerie satellite.
Auteure : Jennifer Mabert, Consultante mc2i Groupe
Sources :
http://www.leparisien.fr/environnement/initiatives-environnement/le-big-data-pour-mieux-prevenir-les-inondations-24-01-2018-7520220.php
https://www.argusdelassurance.com/assurance-dommages/catastrophes-naturelles-axa-xl-lance-un-service-de-modelisation-pour-les-entreprises.150650
https://www.argusdelassurance.com/produits-services/catastrophes-naturelles-l-indemnisation-vue-du-ciel.127294
https://www.argusdelassurance.com/assurance-dommages/inondations-alerter-une-mission-de-l-etat-et-des-assureurs.136994
https://www.argusdelassurance.com/assurance-dommages/risques-climatiques-generali-lance-un-outil-de-geolocalisation-intelligente.150135
https://www.argusdelassurance.com/assurance-dommages/catastrophes-naturelles-une-facture-superieure-a-la-moyenne-en-2018.144545
https://dataanalyticspost.com/catastrophes-naturelles-data-science-interesse-assureurs-assures/
http://theconversation.com/les-algorithmes-predictifs-enjeux-de-linterpretation-78411